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  1. Plan à long terme pour la physique subatomique au Canada

  2. 1. Résumé

    1. Recommandations : Plan pour la recherche en physique subatomique au Canada

    2. Recommandations : Communauté des chercheurs en physique subatomique au Canada

    3. Recommandations : Ressources et soutien à la recherche en physique subatomique au Canada

  3. 2. Les grandes questions en physique subatomique

    1. 1. Quelle est la nature de la physique à l’échelle électrofaible et inférieure?

    2. 2. Quelle est la nature de la masse des neutrinos?

    3. 3. Quelle est la nature de la matière sombre dans l’univers?

    4. 4. Quelles sont les structures sous-jacentes aux forces et à la matière dans l’univers?

    5. 5. Comment les quarks et les gluons créent-ils les propriétés hadroniques et les phases de la matière hadronique?

    6. 6. Comment la structure des noyaux émerge-t-elle des forces nucléaires?

    7. 7. Comment les éléments ont-ils été formés dans l’univers?

  4. 3. Plan de recherche pour la physique subatomique au Canada

    1. Théorie

    2. Installations et expériences phares en cours

    3. Expériences stratégiques à petite échelle

    4. Grands projets futurs

    5. Perspectives pour 2022-2026

  5. 4. La communauté des chercheurs en physique subatomique au Canada

    1. Profil de la communauté

    2. Profil des chercheurs

  6. 5. Ressources et soutien à la recherche en physique subatomique au Canada

    1. Laboratoires et instituts canadiens

    2. Installations dans les universités du Canada

    3. Instituts et laboratoires à l’étranger

    4. Mécanismes de financement au Canada

    5. Coordination du soutien pour la physique subatomique

    6. Accroissement du financement du CRNSG en physique subatomique

  7. 6. Rendement des investissements

    1. Retombées culturelles : Inspirer les Canadiens

    2. Retombées pour l’éducation : Formation d’un personnel hautement qualifié

    3. Retombées technologiques : Applications de la physique subatomique

    4. Retombées économiques directes : Liens avec l’industrie

  8. Prix Nobel de physique 2015

  9. Glossaire

  10. Mandat du Comité

  11. Membres du Comité de rédaction du plan à long terme

1. Résumé

La recherche en physique subatomique vise à découvrir et à comprendre les lois fondamentales qui régissent l’univers. L’étude de la matière à des distances inférieures à celles des atomes et des noyaux fait émerger des structures et des phénomènes qui révèlent la nature fondamentale de la matière et des forces. Des progrès remarquables ont été réalisés au cours des 100 dernières années en physique subatomique, mais il reste encore à formuler une théorie complète de la matière et des forces, et c’est là un objectif des plus passionnants.

La physique subatomique au Canada jouit d’une réputation enviable, et plusieurs grands projets dans lesquels des chercheurs canadiens ont joué un rôle important ou de premier plan ont été récompensés récemment par de prestigieux prix internationaux. Le Prix Nobel de physique 2013 et le Special Breakthrough Prize in Fundamental Physics 2013 ont récompensé la découverte du boson de Higgs par les deux grandes expériences réalisées au CERN, notamment l’expérience ATLAS dont le Canada est un partenaire important. Corécipiendaire du Prix Nobel de physique 2015 avec Takaaki Kajita (Université de Tokyo) pour la découverte des oscillations de neutrinos, le Canadien Arthur McDonald (Queen’s University) a été honoré pour son rôle dans l’expérience SNO qui a été couronnée de succès et à laquelle ont participé de nombreux collaborateurs canadiens et étrangers. Le Breakthrough Prize in Fundamental Physics 2016 a également récompensé l’expérience SNO ainsi que quatre autres expériences, dont T2K à laquelle participe un fort contingent canadien.

L’excellence canadienne en physique subatomique a également été reconnue dans le cadre de récentes évaluations de l’état de la science au Canada. Dans son rapport de 2012 intitulé L’État de la science et de la technologie au Canada, le Conseil des académies canadiennes indiquait que la physique nucléaire et des particules constitue l’un des sous-domaines dans lesquels le Canada se classe au premier rang en termes d’impact scientifique. Le Rapport sur la science et la technologie de 2014 du gouvernement canadien incluait la découverte du boson de Higgs dans sa compilation des « grandes percées canadiennes en science et en technologie ».

La physique subatomique au Canada s’est développée grâce à l’organisation de groupes cohésifs qui travaillent sur les questions les plus urgentes dans le domaine et qui ont maintenant atteint un nouveau sommet d’excellence; les chercheurs canadiens y jouent un rôle de premier plan. En respectant ses engagements, le Canada s’est acquis une solide réputation et est devenu un partenaire recherché dans les grandes collaborations internationales. Les retombées de cette recherche vont au-delà de notre compréhension globale de l’univers. Elles se traduisent également par des avantages tangibles pour la société en inspirant les jeunes et en les attirant vers des carrières en science et en technologie, en favorisant la formation de personnel hautement qualifié et en développant des technologies de pointe ayant des applications dans divers domaines comme les soins de la santé, l’exploitation des ressources naturelles, la sécurité et l’énergie.

Afin de permettre au Canada de poursuivre sur sa lancée fructueuse en physique subatomique, le Comité du plan à long terme en physique subatomique au Canada a élaboré une série de recommandations pour la période de 2017 à 2021, après avoir consulté l’ensemble de la communauté. Ces recommandations découlent des principes clés suivants qui ont permis au Canada de se forger une place de choix :

  • participer aux plus hauts niveaux possible, assumer des rôles de leadership et s’attaquer aux problèmes de recherche les plus importants;
  • assurer des retombées importantes en concentrant ses efforts et en assumant des responsabilités majeures dans les grands projets mondiaux en physique subatomique;
  • participer de manière stratégique à de petits projets novateurs offrant un potentiel de découverte important;
  • maintenir une capacité et une souplesse permettant de tirer profit des nouvelles occasions scientifiques lorsqu’elles se présentent;
  • faire participer pleinement les étudiants du premier cycle et des cycles supérieurs ainsi que les stagiaires postdoctoraux à tous les aspects de la recherche scientifique;
  • respecter les promesses faites aux partenaires de recherche au Canada et à l’international.

Les recommandations scientifiques et stratégiques qui apparaissent dans le corps principal du rapport sont reprises dans la présente section et précédées d’un bref paragraphe de mise en contexte. Les recommandations ne suivent aucun ordre de priorité particulier.

Recommandations : Plan pour la recherche en physique subatomique au Canada

La recherche en physique subatomique théorique permet de mieux comprendre les grandes questions dans ce domaine, offre les assises permettant d’interpréter les résultats expérimentaux et pointe vers de nouvelles pistes de découverte.

Recommandation scientifique :

Continuer d’appuyer fermement la recherche en physique subatomique théorique.

Le Canada joue un rôle majeur dans un certain nombre d’installations et d’expériences de calibre mondial, aux frontières de la physique subatomique. Ces projets, cruciaux dans la quête de réponses aux grandes questions dans ce domaine, ont été planifiés et conçus sur plusieurs décennies, et ils avaient déjà été définis comme les projets les plus prioritaires dans les précédents plans à long terme en physique subatomique.

Recommandation scientifique :

Assurer des ressources et un soutien continus aux grandes expériences et installations ci-dessous, qui produisent déjà des résultats scientifiques grâce aux importants efforts canadiens et internationaux coordonnés, afin de leur permettre de réaliser leur plein potentiel :

La participation canadienne à certaines expériences de moindre envergure offre des possibilités spéciales en termes de leadership, de formation et de découverte, ce qui représente un bon rendement scientifique pour des investissements canadiens relativement faibles. Les projets de cette nature peuvent émerger hors du calendrier prévu par le plan à long terme. Il faut pouvoir disposer de fonds pour tirer profit de ces nouvelles possibilités lorsqu’elles se présentent, et il est particulièrement important de continuer à soutenir ces projets dans le cadre de partenariats internationaux pendant qu’ils sont encore compétitifs sur le plan scientifique.

Recommandation scientifique :

Soutenir les efforts canadiens stratégiques à petite échelle, pouvant rejoindre une plus grande partie de la communauté des chercheurs. Il est important entre autres de continuer à soutenir la participation canadienne aux projets internationaux suivants : ALPHA, JLab, les expériences avec les faisceaux d’isotopes rares à l’étranger et IceCube.

Plusieurs expériences et installations d’envergure internationale qui permettront de mieux comprendre l’univers deviendront opérationnelles au cours des prochaines années. Il est important que le Canada participe à ces projets afin de préserver son dynamisme dans le domaine. De plus, il est crucial d’être actif dès les premières étapes afin que les Canadiens puissent assumer un rôle de premier plan et contribuer au succès de ces projets.

Recommandation scientifique :

Positionner le Canada pour qu’il assume un leadership clé dans des initiatives et des projets stratégiques en soutenant d’éventuels grands projets. Plusieurs expériences devraient recevoir un soutien permettant une participation canadienne importante : ATLAS au LHC haute luminosité, Belle II, Hyper-Kamiokande, ILD à l’ILC, MOLLER et SoLID à JLab, nEXO à SNOLAB, et UCN/nEDM à TRIUMF.

Les progrès en physique subatomique seront tributaires du perfectionnement des technologies existantes ou du développement de nouvelles technologies pour accélérer et détecter les particules. Le Canada devrait participer activement au développement de ces technologies, non seulement parce qu’elles peuvent améliorer les projets en cours et permettre de nouvelles expériences, mais également parce qu’elles peuvent avoir des retombées dans des domaines à l’extérieur de la physique subatomique et profiter à l’ensemble de la société.

Recommandation scientifique :

Soutenir les propositions de R et D dirigée et générique sur les accélérateurs et les détecteurs en physique subatomique.

Recommandations : Communauté des chercheurs en physique subatomique au Canada

Il est largement reconnu que bon nombre des domaines en sciences, technologie, ingénierie et mathématiques (STIM), incluant la physique subatomique, souffrent généralement d’un manque de diversité. De nombreux facteurs contribuent à ce déséquilibre, qui est manifeste tant au niveau étudiant qu’aux niveaux les plus avancés. Plusieurs comités ont été mis en place par l’Association canadienne des physiciens et physiciennes, l’American Physical Society et la Société européenne de physique pour déterminer les barrières, s’attaquer aux stéréotypes et promouvoir des mesures afin de remédier à cette situation. La communauté des chercheurs canadiens en physique subatomique devrait soutenir activement ces efforts pour assurer et favoriser de réelles chances égales à tous les niveaux.

Recommandation stratégique :

Les établissements, chercheurs et organismes de financement canadiens sont encouragés à œuvrer ensemble afin de favoriser une communauté diversifiée de chercheurs et de chercheuses en physique. Tous les membres de la communauté canadienne des physiciens sont encouragés à soutenir l’élaboration et la mise en œuvre d’un plan stratégique coordonné afin d’atteindre ce résultat, y compris la compilation de données et de statistiques pertinentes et le suivi des progrès. La communauté des chercheurs devrait promouvoir activement une représentation équilibrée à tous les échelons, y compris aux niveaux de grande responsabilité et de haute visibilité, car les personnes occupant ces postes sont une importante source d’inspiration.

La communauté des chercheurs en physique subatomique a la capacité de former davantage d’étudiants diplômés. Ces étudiants demeurent en physique subatomique et deviennent chercheurs, ou encore ils entreprennent des carrières dans de nombreux domaines importants pour l’économie ou le système éducatif du Canada. Compte tenu des faibles coûts additionnels nécessaires pour soutenir davantage d’étudiants des cycles supérieurs, l’accroissement des régimes de financement existants, particulièrement afin de soutenir la formation des étudiants diplômés, constituerait un investissement fort rentable et représenterait une grande valeur pour le Canada.

Recommandation stratégique :

Accroître les fonds accordés aux bourses et à l’enveloppe en physique subatomique afin de former un plus grand nombre d’étudiants des cycles supérieurs. Un tel investissement aura de grandes retombées pour le Canada en permettant à la communauté des chercheurs d’utiliser ses capacités pour faire participer davantage d’étudiants dans ce domaine et former du personnel hautement qualifié qui pourrait contribuer à la société en utilisant de nombreuses façons ses compétences pertinentes dans maints secteurs, dont le milieu universitaire, l’industrie et la médecine.

Recommandations : Ressources et soutien pour la recherche en physique subatomique au Canada

Les laboratoires canadiens en physique subatomique sont essentiels au succès continu de la recherche dans ce domaine au Canada. Disposant des installations leur permettant de réaliser des expériences, ils constituent la base sur laquelle le Canada s’appuie pour participer au réseau international de laboratoires en physique subatomique.

Recommandation stratégique :

Continuer d’accorder un fort soutien aux laboratoires canadiens en physique subatomique : TRIUMF et SNOLAB.

Le programme des chercheurs de l’Institut de physique des particules (IPP) a eu un vif succès en accroissant le profil international du Canada en physique des particules et en permettant aux Canadiens de participer aux postes de leadership les plus élevés dans des expériences de pointe en physique des particules. La communauté des physiciens des particules considère que le programme de chercheurs de l’IPP est sa principale priorité en matière de financement.

Recommandation stratégique :

Assurer le financement adéquat du solide programme existant des chercheurs de l’IPP.

Le CERN est sans conteste le principal laboratoire mondial en physique des particules, fort de ses succès en termes de recherches, de découvertes et de collaborations scientifiques internationales. C’est un modèle de partenariats productifs et novateurs avec l’industrie, et il offre une voie permettant aux petites et moyennes entreprises de percer le secteur industriel européen de la haute technologie. Le Canada peut manifestement profiter, sur les plans scientifique et économique, d’une relation plus formelle avec le CERN, notamment dans le cadre d’ententes bilatérales ou en devenant un membre associé. Une telle collaboration servirait de modèle pour des partenariats futurs avec d’autres organisations et installations internationales.

Recommandation stratégique :

Les représentants du gouvernement du Canada, des organismes de financement et des autres parties intéressées dans les universités, les instituts et les laboratoires du Canada, ainsi que les partenaires industriels, sont instamment priés d’établir des relations plus officielles entre le Canada et le CERN.

Le système d’enveloppe du CRSNG pour la physique subatomique est essentiel, car il constitue un soutien à long terme pour les grands projets nationaux et internationaux.

Recommandation stratégique :

Conserver le système d’enveloppe actuellement utilisé par le CRSNG pour la physique subatomique, y compris les subventions à la découverte d’équipe et le Programme d’appui aux ressources majeures.

L’approbation internationale des grands projets peut prendre des années, s’appuyant sur la contribution des organismes de financement de chaque nation participante. Il est important que les délais parfois longs qui s’écoulent entre les concours de la FCI n’empêchent pas le Canada de participer à ces projets. En permettant la présentation de demandes pour des projets qui n’ont pas encore été approuvés et en octroyant des subventions sous réserve de leur approbation, le Canada peut jouer un rôle de premier plan en permettant aux projets d’avancer et en tirant parti efficacement du financement international.

Recommandation stratégique :

Conserver la capacité de la FCI d’étudier les demandes concernant des projets internationaux qui n’ont pas encore été approuvés, et d’offrir des subventions sous réserve de l’approbation des projets.

Avant d’entreprendre un nouveau projet d’envergure, il faut obtenir des assurances que l’on disposera de suffisamment de capitaux, de fonds de fonctionnement et d’autres ressources. Comme ce soutien provient d’organisations indépendantes, il est important de coordonner le processus d’approbation de nouveaux projets.

Recommandation stratégique :

Coordonner les processus touchant les ressources, le financement et les approbations entre les organismes et les laboratoires qui soutiennent la physique subatomique au Canada.

La participation canadienne au processus décisionnel concernant les grandes installations internationales proposées, comme le LHC haute luminosité et la construction d’un futur collisionneur linéaire international, nécessite une coordination aux plus hauts niveaux. Ce rôle n’est actuellement pas défini au sein du gouvernement canadien. La participation du gouvernement fédéral est requise pour les discussions avec les autres gouvernements étrangers et pour assurer un financement spécial en vue de la participation canadienne à ces nouvelles installations internationales.

Recommandation stratégique :

Désigner un organisme au sein du gouvernement canadien qui serait responsable de négocier avec les instances étrangères et internationales afin de faire progresser les nouvelles initiatives scientifiques majeures.

L’érosion des « fonds d’occasion » dans l’enveloppe menace la capacité de la communauté des physiciens d’entreprendre de nouveaux projets. Afin de remédier à cette situation, il est nécessaire d’augmenter l’enveloppe. En outre, les estimations des coûts récurrents futurs doivent être prises en compte lorsque des niveaux de financement sont recommandés pour les subventions.

Recommandation stratégique :

Gérer avec prudence l’enveloppe du CRSNG en physique subatomique afin de permettre l’élaboration de nouveaux projets.

La physique subatomique a eu un succès extraordinaire dans le cadre du programme de la FCI, ce qui témoigne de l’excellence de cette communauté au Canada. Les subventions pour frais de fonctionnement offertes par l’intermédiaire de l’enveloppe du CRSNG en physique subatomique n’ont pas suivi la cadence et elles limitent maintenant la capacité de la communauté canadienne de préserver sa stature internationale en physique subatomique. Pour permettre au Canada de bonifier et d’accroître efficacement la formation du personnel hautement qualifié et de participer de manière efficiente aux programmes actuels et futurs décrits dans le présent rapport, l’enveloppe devra être augmentée de 3 millions de dollars immédiatement, et d’une somme additionnelle de 4 millions de dollars au cours des cinq prochaines années.

Recommandation stratégique :

Accroître l’enveloppe du CRSNG en physique subatomique d’une somme de 7 millions de dollars au cours des cinq prochaines années.

2. Les grandes questions en physique subatomique

Les diagrammes de Feynman servent à exprimer les forces entre les particules subatomiques.

© Paul Joseph et TRIUMF

Les diagrammes de Feynman servent à représenter les forces entre les particules subatomiques.

Au cours des dernières décennies, nous avons assisté à une série de découvertes passionnantes en physique subatomique. Le Grand collisionneur de hadrons (LHC), le plus grand et le plus puissant accélérateur de particules au monde, a commencé à fonctionner en 2009 au CERN (Organisation européenne pour la recherche nucléaire) à Genève, en Suisse. Le fait saillant de la première prise de données du LHC a été la découverte de la particule de Higgs en 2012. C’était la première nouvelle particule élémentaire découverte depuis le quark top en 1995. Cette particule est la dernière pièce manquante du modèle standard de la physique des particules, modèle qui décrit comment les particules subatomiques interagissent par l’intermédiaire des forces électromagnétiques, fortes et faibles. Il est également possible que la particule de Higgs soit le précurseur d’une théorie encore plus fondamentale de la nature. Le Prix Nobel de physique 2013 a été accordé à François Englert (Belgique) et Peter Higgs (Royaume-Uni), les théoriciens dont les travaux au cours des années 1960 ont été cruciaux pour comprendre le mécanisme de Higgs dont découle la masse des particules élémentaires.

La découverte de la particule de Higgs au LHC est une réalisation qui couronne de nombreuses années de recherche en physique subatomique partout dans le monde. La démonstration réussie de l’existence de la particule de Higgs est un triomphe de la méthode scientifique, laquelle combine la déduction théorique abstraite et l’expérimentation, sans cesse plus complexe. Au cours des prochaines années, des expériences qui seront réalisées au LHC et à de futurs collisionneurs mesureront avec précision les propriétés de la particule de Higgs. On ne peut trop insister sur l’importance de ces mesures. Bien qu’il existe de nombreuses raisons de croire que le modèle standard n’est qu’une description utile, valide à des énergies suffisamment basses, il n’existe pour le moment aucune indication expérimentale de l’échelle des énergies au-dessus desquelles le modèle deviendrait inopérant. La mesure précise des propriétés de la particule de Higgs aidera à déterminer l’échelle à laquelle se manifeste la nouvelle physique au-delà du modèle standard.

Des progrès spectaculaires ont également été réalisés dans la compréhension de la nature d’une composante fondamentale du modèle standard, à savoir les neutrinos. Au tournant du millénaire, des expériences réalisées à l’Observatoire de neutrinos de Sudbury (SNO) au Canada et au Super‑Kamiokande (Super‑K) au Japon ont démontré de manière probante que les différents types de neutrinos peuvent se métamorphoser d'un type à l'autre. L'existence de ce phénomène, appellé l'oscillations des neutrinos, implique que les neutrinos ont une masse. Le Prix Nobel de physique 2015 a été octroyé à Arthur McDonald (Canada) et à Takaaki Kajita (Japon) pour la découverte de ces oscillations et de la masse des neutrinos.

La découverte que les neutrinos ont une masse solutionne de nombreux problèmes qui ont accaparé les physiciens pendant des décennies. Par ailleurs, de nombreuses propriétés importantes des neutrinos demeurent encore incomprises. Comme le modèle standard ne peut entièrement expliquer la masse des neutrinos, l’existence de cette masse constitue une autre preuve que le modèle standard est loin d’être une théorie finale. Dans les expériences actuelles et futures, la mesure des nombreux nouveaux paramètres introduits par l’existence d’une masse non nulle des neutrinos contribuera à aller au-delà du modèle standard.

Ces deux découvertes récentes illustrent comment les expériences amènent des réponses à des questions importantes en physique subatomique et, en même temps, soulèvent d’autres questions, encore plus profondes. La recherche visant à répondre aux grandes questions en physique subatomique est une entreprise d’envergure mondiale, à laquelle participe une communauté internationale de chercheurs qui réalisent des expériences et développent des modèles théoriques, en étroite interaction. Les travaux expérimentaux sont souvent réalisés par de grandes équipes internationales qui travaillent dans des installations complexes comportant des accélérateurs de particules et des détecteurs sophistiqués, parfois installés à des kilomètres sous la surface du sol afin de minimiser le bruit de fond dû aux rayons cosmiques et aux autres sources de rayonnement. Les percées théoriques sont parfois le fruit d’une idée brillante d’une seule personne, mais parfois elles nécessitent des calculs massifs à l’aide des ordinateurs et grappes d’ordinateurs les plus avancés au monde.

Dans les sections suivantes, nous décrivons les grandes questions qui demeurent encore sans réponse et comment les chercheurs du monde entier tentent d’y répondre. Ces sections décrivent également les activités réalisées par les chercheurs canadiens dans les universités partout au Canada, ainsi qu’au laboratoire TRIUMF à Vancouver, à SNOLAB à Sudbury et à l’Institut Périmètre à Waterloo. Ces grandes questions sont en quelque sorte des panneaux indicateurs pointant vers les différentes avenues de recherche suivies par les chercheurs afin de mieux comprendre l’univers aux très petites dimensions.

1Quelle est la nature de la physique à l’échelle électrofaible et inférieure?

La particule de Higgs représente un type de matière que nous n’avons jamais vu auparavant. Ses propriétés semblent mystérieuses. Par exemple, sa masse n’est pas contrainte par aucune des symétries qui sont présentes dans le modèle standard. Selon les théories proposées par la physique au-delà du modèle standard qui expliquent ces propriétés, les particules de Higgs légères sont accompagnées par un secteur de Higgs élargi ou d’autres nouvelles particules près de l’échelle des téraélectronvolts (TeV) et au-delà. De nombreuses questions sont sans réponse. Existe‑t‑il une seule particule de Higgs ou y en a‑t‑il plusieurs? Quel est son mécanisme de couplage avec les autres particules? La particule de Higgs est‑elle une particule élémentaire ou composite? Y a‑t‑il des sources additionnelles d’asymétrie matière-antimatière à l’échelle électrofaible? La particule de Higgs est-elle une voie menant aux particules sombres cachées de l’univers?

Les physiciens tenteront de répondre à ces questions pendant la deuxième prise de données du LHC et après les travaux qui feront passer le LHC à la phase dite de haute luminosité (HL-LHC). Des projets de futur collisionneur linéaire e+e-, comme le projet ILC au Japon et CLIC en Europe, permettraient de mesurer les propriétés de la particule Higgs déjà observée avec encore plus de précision, et peut-être de détecter des écarts dus à la nouvelle physique. Ces résultats auront des retombées sur notre vision actuelle de la théorie fondamentale et offriront des réponses aux grandes questions : quels sont les principes sous-jacents qui déterminent les propriétés de la particule de Higgs? L’échelle électrofaible est-elle naturelle?

Des expériences de précision réalisées à plus basse énergie sont un autre moyen de sonder la nouvelle physique à l’échelle électrofaible, ou au-delà. En mesurant les processus électrofaibles avec une grande précision, ou encore les processus interdits selon le modèle standard, on peut déceler les effets minimes dus à la nouvelle physique. Mentionnons quelques exemples : l’analyse très précise des désintégrations bêta, la diffusion électrons-neutrinos qui viole la parité, la violation de la parité atomique, et la désintégration rare des kaons et des hadrons contenant le quark bottom. Tous ces programmes expérimentaux s’appuient sur une compréhension précise du modèle standard, qui est le modèle de référence auquel les résultats des expériences peuvent être comparés, et tout écart important par rapport à celui-ci signalerait l’existence d’une nouvelle physique. À cette fin, il est essentiel d’une part de réaliser des expériences de grande précision, et d’autre part de prévoir avec encore plus de précision, par les calculs théoriques, les prévisions du modèle standard. Ainsi, ces expériences, menées de concert avec les calculs théoriques, peuvent sonder les échelles d’énergie de l’ordre de plusieurs TeV. La nécessité d’avoir des résultats précis signifie souvent que les expériences doivent être réalisées sur de longues périodes et avec des faisceaux de particules très intenses.

Plusieurs expériences visent à déterminer les sources de la violation de la conjugaison de charge et de parité (violation de la symétrie CP) due à la physique au-delà du modèle standard, résultats qui sont requis pour expliquer la prédominance de la matière par rapport à l’antimatière dans l’univers. Une stratégie en ce sens consiste à étudier avec soin la violation de la symétrie CP et à rechercher des écarts par rapport au modèle standard dans le secteur des kaons et des mésons B. Une autre approche consiste à rechercher des moments dipolaires électriques dans un certain nombre de systèmes, allant des neutrons aux atomes et aux molécules. Enfin, une autre façon serait de rechercher des signes de violation de la symétrie CP dans les oscillations des neutrinos grâce à des expériences à grande distance.

D’autres expériences cherchent à tester la symétrie combinée de la conjugaison de charge, de la parité et de l’inversion du temps (CPT), qui, selon les physiciens, est une symétrie exacte de la nature. Un écart par rapport à cette symétrie signalerait une faille dans la théorie quantique des champs, et probablement une violation de la symétrie de Lorentz. Les expériences de comparaison d’horloge et les expériences de spectroscopie de l’antihydrogène visent à sonder les violations des symétries CPT et de Lorentz.

Rôle des physiciens canadiens
Le Canada joue un rôle prépondérant dans l’expérience ATLAS, l’une des deux grandes expériences générales au LHC du CERN. L’expérience ATLAS vise à sonder le mécanisme de la brisure de la symétrie électrofaible et à rechercher des signes de la nouvelle physique à l’échelle des TeV. L’expérience ATLAS s’appuie sur quelque 3 000 physiciens (dont 1 000 étudiants) issus de plus de 177 universités et laboratoires dans 38 pays. L’équipe ATLAS-Canada, dont les membres proviennent de plusieurs établissements, a été créée en 1992 et compte maintenant quelque 130 professeurs d’université, stagiaires postdoctoraux et étudiants des cycles supérieurs, et elle a joué un rôle central dans la découverte du boson de Higgs en 2012 et dans la première phase d’étude de ses propriétés. Des Canadiens ont joué un rôle de premier plan bien reconnu dans l’expérience ATLAS : le porte-parole adjoint actuel est un Canadien, et des Canadiens ont agi à titre de président du comité des publications, de président du comité de collaboration ATLAS et dans plusieurs autres rôles de coordination des divers groupes en physique. L’équipe ATLAS-Canada joue également un rôle crucial dans l’amélioration de l’instrumentation en vue des futures phases d’exploitation du LHC, y compris la construction de nouveaux éléments du détecteur de muons pour la prise de données 3 du LCH qui débutera en 2021, et les travaux de R et D pour les nouvelles chambres de détection des particules pour la phase HL-LHC, qui débutera en 2026.

Les théoriciens canadiens ont été très actifs en proposant des méthodes d’expérimentation au LHC qui permettraient de déterminer si les propriétés du boson de Higgs, nouvellement découvert, correspondent à ce qui est prévu par le modèle standard. Les théoriciens étudient également des idées comme la supersymétrie, les dimensions additionnelles et les modèles de Higgs composites, un ou plusieurs de ces aspects pouvant être découverts au cours des prochaines phases d’exploitation du LHC. Les théoriciens canadiens participent également à des collaborations internationales qui s’intéressent à des questions hautement prioritaires comme le moment magnétique anormal du muon, car la théorie et l’expérience donnent des résultats qui diffèrent de trois à quatre écarts-types. Afin d’établir des comparaisons avec une prochaine expérience qui sera réalisée à Fermilab, les théoriciens canadiens ont travaillé avec la collaboration en chromodynamique quantique sur réseau RBC-UKQCD (basée aux États-Unis et au Royaume-Uni) afin d’établir des prévisions théoriques définitives.

L’expérience ALPHA est un petit projet international réalisé au CERN, pour laquelle le Canada assume un leadership important, et qui vise à tester la symétrie CPT par spectroscopie de l’antihydrogène, et à déceler les différences possibles dans l’interaction gravitationnelle de la matière et de l’antimatière. Les membres de l’équipe ALPHA, qui proviennent de plusieurs établissements, ont déjà apporté une contribution importante aux articles qui ont marqué les succès récents d’ALPHA. Les travaux de l’équipe ALPHA-Canada ont été récompensés par l’obtention du Prix John-C.-Polanyi du CRSNG en 2013 pour des percées remarquables en science et en génie, soulignant les contributions de l’équipe canadienne à l’instrumentation d’ALPHA, à la démonstration réussie du piégeage de l’antihydrogène et à son piégeage subséquent pendant 1 000 secondes, et pour les premières mesures en spectroscopie de l’antihydrogène. Dans la nouvelle expérience appelée Alpha-g qui cherchera à mesurer l’interaction gravitationnelle entre l’antimatière et la Terre, le soutien financier et le leadership scientifique proviennent en majeure partie du Canada.

L’expérience Belle II, qui se déroule au Japon, est à la frontière des mesures de précision en physique des saveurs, avec un accent particulier sur l’étude du quark bottom qui permettrait de découvrir des signes de la physique au-delà du modèle standard. Cette expérience se déroule grâce à plus de 600 collaborateurs provenant de 23 pays, dont 360 physiciens détenant un doctorat et 160 étudiants des cycles supérieurs. L’équipe canadienne représente 3 % de ces physiciens et 6 % de ces étudiants. C’est un Canadien qui dirige le comité international de Belle II, et l’équipe canadienne est responsable de l’étalonnage du calorimètre, de la simulation GEANT et de la surveillance du rayonnement de fond autour du faisceau. Grâce aux travaux de développement réalisés par des Canadiens pour le calcul en nuage pour Belle II, l’équipe canadienne sera bien placée pour diriger les efforts d’analyse des données qui seront recueillies à partir de 2017.

L’expérience NA62 réalisée au CERN vise à étudier la désintégration des kaons chargés en vol, ce qui pourrait ouvrir une fenêtre vers la physique au-delà du modèle standard. Le groupe canadien joue un rôle important dans l’analyse des données NA62 grâce à son expertise unique acquise lors d’expériences précédentes à TRIUMF et au Brookhaven National Laboratory (BNL).

Des études de la violation de l’inversion du temps et de la symétrie CP sont en cours à TRIUMF, dans le cadre de quatre programmes de recherche complémentaires, à savoir la mesure du moment électrique dipolaire du neutron (nEDM), les études du moment électrique dipolaire du radon et du francium (RnEDM et FrEDM), et le programme d’étude de la désintégration radiative de 38mK. Le programme nEDM est sur le point de réaliser la mesure la plus précise au monde du moment électrique dipolaire du neutron. Il s’agit d’une collaboration Canada-Japon qui a débuté en 2009, dans laquelle les Canadiens ont un rôle de premier plan pour tous les principaux sous-systèmes de la source UCN et de l’expérience nEDM également. Par exemple, la construction de la ligne du faisceau de protons, terminée en 2016, a été entièrement réalisée par le groupe canadien. Le programme RnEDM profitera également d’une amélioration que l’on prévoit spectaculaire de la valeur de l’EDM (jusqu’à 1 000 fois) en raison de la déformation octupolaire, et la première étape consiste à mesurer la structure nucléaire de plusieurs isotopes du radon au cours des cinq prochaines années. Le programme FrEDM s’appuie sur la facilité relative de capture et de refroidissement du francium, et du fort moment électrique dipolaire intrinsèque de ses électrons. Le programme d’étude de la désintégration radiative de 38mK à l’installation TRINAT dépassera les limites actuelles pour ce qui est de la violation de l’inversion du temps à l’échelle des MeV. Sa sensibilité est d’environ deux ordres de grandeur de plus que celle de la désintégration du neutron.

L’expérience MOLLER à JLab aux États-Unis est sensible à la physique au-delà du modèle standard à l’échelle des TeV. Elle donnera accès à un espace de découverte qui ne sera atteignable qu’avec l’avènement d’un nouveau collisionneur de leptons ou d’une usine de neutrinos, en permettant de mesurer par diffusion électrons-électrons avec violation de la parité la charge faible de l’électron, ainsi que l’angle de mélange faible. Le groupe canadien a dirigé la publication récente de résultats exceptionnels obtenus avec le polarimètre Compton. Les Canadiens sont également des gestionnaires de niveau 2 pour le Département américain de l’Énergie pour le développement du spectromètre, et ils dirigent l’intégration des composants du détecteur. L’expérience MOLLER s’appuie sur les succès récents de l’expérience Qweak à JLab, dans laquelle les Canadiens ont joué un rôle important en déterminant la charge faible du proton. L’analyse détaillée de l’ensemble complet des données de Qweak est sur le point d’aboutir.

La collaboration FrPNC dirigée par le Canada a construit une installation de piégeage du francium au laboratoire ISACTRIUMF). La violation de la parité atomique est sensible à la nouvelle physique, notamment les bosons de jauge surnuméraires ou les leptoquarks, et l’effet est accentué dans le francium (18 fois plus que dans le césium). De plus, ce programme de recherche profitera de la capacité d’ARIEL de fournir simultanément plusieurs faisceaux.

Plusieurs groupes de recherche canadiens ont fait d’importantes contributions à la détermination des courants faibles et à la mesure la plus précise de la valeur du paramètre de mélange des quarks Vud dans le modèle standard. Le spectromètre 8π ainsi que les installations GRIFFIN, TITAN et GPS à TRIUMF ont récemment mesuré avec une grande précision plusieurs désintégrations bêta super-permises qui contraignent davantage les courants scalaires faibles et offrent de nouveaux critères de référence pour tester la brisure de symétrie de l’isospin dans les noyaux. De plus, le nouveau spectromètre GRIFFIN est sur le point de révolutionner les mesures pour A ≥ 62. Le piège TRINATTRIUMF) a réalisé la meilleure mesure de la corrélation bêta-neutrino dans la désintégration bêta de 38mK, pour sonder le couplage des interactions scalaires avec les neutrinos présentant la mauvaise hélicité. Le piège de Penning canadien est un dispositif de piégeage utilisé à l’Argonne National Laboratory (ANL) aux États-Unis pour étudier les corrélations bêta-neutrino dans 8Li et 8Be. Les premiers résultats ont été publiés et des améliorations sont en cours.

2 Quelle est la nature de la masse des neutrinos?

L’existence de la masse des neutrinos est maintenant un fait établi, mais de nombreuses questions au sujet de sa nature demeurent encore sans réponse : la masse des neutrinos est-elle de type Dirac, Majorana, ou un mélange des deux? Quelle est la hiérarchie des masses pour les neutrinos? Le secteur des neutrinos est-il sujet à une violation de la symétrie CP ? Est‑elle reliée à l’asymétrie matière-antimatière? Y a‑t‑il d’autres types de neutrinos qui n’ont pas encore été observés?

La possibilité que la masse des neutrinos soit de type Majorana est sondée par des expériences qui tentent de mettre en évidence la désintégration double-bêta sans émission de neutrinos qui, si elle est observée, indiqueraient que les neutrinos sont leurs propres antiparticules. Les oscillations des neutrinos seront étudiées à l’aide de neutrinos produits par des réacteurs, des accélérateurs et également par les rayons cosmiques. Ces études permettront de mieux comprendre la hiérarchie des masses, le mélange des saveurs et la violation de la symétrie CP dans le secteur des neutrinos. Les résultats de ces expériences auront un impact sur la compréhension actuelle de l’origine de l’asymétrie matière-antimatière, ainsi que sur le rôle des neutrinos dans l’évolution de l’univers. On pourra ainsi commencer à esquisser une image cohérente de la façon dont les propriétés des neutrinos s’insèrent dans la quête d’une théorie fondamentale.

Rôle des physiciens canadiens
L’équipe de chercheurs canadiens qui participe à la collaboration EXO, laquelle tente de découvrir la désintégration double-bêta sans émission de neutrinos à l’installation WIPP au Nouveau-Mexique, y a contribué de plusieurs façons : systèmes d’étalonnage, contrôle du radon, conception des systèmes de procédés, construction mécanique du système de veto et sélection des matériaux par des analyses d’ultratraces. Ils ont participé activement à la prise de données et à leur analyse. De plus, le premier coordonnateur de l’analyse, un des coordonnateurs actuels des phases d’exploitation et l’actuel président du comité directeur de collaboration sont des chercheurs canadiens. L’équipe canadienne dirige à la fois le développement du programme de marquage par le baryum, qui pourrait constituer un test exceptionnellement propre et sensible de la désintégration sans neutrino dans le prochain projet nEXO proposé pour SNOLAB, ainsi que le développement de photomultiplicateurs en silicium répondant à des exigences uniques en matière de longueur d’onde, de propriétés cryogéniques et de faible radioactivité.

L’expérience SNO+ dirigée par des Canadiens à SNOLAB sera également à la recherche de la désintégration double-bêta sans émission de neutrinos et en outre elle étudiera les neutrinos de basse énergie produits dans le Soleil par les cycles pep et CNO. Au sein de SNO+, les groupes canadiens ont de grandes responsabilités pour ce qui est des composants du détecteur, notamment le matériel d’étalonnage, les sources d’étalonnage, le gaz de recouvrement, le filet de soutien, les systèmes d’alimentation en eau, les systèmes de scintillateurs et la purification et le chargement des isotopes. Les expériences SNO+ et EXO sont complémentaires, car toutes deux utilisent des technologies et des isotopes différents.

Au sein de l’expérience IceCube réalisée près du pôle Sud, le programme canadien a commencé en 2010 et a permis aux Canadiens d’acquérir une expertise particulière dans l’étude des neutrinos à des énergies atteignant l’échelle des PeV et ils ont joué un rôle central dans maints aspects des analyses scientifiques au sein de cette collaboration internationale. Les groupes canadiens ont fourni les ressources informatiques qui ont permis la découverte d’un flux de neutrinos de haute énergie d’origine astrophysique, résultat qui a fait la page couverture du magazine Science en novembre 2013. Un membre de l’équipe canadienne a obtenu le Prix du jeune scientifique en astrophysique des particules de l’IUPAP en 2015, et un autre membre a été nommé scientifique principal de la collaboration responsable des futures améliorations en reconnaissance de son rôle majeur dans le développement du futur projet d’extension aux basses énergies appelé PINGU.

Le Canada est un membre fondateur de la collaboration T2K au Japon, qui est à l’avant-scène du programme mondial d’étude des oscillations de neutrinos. Le concept clé de cette expérience, consistant à utiliser un faisceau de neutrinos hors axe, a été initialement proposé par un scientifique canadien, et sa mise en œuvre dans T2K a été dirigée par un Canadien également. Le groupe était responsable de la conception et de la construction d’un moniteur de faisceau de rayonnement de transition optique qui joue un rôle crucial dans l’exploitation de la ligne de faisceau de neutrinos, ainsi que des détecteurs à scintillation et des chambres de projection temporelle qui forment le cœur du détecteur proche dans T2K. Le groupe canadien fournit également un stockage de niveau 1 pour les données de T2K, à TRIUMF, et environ la moitié des ressources en calcul de la collaboration. Les membres canadiens de l’expérience T2K siègent au conseil de direction de la collaboration, et on les retrouve également à des postes clés, notamment les postes de coordonnateur des phases d’exploitation, de coordonnateur des analyses et de président du comité des publications.

3 Quelle est la nature de la matière sombre dans l’univers?

Selon diverses observations cosmologiques, l’univers est composé d’une quantité importante (27 %) de matière sombre invisible, tandis que la matière visible ne constitue que 5 % de son contenu en énergie (le reste étant constitué par la soi-disant énergie noire). Plusieurs explications théoriques ont été proposées pour expliquer ce constat : des défauts dans la topologie des champs quantiques primordiaux, des effets gravitationnels se répercutant sur des dimensions multiples ou encore des correctifs nécessaires à la dynamique gravitationnelle. Les physiciens ont consacré beaucoup d’efforts à l’élaboration de théories au-delà du modèle standard, lesquelles prévoient des particules qui pourraient composer la matière sombre. Par exemple, on a proposé que la matière sombre pourrait consister en des particules massives interagissant faiblement (appelées WIMP), dont le flux tombant sur la surface terrestre atteindrait des millions voire des milliards de particules par seconde par centimètre carré, pour ensuite traverser le globe. Au cours de la dernière décennie, on a découvert qu’il pourrait exister des secteurs « cachés » ou « sombres » plus légèrement couplés. Ceux-ci seraient accessibles par des expériences avec des accélérateurs, ou encore par détection directe. Enfin, la matière sombre pourrait également consister en axions, ou encore exister sous forme de nouvelles espèces de neutrinos « stériles ».

La physique subatomique peut tenter de répondre à de nombreuses questions au sujet de la matière sombre. Est-elle composée de particules qui sont directement ou indirectement observables? Quelles sont les interactions qui déterminent l’abondance de la matière sombre dans l’univers? Y a‑t‑il un seul type de particules composant la matière sombre, ou y en a‑t‑il plusieurs? Les particules de la matière sombre interagissent-elles de façon importante avec les particules prévues par le modèle standard, ce qui produirait des effets observables? Quelle est l’intensité de l’interaction des particules de matière sombre entre elles?

Les recherches de la matière sombre sont basées sur la détection directe et indirecte des particules de matière sombre d’origine cosmique résultant du Big Bang, et sur la détection des particules de matière sombre produites dans les collisionneurs. La détection directe consiste à observer la diffusion de particules de matière sombre par des noyaux atomiques dans un détecteur. Afin d’éviter tout rayonnement de diffusion de fond produit par des sources connues, comme les rayons cosmiques, les détecteurs sont placés dans des laboratoires souterrains profonds, comme SNOLAB. La détection indirecte consiste à observer les produits de l’annihilation des particules de matière sombre d’origine cosmique qui se produit partout ailleurs dans l’univers. Enfin, les collisionneurs à haute énergie pourraient produire des particules de matière sombre qui s’échappent sans être détectées, ce qui causerait cependant un excès d’événements pour lesquels il y aurait un excès de la quantité de mouvement totale. La matière sombre légèrement couplée et celle qui est présente dans les secteurs cachés pourraient être détectées dans les collisionneurs à basse énergie, par leur effet sur le taux de désintégration des particules.

Rôle des physiciens canadiens
Le Canada participe à plusieurs expériences de recherche directe de la matière sombre, notamment l’expérience DEAP qui est optimisée pour la recherche des WIMP lourds, l’expérience PICO qui est optimisée pour les interactions dépendantes du spin, l’expérience SuperCDMS qui est optimisée pour la recherche de WIMP légers, et l’expérience VERITAS qui recherche des signes d’annihilation de la matière sombre à l’intérieur de la Voie lactée et au-delà.

La collaboration DEAP est dirigée par des chercheurs canadiens, avec la participation de chercheurs britanniques et mexicains. Le détecteur DEAP‑3600 est actuellement mis en service à SNOLAB. Les scientifiques provenant des établissements canadiens participants dirigent les groupes responsables du traitement des signaux au bas niveau, de l’étalonnage, de la discrimination des formes d’impulsion, de la reconstruction des événements, les groupes de rayonnement de fond, de la sélection des données, de la qualité des données, du temps de vie, ainsi que de la gestion des logiciels et du traitement des données.

Six pays participent à la collaboration PICO, et les Canadiens représentent plus de 40 % des chercheurs. L’échelle modeste de l’expérience PICO, qui se déroule à SNOLAB, permet aux étudiants et aux stagiaires postdoctoraux canadiens de participer à fond à tous les aspects de l’expérience, y compris la conception, la construction, la mise en service, l’exploitation et l’analyse des données.

Les contributions canadiennes à l’expérience SuperCDMS portent sur deux aspects clés. Le premier est le développement d’un système d’acquisition des données à SNOLAB, et sa mise en place pour l’expérience et les différentes installations d’essai du détecteur. Le deuxième consiste à tester et à caractériser les détecteurs et autres composants cryogéniques. En 2014, un titulaire d’une chaire d’excellence en recherche du Canada s’est joint aux membres de l’expérience SuperCDMS, et les fonds de recherche associés à ce poste prestigieux sont actuellement utilisés pour une nouvelle installation d’essai qui sera située sous terre à SNOLAB.

Le Canada continue de jouer un rôle central dans l’observatoire VERITAS, un instrument de détection des rayons gamma au sol exploité à l’observatoire Whipple en Arizona, aux États-Unis. En plus de contribuer à la direction de l’analyse des données de physique, le groupe canadien a également fourni les composants ayant permis de construire les télescopes et a développé de nombreux dispositifs permettant d’assurer des étalonnages précis.

L’expérience ATLAS au CERN est à la recherche de preuves de la production directe de matière sombre par les interactions entre les particules décrites par le modèle standard. L’expérience Belle II au Japon sera également sensible à la production directe de nouvelles particules légères, appelées photons sombres ayant une masse non nulle, grâce à des mesures précises aux basses énergies.

Les théoriciens canadiens des particules ont déployé beaucoup d’efforts pour comprendre la matière sombre, tant en établissant des modèles de matière sombre qu’en prédisant les signaux que cette matière pourrait produire dans différents types d’expériences. Dans divers modèles, la matière sombre fait partie d’un secteur contenant des états très légers (la matière sombre elle-même et quelques particules médiatrices) qui se couplent très faiblement au modèle standard. De façon générale, de telles particules très légères seraient difficiles à détecter dans les collisionneurs, de sorte que d’autres techniques expérimentales conviendraient mieux. Les théoriciens explorent également activement les mécanismes par lesquels ces nouveaux états légers pourraient être détectés dans les expériences avec neutrinos, dans des usines à mésons et dans des expériences de décharge de faisceau ou sur cibles fixes.

4 Quelles sont les structures sous-jacentes aux forces et à la matière dans l’univers?

L’évolution de la physique des particules au cours des 50 dernières années en a été une d’unification croissante des forces et des symétries. Le modèle standard décrit l’unification des interactions faibles et électromagnétiques, corroborée par toutes les observations, mais il présente encore de nombreuses structures qui demandent à être expliquées. Par exemple, les fermions ont des masses différentes et consistent en deux secteurs, chacun avec trois familles de particules qui se mélangent entre elles. Dans le secteur des quarks, il y a une hiérarchie des masses et les angles de mélange sont habituellement faibles. Par contre, dans le secteur des neutrinos, certains des angles de mélange sont importants et la hiérarchie des masses est inconnue. Déjà, dans les années 1930, à la suite de la découverte du muon, Rabi avait demandé : « Qui a commandé ça? », et la question est sans réponse depuis. Une idée des plus intéressantes, souvent reprise dans les efforts visant à expliquer ces caractéristiques intrigantes, est qu’aux énergies élevées les interactions électrofaibles s’unissent avec les interactions fortes pour former une « grande théorie unifiée ». Les physiciens déploient actuellement des efforts théoriques considérables pour étudier les nouveaux modèles et mécanismes – dont certains empruntent des idées récentes de la théorie des cordes – qui tentent d’expliquer la hiérarchie des masses et les angles de mélange, et pour concevoir des mesures expérimentales permettant de les détecter.

De nombreux théoriciens croient qu’une meilleure compréhension de la théorie quantique des champs pourrait, à terme, être utile pour résoudre bon nombre d’énigmes en physique des particules, notamment la hiérarchie des masses. Les modèles actuels en physique subatomique sont spécifiés par le Lagrangien de la théorie quantique des champs. Lorsque les couplages sont faibles, on peut effectuer des calculs en utilisant la théorie des perturbations sous forme d’expansion en puissances du couplage faible, mais cette approche ne s’applique pas aux interactions fortes dans le modèle standard. En l’absence d’un paramètre faible, des questions importantes se posent : comment les théories quantiques des champs se comportent-elles en dehors de l’approche perturbative? Existe-t-il des propriétés générales et des contraintes quant à leur comportement non perturbatif? Ces questions sont étudiées de diverses façons, par exemple en utilisant des outils analytiques empruntés à la théorie des cordes et à la supersymétrie, ou encore par l’intermédiaire de diverses dualités. Lorsque les calculs analytiques ne sont pas possibles, les intégrales de chemin peuvent parfois être calculées par des méthodes numériques grâce à la théorie des champs sur réseau, ce qui nécessite d’importantes ressources informatiques et des collaborations internationales. Les travaux théoriques continuent à élargir la théorie des champs sur réseau afin d’incorporer les fermions dans les représentations chirales (comme c’est le cas du modèle standard), ainsi que les théories supersymétriques.

Pour combler une lacune importante dans la quête d’une description fondamentale de la nature, il faudra répondre à la question suivante : peut-on réconcilier la mécanique quantique et la gravité? Il a été difficile de formuler une théorie cohérente de la gravité quantique. La théorie des cordes, grâce aux efforts de nombreux théoriciens, s’est établie comme la théorie de la gravité quantique la mieux développée. Bien qu’il ne semble pas y avoir de tests expérimentaux directs de cette théorie en ce moment, sa cohérence mathématique a couvert de nombreuses avenues tant dans la compréhension de la nature de la théorie des cordes que dans les questions non perturbatives difficiles en théorie quantique des champs. Un sujet qui est au cœur même de l’unification de la mécanique quantique et de la gravité est la physique des trous noirs. Un des grands succès de la théorie des cordes depuis les années 1990 a été le calcul de l’entropie des trous noirs en termes de micro-états de cordes. Plus récemment, on a approfondi notre compréhension des trous noirs, en particulier le paradoxe de l’information préservée par les trous noirs, grâce à l’utilisation de dualités jauge-gravité. Connues collectivement par l’expression correspondance AdS/CFT, ces dualités, découvertes à la fin des années 1990, sont des équivalences théoriques entre certaines théories des cordes à couplage faible sur un espace anti-de Sitter (AdS) et des théories conformes des champs à couplage fort (CFT) dans un nombre moindre de dimensions. La correspondance AdS/CFT est la réalisation la plus importante en théorie des cordes au cours des 20 dernières années. Outre la physique des trous noirs, la correspondance AdS/CFT est utilisée pour les études en hydrodynamique et permet de mieux comprendre certains aspects de la théorie des interactions fortes (chromodynamique quantique, ou QCD), particulièrement pour ce qui est des propriétés du plasma quark-gluon et des collisions d’ions lourds relativistes.

De nombreux éléments et idées de la théorie des cordes ont également été utilisés pour construire des modèles à l’échelle des TeV de la physique au-delà du modèle standard, présentant de nouvelles propriétés. Par exemple, on a fait valoir que des dimensions supplémentaires permettraient de comprendre les problèmes de hiérarchie et de saveur, tandis que la dualité jauge-gravité a offert de nouveaux outils qualitatifs pour étudier les modèles de Higgs composites. La théorie des cordes contient également de nombreux champs qui, pense‑t‑on, sont plus légers à l’échelle des cordes, comme les axions et les moduli. L’existence de ces champs peut avoir des conséquences en cosmologie, et on pourrait même tenter de détecter des axions des cordes à l’aide d’expériences de petite envergure.

Rôle des physiciens canadiens
Au Canada, un large éventail de théoriciens cherche à comprendre plus profondément tous les aspects de la physique subatomique. Certains de ces théoriciens suivent de près les observations expérimentales et réalisent des calculs précis d’une grande importance pour les expériences qui tentent de déceler de minimes écarts par rapport au modèle standard. D’autres se penchent plutôt sur la recherche d’une nouvelle physique au LHC, étudiant les modèles et leurs signatures, et travaillant en étroite collaboration avec les expérimentateurs.

Un certain nombre de théoriciens de premier plan qui se sont attachés à de nombreux aspects de la théorie des cordes sont basés à l’Institut Périmètre et dans de nombreuses universités canadiennes. La correspondance AdS/CFT demeure un sujet de recherche très actif, et l’on étudie ses aspects appliqués tout en tentant de mieux comprendre la physique sous-jacente à la dualité jauge-gravité. Par ailleurs, les théoriciens canadiens et leurs collaborateurs internationaux sont à la fine pointe dans certains domaines, notamment dans l’étude de la théorie de Yang-Mills maximalement supersymétrique dans quatre dimensions, duale à la théorie des cordes dans l’espace AdS à cinq dimensions, ce qui promet de jeter un nouvel éclairage sur la nature de la gravité quantique et de la théorie quantique des champs.

Les théoriciens canadiens en physique subatomique se sont mérité de nombreux prix, dont plusieurs prix New Horizons de la Fundamental Physics Prize Foundation, la médaille Gribov de la Société européenne de physique, le prix Steacie, la Médaille Herzberg, les prix Killam (décernés aux établissements), des chaires de recherche du Canada, des nominations à la Société royale du Canada, ainsi qu’à l’American Physical Society.

La nature de la recherche théorique en physique subatomique accorde beaucoup de souplesse aux chercheurs, et il est courant de voir les théoriciens travailler autant sur les aspects formels de la théorie des champs et de la théorie des cordes, que sur des aspects d’ordre phénoménologique. Bien que plusieurs programmes expérimentaux canadiens offrent la possibilité d’obtenir les résultats cruciaux qui pointeront vers les prochaines étapes permettant de mieux comprendre les forces sous-jacentes et la matière dans l’univers, tout résultat est difficile à prévoir. Le soutien continu d’un large éventail d’activités théoriques en physique subatomique permettra au Canada d’être bien placé pour tirer profit des futures percées, tant expérimentales que théoriques.

5 Comment les quarks et les gluons créent-ils les propriétés hadroniques et les phases de la matière hadronique?

La nature composite des nucléons, constitués de quarks et de gluons, est connue depuis de nombreuses années. La physique des hautes énergies a donné quelques réponses partielles à diverses questions, notamment comment les quarks sont répartis dans le proton et comment ils s’y déplacent. D’ailleurs, le prix Nobel 2004 a été attribué pour la découverte de la liberté asymptotique dans le contexte de la QCD perturbative. Mais des questions subsistent encore pour la QCD dans le régime du confinement, là où l’intensité du couplage des quarks est trop grande pour permettre l’utilisation des méthodes perturbatives, et un problème central de la physique moderne demeure le lien entre les propriétés observées des hadrons et le cadre théorique sous-jacent qu’offre la QCD. La résolution de ces problèmes devra s’appuyer sur des avancées théoriques et expérimentales. Grâce aux récents progrès en QCD sur réseau, combinés à la théorie perturbative chirale, il est possible d’extrapoler jusqu’aux masses des quarks physiques, et ainsi permettre une comparaison directe avec les observables expérimentales. Des expériences sont en cours partout dans le monde pour obtenir une vue tomographique des quarks et de leur mouvement dans le nucléon, pour élucider le rôle des gluons et des auto-interactions gluoniques dans les nucléons et les noyaux, et pour comprendre en détail comment la QCD régit la transition des quarks et des gluons en pions et en nucléons.

Aux densités les plus élevées, tout en étant à des températures faibles, les quarks constituants des nucléons de la matière nucléaire peuvent former un nouvel état de la matière qui serait supraconducteur de la couleur. On peut également créer de la matière nucléaire exotique par la collision de noyaux à des énergies relativistes. Dans ce cas, les « températures nucléaires » peuvent atteindre des valeurs qui représentent un état de la matière (le plasma quark-gluon) comme il a existé aux premiers moments du Big Bang. C’est un champ d’études très actif dans les installations internationales, dont le collisionneur d’ions lourds relativistes (RHICRelativistic Heavy Ion Collider) au BNL aux États-Unis, ainsi qu’au LHC au CERN. Les théoriciens apportent également une contribution importante à la compréhension du diagramme de phase de la matière nucléaire. Leurs travaux ont une grande importance dans la quête visant à caractériser les propriétés du plasma quark-gluon et à la compréhension des phénomènes astrophysiques comme la structure des étoiles à neutrons et l’évolution de l’univers à ses débuts.

Rôle des physiciens canadiens
L’apport des chercheurs canadiens est prisé dans les laboratoires de physique nucléaire partout dans le monde, et leurs travaux fournissent des données essentielles au sujet des fondements de la physique nucléaire. Mentionnons à cet égard plusieurs études des facteurs de forme des hadrons dans les halls A et C du Jefferson Laboratory, plusieurs études de la polarisabilité des protons et des neutrons au Mainz Microtron, des travaux en physique des pions-nucléons à l’Oak Ridge National Laboratory et les expériences sur la photodésintégration à l’installation laser à électrons libres de l’Université Duke. Il est à prévoir que ces efforts évolueront naturellement en programmes de recherche dans le cadre d’expériences comme SoLID, ou éventuellement l’expérience EIC.

Le projet GlueX au Jefferson Laboratory cherche à produire des mésons hybrides exotiques et non exotiques par photoproduction et à les classifier. La participation canadienne à GlueX a commencé en 2000 et nos physiciens ont conçu et construit le calorimètre à baril, et réalisé des travaux de R et D pour les photocapteurs.

Les physiciens canadiens réalisent d’importants travaux théoriques pour calculer la masse des états liés et les éléments de la matrice de transition, selon une variété d’approches. Entre autres, les Canadiens emploient des modèles de potentiel et des techniques de la QCD sur réseau pour calculer ces quantités pour des états mettant en cause des quarks lourds. Récemment, la collaboration LHCb a annoncé la découverte de deux baryons et a fait référence aux travaux des chercheurs canadiens qui avaient précédemment prédit la masse de ces baryons par les méthodes de la QCD sur réseau.

Les théoriciens canadiens contribuent également à la compréhension du diagramme de phase de la matière nucléaire, et leurs travaux permettent de mieux comprendre la matière nucléaire exotique qui a existé pendant les premiers moments après le Big Bang. Une des réalisations du programme d’ions lourds relativistes au RHIC, qui a été confirmée au LHC avec la participation du groupe ATLAS-Canada, est le succès de la dynamique des fluides relativistes, défendue par des théoriciens canadiens.

Des théoriciens canadiens ont récemment réalisé les premiers calculs ab initio des corrections du décalage de Lamb pour la structure nucléaire de l’hélium muonique et du deutérium muonique, avec une précision de 6 % et de 1 %, respectivement. Ce sont là des résultats précieux qui permettront de comprendre pourquoi les mesures du rayon du proton, par la spectroscopie du décalage de Lamb pour l’hydrogène muonique, donnent une valeur qui diffère de 7σ par rapport à ce que l’on connaissait auparavant pour l’hydrogène ordinaire (électronique).

6 Comment la structure des noyaux émerge-t-elle des forces nucléaires?

Un objectif central de la physique nucléaire est d’expliquer les propriétés des noyaux et de la matière nucléaire. C’est là une tâche formidable, qu’il convient mieux d’approcher par étapes : à partir des équations de base de la QCD, puis par des théories de champs effectifs, aux interactions entre nucléons et aux systèmes à quelques corps, puis en utilisant les nombreuses approches pour décrire la structure nucléaire, allant des méthodes exactes, comme la méthode de Monte-Carlo avec fonctions de Green, au modèle des couches et à la théorie de la fonctionnelle de la densité. Même si les calculs basés sur l’interaction nucléon-nucléon ont obtenu des succès quantitatifs pour ce qui est de reproduire les caractéristiques des noyaux légers, on ne dispose pas encore d’une description détaillée des noyaux lourds. C’est un problème courant avec la description des autres systèmes complexes, comme les protéines. En physique nucléaire, le développement d’une théorie prédictive et exhaustive des noyaux complexes demeure un objectif clé.

Dans le monde entier, cet objectif semble à portée de main grâce à la mise au point récente de faisceaux radioactifs de haute qualité composés d’isotopes rares, qui permettent de passer d’une représentation unidimensionnelle dans laquelle la masse du noyau varie, à une représentation bidimensionnelle dans laquelle le nombre de masse du proton et du neutron varie sur une large plage. Grâce au parachèvement récent de l’infrastructure de détecteurs, dont le besoin se faisait très pressant, au laboratoire ISAC de TRIUMF, et à l’obtention des fonds requis pour terminer le laboratoire ARIEL, les Canadiens possèdent une possibilité unique d’être en tête des progrès appréciables dans ce domaine. D’autres travaux se déroulent dans des installations à l’étranger, comme le piège de Penning canadien au laboratoire ANL, et plusieurs contributions importantes à diverses expériences au GSI Helmholtz Center for Heavy Ion Research en Allemagne et au Jefferson Laboratory. Les observations réalisées à ce jour indiquent des comportements étonnamment anormaux dans ces isotopes rares, et l’étude des noyaux présentant un déséquilibre important de neutrons et de protons permettra de trouver les liens manquants dans notre compréhension actuelle. Ces phénomènes et ce comportement imprévus comprennent le rayon neutronique étendu des soi-disant noyaux halos de l’hélium et du lithium, et la stabilité additionnelle des couches des isotopes de calcium riches en neutrons, avec une masse de 54 ou un nombre de neutrons de 34. Les progrès théoriques récents sont fort prometteurs et permettront de mieux arrimer la théorie fondamentale des interactions fortes à la description quantitative des phénomènes nucléaires à N corps. Ces phénomènes comprennent des propriétés nouvelles et exotiques prévues et observées dans les noyaux radioactifs, et prévues dans les étoiles à neutrons.

Rôle des physiciens canadiens
L’apport des physiciens canadiens est précieux dans les études des interactions fortes fondamentales dans les noyaux, et nos chercheurs utilisent les dispositifs expérimentaux les plus perfectionnés à TRIUMF, y compris les détecteurs TITAN, IRIS, TIGRESS, GRIFFIN et DESCANT. Grâce aux capacités de ces expériences, combinées aux capacités de faisceaux secondaires uniques d’ISAC, qui produit les faisceaux radioactifs les plus intenses au monde pour de nombreux isotopes, y compris le noyau halo du 11Li, les chercheurs canadiens sont à l’avant-garde dans ce domaine. La synergie entre ces différents dispositifs est démontrée par la manière dont le détecteur DESCANT peut être couplé avec TIGRESS pour détecter les neutrons à la suite d’une évaporation par fusion, ou encore avec GRIFFIN pour l’étude de l’émission bêta de neutrons retardés.

La découverte de nouvelles caractéristiques dans les noyaux exotiques, comme dans les halos nucléaires, ou encore de signatures imprévues de changements dans la structure des couches nucléaires, et l’étude de la force nucléaire et de ses effets sur la structure nucléaire sont des sujets pour lesquels le laboratoire ISAC de TRIUMF et le groupe de théoriciens à TRIUMF jouent un rôle prépondérant dans les programmes internationaux.

Au laboratoire ISAC, les équipes de chercheurs dirigées par des Canadiens ont fait des découvertes importantes grâce à des expériences utilisant des faisceaux non accélérés et des faisceaux réaccélérés. Mentionnons un exemple récent : les mesures réalisées avec TITAN de la masse des isotopes de Ca et de K riches en neutrons ont confirmé les prévisions théoriques s’appuyant sur des forces entre trois nucléons. Ces résultats ont suscité des efforts expérimentaux importants partout dans le monde (RIKEN, CERN, NSCL/MSU, entre autres), et ont aiguillé les développements théoriques. Les expériences avec faisceaux réaccélérés avec le spectroscope IRIS ont fourni de nouvelles preuves d’un nouveau mode d’excitation recherché depuis longtemps, à savoir la résonnance dipolaire diffuse dans le noyau halo du 11Li.

Les propriétés collectives des nucléons dans un noyau complexe présentent un défi de longue date en physique nucléaire. Des groupes de chercheurs canadiens utilisent l’infrastructure existante des faisceaux isotopiques et les dispositifs expérimentaux pour étudier ces phénomènes, à quoi s’ajoutent les nouvelles avancées en matière d’isotopes et le laboratoire phare de TRIUMF, nommé ARIEL, qui produit des isotopes pour la physique et la médecine.

Les chercheurs canadiens utilisent de façon stratégique les installations à l’étranger, en complément au robuste programme de TRIUMF. Par exemple, le spectromètre à piège de Penning au laboratoire ANL met à profit les différents isotopes disponibles à l’installation CARIBU RIB. Les installations PREXII et CREX au Jlab seront utilisées pour mesurer le rayon des neutrons du 208Pb et du 48Ca avec une grande précision. Les chercheurs canadiens dirigent des programmes visant à mesurer le rayon des noyaux riches en neutrons à l’installation de faisceaux d’isotopes rares GSI-FAIR. L’étude des nouvelles théories sur les couches est un autre axe de recherche important au Canada, dans lequel les chercheurs canadiens jouent de nouveau un rôle de premier plan et ont obtenu de nouveaux résultats qui auront des impacts, comme le noyau du 24O qui s’avère doublement magique, un résultat tout à fait imprévu. Des programmes à l’étranger sont également réalisés dans d’autres installations de faisceaux d’isotopes rares, à savoir RIKEN-RIBF et NSCL-FRIB.

Les théoriciens canadiens à TRIUMF et dans les universités dirigent des initiatives majeures visant à développer de nouvelles méthodes à N corps pour décrire la structure et les propriétés réactives des noyaux de masse légère, moyenne et lourde. De plus, ils jouent un rôle important dans l’interprétation des données expérimentales, et ils dirigent de nouvelles expériences à TRIUMF et à l’étranger.

7 Comment les éléments ont-ils été formés dans l’univers?

La nucléosynthèse qui s’est produite lors du refroidissement ayant suivi le Big Bang a produit l’abondance primordiale des éléments légers H, He et Li. Presque tous les autres éléments dans l’univers ont été produits à la suite de réactions nucléaires dans les étoiles ou lors d’événements cataclysmiques comme la fin de la vie d’une étoile. Les produits de réaction sont projetés dans le milieu interstellaire par les vents stellaires ou encore par des événements comme les explosions de novæ et de supernovæ, ou encore la fusion d’étoiles à neutrons.

Parmi les principaux objectifs de l’astrophysique nucléaire, mentionnons la compréhension de l’origine des éléments, le lien entre les abondances solaires observées et la structure nucléaire, les mécanismes d’effondrement du cœur menant aux supernovæ, la structure et le refroidissement des étoiles à neutrons, et l’équation d’état de la matière nucléaire asymétrique. L’astrophysique nucléaire a énormément profité des progrès de l’observation astronomique et de la modélisation astronomique, et une nouvelle ère s’ouvre avec l’utilisation des installations produisant des faisceaux d’isotopes radioactifs pour mesurer les nucléides de courte vie d’intérêt en astrophysique. Cela comprend la détermination des masses, des demi-vies et de la structure des noyaux exotiques, ainsi que la détermination directe et indirecte de diverses sections efficaces de noyaux radioactifs. Les mesures pertinentes pour l’astrophysique nucléaire réalisées à TRIUMF et dans d’autres installations internationales de faisceaux d’isotopes radioactifs font partie intégrante des programmes scientifiques dans ce domaine. La majeure partie de ces appareillages sert également aux recherches sur la structure nucléaire.

Rôle des physiciens canadiens
En collaborant avec les théoriciens en astrophysique nucléaire, les expérimentateurs emploient des faisceaux radioactifs pour étudier d’importants aspects de cette discipline. Aux installations d’ISAC à TRIUMF, plusieurs configurations expérimentales visent à étudier les réactions et les propriétés nucléaires pertinentes pour la nucléosynthèse des éléments. On a un grand besoin de plus de données expérimentales, en particulier au sujet des noyaux lourds.

L’installation DRAGON, qui consiste en un séparateur de recul, est dirigée par des Canadiens collaborant avec des partenaires internationaux et mesure les sections efficaces de capture radiative (α et protons) importantes en astrophysique. Avec une suppression dans le faisceau d’une particule par 1014 ions incidents, un record mondial, cet appareil est d’une sensibilité spectaculaire. Les réactions qui se produisent dans les environnements explosifs des novæ, des supernovæ et des sursauts de rayons X sont un aspect particulièrement intéressant. La portée expérimentale de DRAGON atteint la région des masses élevées, de l’ordre A ≈ 80.

Le réseau de détecteurs de réactions et de diffusion de particules chargées TUDA est utilisé par des Canadiens qui collaborent avec des chercheurs des universités d’Édimbourg et de York au Royaume-Uni. Par exemple, TUDA a permis l’extension des études des réactions 18F(p,α)15O dans le régime des énergies des novæ, importantes en astrophysique, et on vient d’y terminer une mesure, qui a attiré l’attention, de la réaction de transfert 26gAl(d,p)27Al pour contraindre indirectement la réaction 26gAl(p,γ)27Si.

Le spectromètre GRIFFIN, qui vient récemment d’être mis en service et utilisé conjointement avec le détecteur de neutrons DESCANT, convient idéalement à l’étude des noyaux riches en neutrons et de courte vie. Le prochain programme expérimental portera sur les probabilités d’émission bêta de neutrons retardés et le spectre neutronique des isotopes clés dans le processus de capture neutronique rapide.

L’installation de spectroscopie γ TIGRESS, utilisée de concert avec le détecteur de particules SHARC, peut également servir à mesurer des réactions de transfert pertinentes en astrophysique. Elle est exploitée par une équipe internationale, dirigée par des Canadiens.

À ces travaux expérimentaux à TRIUMF s’ajoutent les calculs théoriques ab initio portant sur quelques-unes des réactions importantes en astrophysique.

Le piège de Penning canadien est exploité à l’installation CARIBU à l’Argonne National Laboratory, et il a été abondamment utilisé pour mesurer les masses de noyaux riches en neutrons produits par la fission du 252Cf. Sa contrepartie à TRIUMF est l’installation TITAN qui complémente les études expérimentales des Canadiens cherchant à comprendre la formation des éléments lourds dans les processus de capture neutronique et protonique rapide.

Le projet BRIKEN est une grande collaboration internationale qui rassemble des compteurs neutroniques remplis de 3He issus de différentes expériences en une configuration unique mondiale, hautement efficace, au RIKEN Nishina Center (Japon). Par rapport au programme réalisé avec GRIFFIN et DESCANT à TRIUMF, le projet BRIKEN vise la découverte et la mesure initiale de plus d’une centaine d’isotopes exotiques qui peuvent émettre jusqu’à trois neutrons après la désintégration bêta. La partie de l’expérience dirigée par les Canadiens porte sur les isotopes entre 76Co et 92Se.

3. Plan de recherche en physique subatomique au Canada

Chercheurs travaillant sur le séparateur de recul D­RAGON à T­RIUMF.

© Paul Joseph et TRIUMF

Chercheurs travaillant sur le séparateur de recul DRAGON à TRIUMF.

Avec ses impressionnantes réalisations en recherche et en formation, la communauté canadienne de la physique subatomique est en mesure de miser sur ses réussites pour les cinq prochaines années. À cette fin, le plan recommandé comporte une approche en deux volets prévoyant des investissements stratégiques avisés tant en physique théorique que dans un ensemble choisi d’expériences en cours. Pour faire progresser davantage la recherche en physique subatomique au cours des prochaines années, le Canada doit soutenir des expériences stratégiques à petite échelle, tout en se positionnant bien pour jouer un rôle prépondérant dans les futurs grands projets. On prévoit que plusieurs projets passeront diverses étapes d’approbation dans la période 2017-2021, tandis que pour quelques projets de plus grande envergure, il y aura des demandes parallèles pour des installations et des ressources canadiennes. Il faudra donc peut-être apporter des ajustements au plan durant cette période, ce qui nécessitera une gestion avisée de l’enveloppe de fonds qui est accordée par le CRSNG à la physique subatomique.

Un certain nombre de projets expérimentaux au cours de la période de planification 2017-2021 se prolongeront jusque dans la période de planification 2022-2026. De même, les grands projets qui nécessiteront d’importantes dépenses pour la période 2022-2026 nécessiteront déjà des investissements stratégiques au cours de l’actuel plan quinquennal 2017-2021.

Théorie

En physique subatomique, les théoriciens posent et développent les grandes questions décrites à la section 2. Les développements théoriques sont essentiels pour répondre à ces questions et formuler les orientations futures de la recherche. Bon nombre de physiciens dans cette vaste communauté, parmi lesquels des sommités mondiales, étudient ces questions fascinantes et conçoivent des outils et des modèles théoriques autant formels que phénoménologiques. Ce large éventail d’expertises permet aux théoriciens de travailler rapidement et efficacement sur les nouveaux phénomènes dès qu’ils sont observés. En outre, les expérimentateurs bénéficient grandement de l’apport important des théoriciens pour interpréter les résultats et orienter leurs propres travaux menant à la découverte. Il est donc essentiel que la communauté des chercheurs en physique subatomique théorique continue de recevoir un fort appui, lequel représente environ 15 % de l’enveloppe du CRSNG en physique subatomique.

Recommandation scientifique :

Continuer d’appuyer fermement la recherche en physique subatomique théorique.

Installations et expériences phares en cours

En raison de ses réalisations scientifiques et de sa position solide en recherche et en développement, la communauté canadienne de la physique subatomique a de quoi justifier des investissements continus dans les projets de recherche en cours au Canada et à l’étranger au cours des cinq prochaines années. Afin de poursuivre sa série de succès, il est essentiel d’assurer un soutien robuste à plusieurs projets phares en cours, qui tous bénéficient d’un apport solide de la part des équipes établies de chercheurs canadiens. Ces projets, qui ont vu le jour après des décennies de planification et de développement, nous aident maintenant à obtenir des réponses aux grandes questions présentées ci-dessus et permettent à la physique canadienne de se tailler une place enviable sur la scène mondiale.

Grâce au laboratoire ARIEL, la productivité du programme des isotopes rares à TRIUMF augmentera de façon spectaculaire, tant en termes de nouveaux types de faisceaux (alimentés par le nouvel accélérateur d’électrons) que par le triplement du nombre de lignes de faisceau, qui permettront également la réalisation d’expériences de plus longue durée. Les mesures qui auront un grand impact et qui permettront ces investissements nécessiteront la formation rapide d’un personnel hautement qualifié (PHQ) à partir de 2018, afin de maximiser la production scientifique potentielle et d’optimiser l’utilisation des capacités de cette nouvelle ressource.

Le laboratoire SNOLAB, une autre installation phare, héberge plusieurs expériences (DEAP-3600, PICO, SuperCDMS et SNO+) visant à rechercher la matière sombre et la désintégration double-bêta sans émission de neutrinos. Des améliorations sont déjà prévues pour les expériences complémentaires de recherche de la matière sombre que sont DEAP-3600, PICO et SuperCDMS (30 kg), et si ces expériences sont financées, les travaux de construction pourraient commencer vers la fin de la période 2017-2021. En fonction du succès de ces expériences, des plans sont prévus pour faire passer l’expérience DEAP-3600 à la phase DEAP-50T (50 tonnes) et l’expérience SuperCDMS à une variante à 200 kg, et à cette étape, la sensibilité à la matière sombre serait limitée seulement par les interactions des neutrinos. Lorsqu’il sera rempli de scintillateur liquide, le détecteur de l’expérience SNO+ entrera en service pour commencer plusieurs années de collecte de données, et permettra de réaliser des études à l’échelle d’une tonne pour détecter la désintégration double-bêta sans émission de neutrinos, les neutrinos solaires, les géoneutrinos et les neutrinos émis par les supernovæ.

Au CERN, les expériences ATLAS rendues possibles à la frontière de l’énergie grâce au LHC poursuivront la prise de données pendant la prise de données 2 jusqu’à la fin de 2018. Au cours d’un arrêt subséquent de deux ans, des améliorations de la phase I seront apportées au détecteur ATLAS afin de le préparer aux taux déclencheurs plus élevés qui devraient être produits pendant la prise de données 3, censée commencer en 2021. Durant les phases de collecte de données des phases d’exploitation 2 et 3, on travaillera en parallèle pour préparer les améliorations de la phase II, qui seront réalisées lors de la période de planification quinquennale suivante. Au cours de cette période, l’expérience ATLAS améliorera grandement la mesure des propriétés des particules connues, comme le boson de Higgs, et fera progresser la recherche de phénomènes au-delà du modèle standard, y compris la matière sombre. Ces progrès nécessiteront le soutien continu du centre de calcul canadien ATLAS de niveau 1.

L’expérience sur les angles de mélange de neutrinos, qui se déroule avec l’accélérateur T2K à J‑PARC au Japon, se poursuivra afin de recueillir des données dans le cadre de son programme de recherche de la violation de la symétrie CP dans le secteur des neutrinos. À cette fin, on réalisera des mesures précises de plusieurs paramètres fondamentaux pour les oscillations des neutrinos et des antineutrinos. Ce vaste ensemble de données permettra de répondre à des questions au sujet de l’origine des masses et des paramètres de mélange des neutrinos. Outre le programme existant, les collaborateurs canadiens de l’expérience T2K travaillent sur de futures orientations en participant au projet Hyper-Kamiokande, qui vise à augmenter de 25 fois le volume du détecteur de Super-Kamiokande. Les membres canadiens de l’expérience T2K dirigent également la proposition NuPRISM, qui consisterait à construire un détecteur Tcherenkov à eau de grandes dimensions situé à environ 1 km de la source du faisceau de neutrinos et ayant la possibilité d’exploiter les variations dans le spectre d’énergie des neutrinos.

Recommandation scientifique :

Assurer des ressources et un soutien continus aux grandes expériences et installations ci-dessous, qui produisent déjà des résultats scientifiques grâce aux importants efforts canadiens et internationaux coordonnés, afin de leur permettre de réaliser leur plein potentiel :

  • TRIUMF, ses installations de faisceaux radioactifs et les expériences connexes. En triplant la puissance des faisceaux produits par le laboratoire ARIEL au cours des cinq prochaines années, nous pourrons accroître grandement les résultats scientifiques, les possibilités de formation et les retombées générales;
  • SNOLAB, et ses expériences qui visent à détecter les interactions avec la matière sombre et la désintégration double-bêta sans émission de neutrinos, phénomènes qui n’ont jamais encore été observés;
  • ATLAS, une expérience qui explore maintenant les collisions entre protons près des niveaux ultimes d’énergie et qui profitera de la luminosité accrue du Grand collisionneur de hadrons haute luminosité (LHC haute luminosité);
  • T2K, une expérience qui étudie les propriétés des neutrinos et dont la précision ne cesse de croître à mesure que l’intensité du faisceau de neutrinos augmente.
Un scientifique est descendu dans la cuve en acrylique du S­NO+ pour préparer le détecteur en vue de son remplissage.

© SNOLAB

Un scientifique est descendu dans la cuve en acrylique du SNO+ pour préparer le détecteur en vue de son remplissage.

Expériences stratégiques à petite échelle

La science évolue, de nouvelles occasions et idées voient constamment le jour, et il est donc important de maintenir un programme diversifié d’excellence dans la recherche en physique subatomique. Le programme canadien de recherche s’articule autour de plusieurs grandes questions, décrites à la section 2, chacune étant reconnue comme hautement prioritaire par la communauté internationale des physiciens des particules. Les chercheurs canadiens dans ces domaines reconnaissent la nécessité de maintenir l’excellence scientifique ainsi qu’une masse critique d’efforts. Ils assument donc des rôles de premier plan et font des contributions importantes à un groupe sélectionné de projets à petite échelle au Canada et à l’étranger. Comme les grands thèmes scientifiques sont intimement liés entre eux, les progrès dans un domaine doivent souvent s’appuyer sur des réalisations dans un domaine complémentaire. Un programme large et diversifié, reposant sur plusieurs axes stratégiques à petite échelle, est donc crucial pour la santé de la physique subatomique, et tous les scénarios de financement doivent en tenir compte.

Afin de couvrir ce vaste domaine, on doit disposer de ressources, avec des délais de démarrage de moins de cinq ans, pour soutenir des efforts à petite échelle qui en sont aux premiers stades de recherche et de développement, qui se déroulent actuellement ou qui nécessitent des ressources limitées. Dans tous les cas, l’excellence scientifique et la perspective importante d’avancées scientifiques majeures doivent être les critères minimaux pour que ces projets reçoivent un appui. Dans plusieurs projets importants, la collecte de données au Canada commencera au cours de la période 2017-2021, ce qui donnera de l’ampleur au programme.

L’expérience NEWS à SNOLAB utilise des sphères de cuivre ultra pur d’un diamètre de 1,4 mètre, remplies d’un gaz léger servant de volume de dérive et d’amplification, pour détecter l’ionisation induite par le recul nucléaire causé par la diffusion des particules WIMP qui composeraient la matière sombre. Le dispositif fonctionne à des pressions atteignant dix bars, ce qui donne à la cible une masse active de plusieurs kilogrammes.

Le projet HALO consiste en un détecteur peu coûteux construit pour déceler les neutrinos produits par les supernovæ. Dirigé par des Canadiens, il est devenu entièrement opérationnel à SNOLAB en 2012. Le détecteur consiste en 80 tonnes de plomb instrumenté à l’aide de 360 m de compteurs de neutrons au 3He blindé par 30 cm d’eau. Un détecteur HALO amélioré, qui sera établi au laboratoire LNGS en Italie, est actuellement au stade de la proposition, et si ce projet est approuvé, on prévoit qu’il sera construit et deviendra opérationnel d’ici la fin de la période de planification 2017-2021.

D’autres expériences importantes auxquelles participent des Canadiens seront réalisées à l’étranger. La collaboration ALPHA-Canada prévoit commencer à exploiter le piège ALPHA‑2, qui sera la suite améliorée de l’expérience ALPHA au CERN, pour des travaux de spectroscopie de précision de l’antimatière, tout en réalisant des mesures précises des interactions antimatière-gravité à l’aide d’ALPHA‑g. Toujours au CERN, l’expérience NA62 recueillera des données au cours de la période 2017-2021 afin d’éclairer l’analyse des désintégrations rares du kaon avec des taux de branchement sensibles à la nouvelle physique aux échelles de masse élevées.

L’expérience g–2 à J‑PARC vise à mesurer le moment magnétique anormal du muon, afin de le comparer aux prévisions du modèle standard. La technique est complémentaire à celle qui a été utilisée dans une expérience BNL passée (BNL E821), qui avait trouvé un écart de 3,6 σ, et à une expérience qui sera réalisée à Fermilab (E989). Les premières étapes de construction et de prise de données devraient avoir lieu au cours de la période de planification 2017-2021.

L’accélérateur d’électrons LINAC supraconducteur à ondes stationnaires et à grande luminosité au JLab a récemment fait l’objet d’améliorations pour faire passer son énergie maximale de faisceau de 6 à 12 GeV, ce qui offre de nombreuses possibilités pour l’étude de la nouvelle physique. Les Canadiens ont joué un rôle de premier plan dans diverses expériences de mesures précises en QCD, des facteurs de forme des hadrons et de la physique électrofaible, y compris les expériences GlueX et PREX/CREX.

Les faisceaux d’isotopes rares produits par fragmentation de projectiles dans les installations de mesure en vol, dont GSI-FAIR, RIBF-RIKEN et NSCL/FRIB, offrent des capacités complémentaires pour l’étude des réactions par rapport au programme de spectroscopie de réaction avec des faisceaux de basses énergies à TRIUMF. Les Canadiens à l’œuvre dans ces laboratoires travaillent sur un certain nombre de mesures importantes, y compris la détermination de l’épaisseur de la « peau neutronique » des isotopes exotiques, l’étude des noyaux extrêmement riches en neutrons ou en protons, des taux de branchement de l’émission bêta de neutrons retardés et des demi-vies des isotopes très riches en neutrons, l’étude de la structure des couches et de la distribution des nucléons, la spectroscopie X des éléments super lourds, ainsi que l’étude de la hauteur des barrières de fission dans les noyaux riches en neutrons.

L’Observatoire de neutrinos IceCube, situé au pôle Sud, recueillera des données pendant toute la période 2017- 2021. Les études des flux de neutrinos d’énergie élevée et statistiquement limités, y compris leur forme spectrale et leur composition (rapport des saveurs), connaîtront des progrès importants et permettront de tester la présence de signes d’une physique au-delà du modèle standard. Les chercheurs canadiens jouent un rôle prépondérant dans le développement du projet PINGU, un projet d’agrandissement futur de l’expérience IceCube, qui ciblera les basses énergies.

Recommandation scientifique :

Soutenir les efforts canadiens stratégiques à petite échelle, pouvant rejoindre une plus grande partie de la communauté des chercheurs. Il est important entre autres de continuer à soutenir la participation canadienne aux projets internationaux suivants : ALPHA, JLab, les expériences avec les faisceaux d’isotopes rares à l’étranger et IceCube.

 

Le dispositif de suivi pour le détecteur proche construit par les Canadiens, pour l’expérience sur les neutrinos T­2K située au Japon.

© Dean Karlen

Le dispositif de suivi pour le détecteur proche construit par les Canadiens, pour l’expérience sur les neutrinos T2K située au Japon.

Grands projets futurs

Les Canadiens doivent jouer un rôle de premier plan dans le développement des grands projets au cours de la période 2017-2021 pour qu’ils continuent de contribuer à un haut niveau à l’avancement de notre compréhension de l’univers, en s’attaquant de front aux questions d’une importance cruciale en physique subatomique (section 2). Les scientifiques canadiens appuient déjà tous les projets décrits ci-dessous et, dans certains cas, ils y jouent un rôle prépondérant. Il faut bien savoir qu’au moment de la rédaction du présent rapport, certains de ces projets, qui pourraient devenir les projets phares de la prochaine décennie, voire au-delà, n’ont pas encore été approuvés.

À la frontière des hautes énergies, un important projet de montée en luminosité du LHC (qui deviendra le LHC haute luminosité, ou HL-LHC) a été approuvé par le CERN. La majeure partie de la communauté ATLAS-Canada, la plus importante concentration de physiciens canadiens au sein d’une même expérience, continuera de travailler sur ce projet. Nous avons déjà commencé, et nous continuerons au cours de cette période quinquennale, à définir et entreprendre les contributions prévues de la collaboration ATLAS-Canada en matière de détecteurs, pour les améliorations de la phase II grâce auxquelles l’expérience ATLAS sera prête pour l’exploitation du HL‑LHC. Outre l’amélioration des détecteurs, le centre de calcul ATLAS de niveau 1 nécessitera un accroissement important de sa capacité, et le laboratoire TRIUMF devrait contribuer grandement à l’amélioration du système d’accélérateurs du HL‑LHC.

Les expériences Belle II et UCN/nEDM sont deux projets essentiels à la frontière de la précision, déjà approuvés, qui permettront de sonder indirectement la matière bien au-delà de l’échelle des TeV, de façon complémentaire à ATLAS. Des équipes de chercheurs canadiens participent à ces deux expériences, et allouent une part importante de leur temps de recherche à ces projets. Belle II examinera les symétries fondamentales et le secteur de la matière sombre, après avoir commencé la collecte de données au cours de cette période. Des investissements considérables en infrastructure ont déjà été faits à TRIUMF pour l’expérience UCN/nEDM, et il est essentiel que l’installation et l’expérience nEDM fonctionnent pendant cette période, afin de tirer pleinement profit de ces investissements. La phase 1 du projet UCN, qui comprend la source de neutrons ainsi qu’un appareillage nEDM prototype, est presque parachevée. Au cours de la phase 2, l’expérience nEDM et l’amélioration des sources permettront d’exploiter pleinement la nouvelle installation.

Le détecteur EXO‑200, qui cherche à trouver des signes de désintégration double-bêta sans émission de neutrinos, et qui est actuellement exploité à l’installation WIPP, continuera de recueillir des données au cours de cette période, et l’amélioration de l’électronique, du contrôle du bruit de fond et des améliorations de l’analyse permettront de tripler sa sensibilité. Les travaux de recherche et de développement se poursuivent afin de préparer la phase suivante de cette expérience, qui sera appelée nEXO, pour la faire passer de 200 kg à 5 tonnes, et de nouveau les Canadiens assumeront un rôle de premier plan. Le groupe de chercheurs canadiens qui travaillent sur cette expérience dirige le développement de nouvelles techniques avancées de détection en vue de leur utilisation dans le futur détecteur nEXO. Si le programme nEXO de 5 tonnes est un succès technique et est approuvé aux États-Unis, l’objectif est de placer le détecteur à SNOLAB, et de commencer les travaux de construction au cours de la période quinquennale de planification.

Le collisionneur linéaire international ILC (International Linear Collider) est un autre projet à la frontière de la précision qui, si son financement est confirmé, attirerait probablement un nombre important de chercheurs canadiens, et la contribution canadienne nécessiterait d’importantes ressources. Grâce au transfert de technologie rendu possible par les choix d’instrumentation faits pour le laboratoire ARIEL à TRIUMF, le secteur industriel canadien est très bien placé pour contribuer à certains aspects du programme de l’accélérateur ILC. La petite équipe de physiciens canadiens qui travaille actuellement sur le grand détecteur international ILD (International Large Detector) devrait être soutenue, afin de préserver notre participation à cet important projet et à son vaste programme scientifique, et pour lequel une décision de financement devrait être rendue au début de la période de cinq ans.

L’expérience MOLLER, qui serait suivie deux ans plus tard du projet de détecteur SoLID, déjà bien accepté, au Jefferson Laboratory, est également à la phase de conception et si elle reçoit les approbations requises aux États-Unis, la participation des chercheurs canadiens à ce projet augmentera.

Des physiciens canadiens s’attaquent déjà aux futures expériences sur les neutrinos concernant la hiérarchie des masses et la violation de la symétrie CP. Ces expériences, qui n’ont pas encore reçu de financement, sont les suivantes : Hyper-Kamiokande et T2K/NuPRISM au Japon, et PINGU dans le cadre de l’expérience IceCube au pôle Sud. Les décisions relatives au financement de ces projets devraient être prises au début de la période de planification. Les résultats des plans japonais auront notamment un effet important sur la façon dont les chercheurs canadiens travaillant dans le domaine des neutrinos et pour le projet ILC concentreront leurs intérêts de recherche au cours de la prochaine décennie.

Recommandation scientifique :

Positionner le Canada pour qu’il assume un leadership clé dans des initiatives et des projets stratégiques en soutenant d’éventuels grands projets. Plusieurs expériences devraient recevoir un soutien permettant une participation canadienne importante : ATLAS au LHC haute luminosité, Belle II, Hyper-Kamiokande, ILD à l’ILC, MOLLER et SoLID à JLab, nEXO à SNOLAB, et UCN/nEDM à TRIUMF.

 

Le calorimètre hadronique bouchon, construit au Canada, pour l’expérience A­TLAS au C­ERN.

© Roy Langstaff

Le calorimètre hadronique bouchon, construit au Canada, pour l’expérience ATLAS au CERN.

Perspectives pour 2022-2026

Ce qui se passera dans cinq à dix ans dépendra non seulement de plusieurs grandes décisions internationales en matière de financement au cours de la période 2017-2021, mais également du succès des expériences et des efforts théoriques précédents visant à lever encore plus le voile sur les secrets du monde subatomique. Une meilleure compréhension du boson de Higgs et peut-être la découverte de nouvelles particules compagnons du Higgs pourraient être possibles à l’échelle électrofaible. On aura peut-être démontré l’existence de comportements imprévus dans les familles de neutrinos, comportements probablement dus aux changements de saveur ou aux caractéristiques des couples particules-antiparticules. Les chercheurs en physique subatomique sont toujours à l’affût de phénomènes nouveaux et imprévus. C’est là un trait inhérent à ce type de recherche. Cette approche est incorporée dans la conception des appareillages expérimentaux actuels – et de ceux qui sont déjà prévus –, de telle sorte que de nouvelles découvertes d’importance scientifique mondiale, voire sociétale et économique, peuvent se produire à diverses étapes de l’importante participation canadienne au programme mondial de la physique subatomique.

Plusieurs initiatives expérimentales importantes, offrant la promesse d’accroître grandement notre compréhension actuelle de l’univers grâce à la physique subatomique, entreront dans leur phase de conception et de développement durant la période 2017-2021, mais nécessiteront d’importants investissements en capitaux au cours de la période 2022-2026. Même dans le meilleur des scénarios de financement, nous ne pourrons optimiser les ressources canadiennes qu’en concentrant nos efforts sur les grandes expériences mondiales en physique subatomique, peu importe l’axe de recherche. À partir de la période 2017-2021, et pour certains points de convergence au cours de la période 2022-2026, la communauté des chercheurs canadiens devra axer ses efforts sur les grandes expériences visant à sonder la hiérarchie des masses et la nature CP des neutrinos, à étudier la désintégration double-bêta sans émission de neutrinos et à rechercher directement la matière sombre. Chacun de ces axes nécessitera d’importantes ressources, et il est donc essentiel que les partenaires étrangers y contribuent de façon importante, y compris pour les projets qui se déroulent au Canada.

Partout dans le monde, les chercheurs en physique subatomique continuent de concevoir et de proposer plusieurs grandes installations qui pourraient avoir des conséquences sur la direction et les efforts futurs de la recherche canadienne. Dans le domaine de la physique des particules aux hautes énergies, un but important est le développement de technologies d’accélération à gradient élevé, utilisant des cavités supraconductrices classiques ou d’autres techniques comme l’accélération par champ de sillage plasma. Le prochain grand appareil à la frontière des énergies devrait être un collisionneur linéaire électrons-positrons, ou un collisionneur circulaire dont la circonférence pourrait atteindre 100 km.

Fermilab, le principal accélérateur et laboratoire de physique des particules aux États-Unis, a pris le virage des grandes collaborations internationales, que ce soit en science des neutrinos à l’aide d’accélérateurs de particules, ou dans le développement de futurs collisionneurs de particules. On a proposé que Fermilab héberge un programme conçu, coordonné et financé internationalement pour une installation de neutrinos à grande distance (LBNF – Long-Baseline Neutrino Facility), alors qu’une collaboration internationale dans le domaine de la physique des neutrinos développera une expérience souterraine profonde sur les neutrinos (DUNE – Deep Underground Neutrino Experiment).

Sur le plan international, beaucoup d’efforts ont été consacrés à la construction d’un futur collisionneur électrons-ions (EIC – Electron-Ion Collider) aux États-Unis, au cours de la prochaine décennie. Les physiciens nucléaires canadiens occupent une place importante dans la planification et le prototypage de cette nouvelle installation, dont les mérites scientifiques ont fait l’objet d’examens favorables. L’agrandissement du laboratoire ISAC est également envisagé, et ce projet pourrait comporter la construction d’un anneau de stockage d’ions qui recevrait les faisceaux accélérés par ISAC‑II. On pourrait ainsi réaliser des expériences avec des noyaux légers riches en neutrons, au-delà de la portée des installations futures de mesure en vol, comme le FRIB.

Les occasions de ce type nécessitent des investissements constants dans la R et D dirigée et générique sur les détecteurs et les accélérateurs, pour préserver l’excellence de la physique subatomique canadienne au cours des prochaines décennies, et également pour soutenir les retombées positives de la recherche fondamentale sur la société et l’industrie canadiennes. Afin d’y parvenir, il est essentiel qu’une partie appropriée du financement de la physique subatomique au Canada soit disponible chaque année pour soutenir la R et D dans le domaine des détecteurs et des accélérateurs. Non seulement l’avenir du domaine en dépend, mais ce financement offre également des possibilités exceptionnelles de formation d’un personnel hautement qualifié, possédant des compétences qui sont directement transférables à l’industrie.

Recommandation scientifique :

Soutenir les propositions de R et D dirigée et générique sur les accélérateurs et les détecteurs en physique subatomique.

4. La communauté des chercheurs en physique subatomique au Canada

Étudiante travaillant sur un compresseur d’hélium à T­RIUMF.

© Paul Joseph et TRIUMF

Étudiante travaillant sur un compresseur d’hélium à TRIUMF.

La recherche en physique subatomique est répartie dans l’ensemble du Canada. Les équipes et les chercheurs individuels travaillent dans 31 universités, à TRIUMF, à SNOLAB et à l’Institut Périmètre, comme l’illustre la figure 1. Dans cette section, nous présentons un profil de la communauté canadienne des chercheurs en physique subatomique admissibles à l’aide financière des divers organismes subventionnaires, ainsi que leurs activités de recherche. Ces données proviennent des bases de données du CRSNG et d’une enquête réalisée par le Comité de planification à long terme en novembre 2015 auprès des titulaires de subventions du CRSNG. Le taux de réponse à l’enquête a été de plus de 70 %, et il était à peu près également réparti entre les sous-disciplines.

Profil de la communauté

En 2015, on comptait 233 chercheurs en physique subatomique au Canada qui recevaient une aide du CRSNG à titre de candidat ou de cocandidat. Dans cet échantillon, le nombre moyen d’années écoulées depuis l’obtention d’un baccalauréat en sciences ou d’un doctorat par le chercheur était de 31 et 25 ans, respectivement. Parmi les répondants ayant indiqué l’établissement où ils avaient obtenu leur diplôme, environ 60 % avaient obtenu leur baccalauréat en sciences au Canada, tandis qu’environ 60 % avaient obtenu leur doctorat à l’extérieur du Canada. Un tiers des répondants ayant reçu un baccalauréat en sciences au Canada avaient effectué leurs études de doctorat à l’extérieur du Canada. Ces données indiquent qu’une proportion appréciable de la communauté a été formée en partie à l’étranger.

Dans l’ensemble, les femmes représentaient seulement 12 % de l’échantillon des 233 chercheurs, une proportion similaire à celle des chercheuses dans le groupe d’évaluation en physique du CRSNG, soit 13 %. Le déséquilibre entre les sexes en physique subatomique diminue, mais lentement. Des 62 répondants à l’enquête qui avaient reçu leur doctorat au cours des 15 dernières années, 23 % étaient des femmes. Le comité ne disposait pas d’autres informations quant à la diversité.

La société canadienne est intrinsèquement diverse. La célébration de cette diversité est importante pour son identité sociale et culturelle. Une représentation équitable et la promotion des possibilités pour tous et toutes sont importantes pour la santé de l’économie canadienne, la recherche scientifique et l’éducation. L’absence de diversité généralisée dans de nombreux domaines des sciences, de la technologie, de l’ingénierie et des mathématiques (STIM), y compris la physique subatomique, est un fait bien reconnu. De nombreux facteurs contribuent à ce déséquilibre, depuis le nombre d’étudiantes dans ces domaines jusqu’aux échelons les plus élevés. Plusieurs comités ont été mis en place par l’Association canadienne des physiciens et physiciennes, l’American Physical Society et la Société européenne de physique afin de déterminer les barrières, de combattre les stéréotypes et d’instaurer des mesures visant à favoriser une communauté vraiment diversifiée et inclusive. La communauté canadienne en physique subatomique doit soutenir activement ces efforts afin de promouvoir et d’offrir une véritable égalité des chances et une culture inclusive à tous les niveaux.

Figure 1

FIGURE 1
Au Canada, 31 universités, TRIUMF, SNOLAB et l’Institut Périmètre participent à la recherche en physique subatomique. Il s’agit des établissements suivants, par ordre alphabétique : Acadia, Alberta, Brandon, UBC, Calgary, Carleton, Concordia, Fraser Valley, Guelph, Grenfell Campus of Memorial, Laurentienne, Laval, Lethbridge, Manitoba, McGill, McMaster, Montréal, Mount Allison (MTA), Northern British Columbia, Périmètre (PI), Québec à Montréal, Queen’s, Regina, Saskatchewan, Simon Fraser, SNOLAB, Saint Mary’s, Toronto, TRIUMF, Victoria, Waterloo, Western, Winnipeg et York.

Recommandation stratégique :

Les établissements, chercheurs et organismes de financement canadiens sont encouragés à œuvrer ensemble afin de favoriser une communauté diversifiée de chercheurs et de chercheuses en physique. Tous les membres de la communauté canadienne des physiciens sont encouragés à soutenir l’élaboration et la mise en œuvre d’un plan stratégique coordonné afin d’atteindre ce résultat, y compris la compilation de données et de statistiques pertinentes et le suivi des progrès. La communauté des chercheurs devrait promouvoir activement une représentation équilibrée à tous les échelons, y compris aux niveaux de grande responsabilité et de haute visibilité, car les personnes occupant ces postes sont une importante source d’inspiration.

Région Départs Embauches
C.-B. 8 8
Prairies 5 5
Ontario 10 12
Québec 6 3
Atlantique 0 1
Total 29 29

TABLEAU I
Renouvellement des postes admissibles aux subventions du CRSNG en physique subatomique entre 2010 et 2015, par région.

On peut également accroître la diversité, quoique plus lentement, par le « renouvellement » du corps professoral, c’est-à-dire le nombre de chercheurs qui prennent leur retraite et les nouveaux chercheurs qui sont embauchés. Entre 2010 et 2015, le nombre de chercheurs est passé de 224 à 233. Environ 13 % des chercheurs actifs en 2010 avaient pris leur retraite (ou démissionné) et avaient cessé de recevoir une aide à la recherche du CRSNG en 2015. Cette perte a été contrebalancée par un nombre égal d’embauches au cours de la même période. De plus, le taux de renouvellement est à peu près équilibré pour chaque région du Canada, comme l’indique le tableau I. La croissance nette, mais faible, de 4 % est attribuable au nombre de chercheurs qui étaient admissibles aux subventions du CRSNG au cours de cette période. Il y a eu plus de chercheurs qui ont commencé à recevoir une aide après 2010 que ceux qui ont cessé d’en recevoir.

Le taux de renouvellement de 13 % sur une période de cinq ans correspond au taux constant de départs à la retraite des chercheurs ayant eu une carrière d’environ 35 ans. L’enquête menée auprès des chercheurs comportait des questions au sujet de leurs activités sur une période de cinq ans. Dans l’ensemble, le taux de renouvellement prévu au cours des cinq années subséquentes était de 13 %, mais on a noté une différence importante entre les théoriciens (6 % ayant cessé leurs recherches) et les expérimentateurs (17 % ayant cessé leurs recherches).

L’ensemble de la communauté des chercheurs en physique subatomique est bien supérieur au nombre de chercheurs admissibles aux subventions du CRSNG. Les étudiants du premier cycle, les étudiants des cycles supérieurs et les stagiaires postdoctoraux apportent tous une contribution précieuse à la discipline. L’enquête auprès de la communauté demandait aux titulaires de subvention du CRSNG (i) d’indiquer combien d’étudiants des cycles supérieurs ils supervisaient, et (ii) d’estimer le nombre d’étudiants qu’ils auraient supervisé si l’obtention de fonds pour les étudiants des cycles supérieurs n’était pas un facteur. Les résultats ont indiqué qu’en moyenne, les chercheurs supervisaient 2,1 étudiants des cycles supérieurs, mais pouvaient en superviser environ 80 % de plus. Cette réponse était uniforme dans toutes les sous-disciplines.

Les étudiants qui reçoivent une formation en physique subatomique demeurent dans le domaine à titre de chercheurs, ou contribuent à de nombreux autres aspects de l’économie ou du système éducatif canadiens. Compte tenu des faibles coûts supplémentaires associés au soutien d’un plus grand nombre d’étudiants des cycles supérieurs, l’élargissement des mécanismes de financement destinés expressément au soutien de la formation des étudiants diplômés serait un investissement des plus efficaces, d’une grande valeur pour le Canada.

Recommandation stratégique :

Accroître les fonds accordés aux bourses et à l’enveloppe en physique subatomique afin de former un plus grand nombre d’étudiants des cycles supérieurs. Un tel investissement aura de grandes retombées pour le Canada en permettant à la communauté des chercheurs d’utiliser ses capacités pour faire participer davantage d’étudiants dans ce domaine et former du personnel hautement qualifié qui pourrait contribuer à la société en utilisant de nombreuses façons ses compétences pertinentes dans maints secteurs, dont le milieu universitaire, l’industrie et la médecine.

Profil de recherche

À la section 2, nous avons décrit comment les physiciens canadiens travaillent activement à répondre aux grandes questions en physique subatomique. Pour quantifier dans quelle mesure la communauté des chercheurs répartit ses efforts entre les différentes sous-disciplines, le Comité de planification à long terme a apparié chaque subvention du CRSNG accordée à un physicien à son thème de recherche (c.-à-d. l’une des grandes questions de la section 2), sauf dans le cas des subventions plus générales qui soutiennent la recherche sur les accélérateurs, ou du Programme d’appui aux ressources majeures (ARM). Cet exercice a été réalisé pour les années 2010 et 2015 afin de déterminer dans quelle mesure les physiciens avaient réorienté leurs efforts et s’il y avait eu un renouvellement dans le profil de recherche de la communauté au cours de cette période de cinq ans. Le tableau II indique le nombre de candidats et de cocandidats ayant reçu une subvention du CRSNG, réparti selon les principales catégories de recherche (théorie, expérience, accélérateurs), et ensuite en fonction des grandes questions qui sont l’objet principal de chaque recherche subventionnée. Les colonnes intérieures du tableau indiquent comment la communauté a changé, soit par la réorientation des travaux (chercheurs commençant ou arrêtant la recherche, ou changeant de thème de recherche), soit par le renouvellement (départs à la retraite ou embauches).

Les données indiquent que le renouvellement des effectifs et la réorientation de la recherche au cours d’une période de cinq ans peuvent avoir un effet important sur la composition de la communauté des chercheurs. Ce constat milite en faveur d’une plus grande souplesse à l’intérieur de l’enveloppe de financement de la physique subatomique du CRSNG, afin de tenir compte de l’évolution des priorités de la communauté des chercheurs, et également pour permettre la poursuite de nouvelles orientations de recherche prometteuses. Les changements les plus importants au cours de la période examinée sont une réduction du nombre de théoriciens travaillant sur les questions 5 à 7, et une augmentation du nombre de chercheurs expérimentateurs travaillant sur les questions 1, 2, 3 et 6. La diminution du nombre d’expérimentateurs travaillant sur la question 5 est due surtout à la fin du soutien à l’expérience ZEUS, qui est terminée. Aucune subvention accordée à des théoriciens n’est expressément liée à la question 2 (masse des neutrinos), car le cadre dans lequel s’inscrivent les oscillations de neutrinos et la désintégration double-bêta sans émission de neutrinos est déjà bien établi. Dans le même ordre d’idées, il n’y a aucune activité expérimentale associée expressément à la question 4 (structures), car il s’agit avant tout de travaux théoriques fondés sur les résultats expérimentaux existants. Cependant, comme ce fut le cas par le passé, ces travaux peuvent constituer l’assise théorique sur laquelle des expériences pourraient être basées dans un avenir proche ou lointain.

Ma formation en physique théorique m’a surtout doté d’une méthode rationnelle de réflexion et d’examen d’un problème scientifique. L’étude de la physique permet d’acquérir des compétences analytiques robustes, et les physiciens peuvent en même temps être réalistes et avoir une approche concrète. Ils sont non seulement capables de bien énoncer un problème, mais également de l’aborder avec pragmatisme et de trouver une solution optimale. Ce mode de réflexion, d’examen et de résolution d’un problème pouvant être complexe m’a grandement aidé dans ma carrière de gestionnaire-conseil au sein d’une entreprise qui s’intéresse à l’optimisation. Notre équipe a été confrontée à des problèmes commerciaux très compliqués et a mis en place des solutions et des systèmes qui ont permis à nos clients d’économiser des dizaines de millions de dollars. Et les employés de notre compagnie sont constitués à environ 30 à 40 % de titulaires de doctorat en physique! »

Octavian Teodorescu, Ph. D., McGill, 2002
Consultant principal II, Princeton Consultants Inc. (www.princeton.com)

Dans les sections 2 et 3, nous avons souligné le rôle important des théoriciens pour interpréter les résultats des expériences et pour définir de nouveaux axes de recherche. Le tableau II indique cependant qu’il y a un nombre disproportionnellement faible de théoriciens travaillant sur les questions 6 et 7, à savoir la structure nucléaire et l’astrophysique nucléaire, domaines dans lesquels le Canada a fait d’importants investissements et réalise des activités expérimentales poussées à TRIUMF. Un accroissement des travaux théoriques sur les aspects non perturbatifs de la physique subatomique bénéficierait à ces expériences, tout comme les autres domaines expérimentaux où l’apport canadien est important. Par exemple, grâce à une meilleure modélisation des interactions outre les neutrinos et d’autres particules pour les expériences sur les oscillations et à des calculs plus précis des éléments de matrice pour les expériences sur la désintégration double-bêta sans émission de neutrinos, on pourrait réduire grandement les incertitudes qui entachent ces mesures. De plus, les progrès en technologie informatique, jumelés à de nouvelles méthodes, permettent d’avancer dans le traitement des problèmes non perturbatifs et offrent une grande possibilité de progrès dans ce domaine.

Réorientation Renouvellement
2010 Domaine nouveau Domaine délaissé Embauche Départs 2015
Théorie 71 2 9 12 12 64
Q1 : Au-delà du modèle standard 17 5 2 3 2 21
Q2 : Masse des neutrinos 0 0 0 0 0 0
Q3 : Matière sombre 4 1 2 3 0 6
Q4 : Structures 26 3 5 3 4 23
Q5 : QCD et hadrons 17 1 6 1 3 10
Q6 : Structure nucléaire 6 0 2 2 3 3
Q7 : Formation des éléments 1 0 0 0 0 1
Expérience 146 19 5 16 16 160
Q1 : Au-delà du modèle standard 80 18 7 7 9 89
Q2 : Masse des neutrinos 38 4 5 6 1 42
Q3 : Matière sombre 20 3 0 4 0 27
Q4 : Structures 0 0 0 0 0 0
Q5 : QCD et hadrons 10 0 5 0 0 5
Q6 : Structure nucléaire 30 8 4 4 4 34
Q7 : Formation des éléments 16 0 2 1 2 13
Accélérateur 6 9 1 1 1 14
Toutes les catégories 224 21 2 29 29 233

TABLEAU II
Nombre de candidats et de cocandidats ayant reçu des subventions du CRSNG en 2010 et en 2015, réparti selon les grandes catégories de recherche et les grandes questions présentées à la section 2. Dans le cadre de cette étude, on a apparié chaque subvention au principal thème de recherche (grande question) du chercheur subventionné. Les colonnes intérieures indiquent les changements découlant de la réorientation des travaux et du renouvellement des effectifs, pour chaque catégorie. Dans la partie Réorientation, les colonnes Domaine nouveau et Domaine délaissé désignent le nombre de chercheurs admissibles à une subvention du CRSNG pour les deux années, mais qui ont commencé ou arrêté de recevoir une subvention dans la catégorie concernée. Les chercheurs embauchés l’ont été après 2010, et la colonne Départs comprend les départs à la retraite et les démissions avant 2015.

Figure 2

FIGURE 2
Cette figure illustre les liens entre les différents domaines de recherche théorique. L’épaisseur de la ligne reliant deux thèmes de recherche (questions) est proportionnelle au nombre de théoriciens ayant mentionné que leurs travaux touchent les deux questions. L’échelle d’épaisseur des lignes figure dans l’encadré (1 à 28 théoriciens).

Bon nombre d’expérimentateurs répartissent leur temps de travail entre plusieurs projets touchant différentes questions. L’enquête a demandé aux expérimentateurs d’indiquer quelle fraction du temps ils allouaient à chacune de leurs activités. La question était présentée de telle sorte qu’elle n’a pas permis de répartir les résultats par grand thème de recherche. La recherche a été plutôt répartie selon les projets réalisés au sein de l’Institut canadien de physique nucléaire (ICPN) et selon les grandes catégories générales au sein de l’Institut de physique des particules (IPP). Les liens entre les recherches de l’ICPN et celles de l’IPP sont présentés à la figure 3.

Figure 3 Figure 3

FIGURE 3
Ces figures illustrent les liens entre les différents projets de recherche expérimentale au sein de l’ICPN (gauchehaut) et les différentes catégories au sein de l’IPP (droitebas). L’épaisseur des lignes reliant deux domaines de recherche est proportionnelle au nombre d’expérimentateurs ayant indiqué qu’ils travaillent sur les deux domaines. L’échelle d’épaisseur des lignes figure dans les deux encadrés.

La répartition du temps de recherche varie grandement selon le domaine de recherche. Par exemple, les chercheurs qui travaillent à la frontière de l’énergie consacrent davantage de leur temps à ce domaine (ETP moyen/personne = 0,86), tandis que ceux qui travaillent sur la matière sombre travaillent également sur d’autres questions (ETP moyen/personne = 0,4).

5. Ressources et soutien à la recherche en physique subatomique au Canada

Secteur expérimental dans le hall à mésons à T­RIUMF.

© Paul Joseph et TRIUMF

Secteur expérimental dans le hall à mésons à TRIUMF.

Les activités de la communauté canadienne des chercheurs en physique subatomique sont soutenues par deux grands laboratoires et un important institut qui offrent une infrastructure expérimentale ou un soutien à la recherche théorique uniques en leur genre. Au laboratoire TRIUMF, basé à Vancouver, les chercheurs réalisent des travaux en physique nucléaire et des particules et en science basée sur les accélérateurs. Le laboratoire SNOLAB, à Sudbury, est un centre réputé d’expériences souterraines. Enfin, l’Institut Périmètre de physique théorique est établi à Waterloo. À ces centres de recherche s’ajoutent deux instituts « virtuels », l’un en physique nucléaire, l’autre en physique des particules, à savoir l’Institut canadien de physique nucléaire et l’Institut de physique des particules, respectivement. Nous décrivons plus en détail chacun de ces importants organismes de recherche dans les pages qui suivent.

Partout au pays, les établissements de toutes tailles qui confèrent des grades universitaires sont les principaux centres de formation de PHQ en physique subatomique. La majeure partie de la recherche théorique au Canada, ainsi que les activités de rayonnement auprès des étudiants du premier cycle et du public, se déroule à l’intérieur du réseau universitaire. Dans cette section, nous traitons de ces aspects et du vaste réseau de ressources basées dans les universités qui contribuent grandement au succès de la recherche canadienne en physique subatomique.

De nombreux physiciens canadiens œuvrant dans le secteur subatomique utilisent également les ressources d’installations et d’établissements à l’étranger, et travaillent au sein de collaborations internationales. Ils ont ainsi maintes occasions d’échanger des idées et de concevoir des expériences de calibre mondial afin de faire progresser les recherches. Dans cette section, nous décrivons également quelques-unes des installations à l’extérieur du Canada, où les physiciens canadiens rencontrent leurs collègues du monde entier.

La section se termine par une description des sources de financement qui rendent possible la recherche en physique subatomique au Canada. Ce secteur de recherche a eu un succès extraordinaire en obtenant du financement d’immobilisation par l’intermédiaire du programme de la Fondation canadienne pour l’innovation, ce qui témoigne de l’excellence de cette communauté de chercheurs. Les fonds de fonctionnement, disponibles par l’intermédiaire de l’enveloppe de physique subatomique du CRNSG, sont cependant à la traîne et menacent maintenant le succès continu de cette discipline au Canada.

Laboratoires et instituts canadiens

Haut lieu de découvertes depuis près de cinq décennies, le laboratoire TRIUMF jouit d’une grande réputation dans le monde entier comme laboratoire canadien national en physique nucléaire, en physique des particules et dans le domaine des accélérateurs.

Il dispose de son propre programme national de physique, couronné de succès, et il soutient la participation canadienne à la physique subatomique sur le plan international. Propriété d’un consortium de 19 établissements canadiens qui l’exploitent en commun, le laboratoire TRIUMF représente une dépense en capital combinée de plus d’un milliard de dollars. Ses capacités de recherche exceptionnelles attirent des utilisateurs canadiens et étrangers pour une foule d’expériences en physique nucléaire et des particules, et également pour les études théoriques. TRIUMF présente et soutient un grand nombre d’ateliers et de conférences chaque année. Le programme des ateliers théoriques a notamment eu un grand succès en attirant au Canada des experts internationaux reconnus en théorie nucléaire et en phénoménologie des particules. Cet apport est essentiel pour favoriser la collaboration entre les théoriciens et les expérimentateurs au niveau international. De plus, TRIUMF soutient un institut d’été (TSI – TRIUMF Summer Institute), qui rassemble des étudiants des cycles supérieurs en physique subatomique. TRIUMF engage aussi chaque année, dans le cadre de divers programmes d’été et d’étude en régime coopératif, environ 70 étudiants du premier cycle provenant de partout au Canada et de l’étranger, ce qui permet de les initier à la recherche en physique subatomique de calibre mondial qui est réalisée au Canada.

Au cours des deux dernières années et demie, j’ai travaillé comme chercheuse dans le groupe des matériaux, chez Ballard Power Systems, à Burnaby (Colombie-Britannique). Cette compagnie de haute technologie développe et produit des piles à hydrogène pour une foule d’applications, notamment l’alimentation électrique d’appoint dans les régions éloignées, les chariots élévateurs à fourche, les autobus et les voitures. Le groupe des matériaux s’intéresse surtout à la science des matériaux utilisés comme parties constituantes des piles à combustible. Mon rôle consiste essentiellement à planifier et réaliser des mesures des propriétés des matériaux, et à analyser et interpréter les données obtenues. Les connaissances que j’ai acquises lors de mon travail de maîtrise avec le groupe de physique nucléaire à la University of Guelph m’aident grandement dans mon travail actuel. La rédaction de ma thèse m’a bien préparée à rédiger des rapports scientifiques, à documenter les expériences réalisées et à résumer les résultats. Au cours de mon travail avec le groupe de physique nucléaire, j’ai également pu analyser de vastes ensembles de données et ainsi développer mes compétences en organisation et en analyse. Cela m’a permis d’exceller en analyse des données chez Ballard, et mes superviseurs ont mentionné qu’il s’agit de l’une de mes forces. Je crois que cela profite grandement au groupe. »

Kathryn Green, M. Sc., Guelph, 2009
Chercheuse, Ballard Power Systems, Burnaby (Colombie-Britannique)

TRIUMF est également un important centre d’accélérateurs, et l’on y retrouve des accélérateurs circulaires et linéaires qui produisent et fournissent des faisceaux de particules secondaires (isotopes, mésons et neutrons). Ce complexe d’accélérateurs est crucial pour le programme national canadien de physique subatomique, qui comprend la physique nucléaire et l’astrophysique, ainsi que pour des programmes en physique des particules de plus petite envergure. Les travaux en astrophysique et en physique nucléaire aux basses énergies s’appuient sur l’infrastructure unique et spécialisée d’accélérateurs de TRIUMF, y compris les installations de production et de maintien de faisceaux primaires, ainsi que sur des méthodes permettant de sélectionner les faisceaux secondaires, de synthétiser des isotopes de courte durée de vie et de les livrer aux postes d’expérience. L’installation ISAC de TRIUMF est l’installation ISOL régionale en Amérique du Nord, et elle constitue l’une des principales infrastructures mondiales de recherche sur les faisceaux d’isotopes rares. Avec près de trois décennies d’expérience dans la production et la livraison de faisceaux d’isotopes secondaires, TRIUMF attire des experts du monde entier qui viennent y réaliser des expériences de pointe. Programme phare au Canada, le laboratoire ARIEL et son projet d’isotopes représentent un investissement d’environ 100 millions de dollars provenant de la FCI et de plusieurs provinces. ARIEL comportera plusieurs caractéristiques de production novatrices et additionnelles, permettra l’accès à de nouveaux isotopes, et dépassera les limites actuelles de rendement pour de nombreux isotopes riches en neutrons. Cette installation permettra au Canada de demeurer à la fine pointe des recherches mondiales visant à répondre à des questions pressantes en physique nucléaire et en astrophysique, et à attirer les meilleurs chercheurs du monde entier.

TRIUMF offre également d’importantes capacités pour la construction et l’essai des composants de détecteurs à grande échelle destinés aux expériences à l’étranger, ou encore sous terre comme celles qui sont réalisées à SNOLAB. L’expertise de TRIUMF en matière d’accélérateurs est reconnue, grâce à sa contribution à de grands projets, comme le LHC et le faisceau de neutrinos de J‑PARC. Cette expertise a été mise à profit par la communauté canadienne des chercheurs en physique subatomique, qui ont fourni des composants à de grandes expériences en Europe et en Asie en utilisant l’expertise spécialisée et unique de TRIUMF en R et D pour les détecteurs, et en électronique, conception mécanique et fabrication. Les compétences spécialisées de son personnel, ainsi que son infrastructure moderne, permettent à TRIUMF de non seulement participer aux efforts mondiaux en physique nucléaire et des particules, mais également d’y jouer un rôle prépondérant.

Le laboratoire SNOLAB est l’une des plus importantes installations scientifiques souterraines au monde, et fut le lieu de l’expérience SNO grâce à laquelle le Canadien Arthur McDonald a mérité le Prix Nobel 2015. Il dispose d’un environnement expérimental unique à une profondeur d’environ 2 km sous la surface du sol, ce qui lui procure des conditions de recherche idéales pour les expériences visant à détecter les événements rares en physique nucléaire et des particules, à quoi s’ajoutent d’excellentes infrastructures auxiliaires à la surface. SNOLAB représente une infrastructure unique au monde en raison de l’environnement qu’il offre aux chercheurs qui viennent y travailler. Les installations souterraines, la structure du laboratoire et les systèmes de soutien experts contribuent tous à ce succès. SNOLAB attire des chercheurs du monde entier qui réalisent sous terre des travaux scientifiques de pointe primés.

SNOLAB dispose d’excellentes installations de développement des détecteurs souterrains, y compris des systèmes de purification des liquides, notamment les détecteurs liquides ou les matériaux de blindage. Le contrôle des matériaux utilisés dans l’équipement expérimental est d’une importance primordiale dans les études souterraines, car les impuretés peuvent contribuer au bruit de fond détecté et si elles ne sont pas éliminées, elles rendront tout à fait inutile le blindage massif offert par la roche environnante. SNOLAB a mis au point des technologies et des normes de sélection utiles pour les chercheurs qui effectuent des études souterraines, tant à SNOLAB que dans d’autres expériences ailleurs dans le monde.

Recommandation stratégique :

Continuer d’accorder un fort soutien aux laboratoires canadiens en physique subatomique : TRIUMF et SNOLAB.

L’Institut Périmètre (PI) de physique théorique est un organisme de recherche indépendant, unique en son genre, qui se consacre aux questions fondamentales en physique théorique, y compris les sous-domaines de la physique subatomique. Depuis sa création en 2001, le PI a attiré au Canada quelques-uns des chercheurs les plus éminents au monde en théorie des cordes et des particules. Le PI a également un impact considérable sur les chercheurs canadiens en physique des particules, car il oriente et soutient les efforts expérimentaux grâce aux recherches réalisées par les membres du corps professoral de l’Institut et des universités canadiennes.

Le PI est l’un des principaux centres de recherche en physique théorique au Canada. La contribution d’un tel institut est des plus précieuses, non seulement pour stimuler les interactions entre les divers sous-domaines de la physique, mais également pour jeter un pont entre la théorie et l’expérience. Le PI tient régulièrement des ateliers thématiques sur des sujets d’actualité en théorie des particules. En partenariat avec la University of Waterloo, le PI organise également le programme Perimeter Scholars International (PSI), un programme de maîtrise intensif d’une année en physique théorique. De plus, de nombreux théoriciens canadiens en physique subatomique sont des membres affiliés au PI, ce qui leur donne l’occasion de visiter régulièrement l’Institut et d’y séjourner dans un milieu international et stimulant. L’Institut Périmètre, SNOLAB et TRIUMF organisent conjointement l’école d’été TRISEP en physique des particules élémentaires.

L’Institut canadien de physique nucléaire (ICPN) soutient la promotion de la physique nucléaire et de ses chercheurs, et joue un rôle vital dans l’auto-organisation de la communauté canadienne des chercheurs en physique nucléaire. L’Institut de physique des particules (IPP) joue un rôle semblable pour la physique des particules. Les deux instituts contribuent grandement au processus de planification à long terme, ce qui permet de consolider les efforts des chercheurs canadiens en physique subatomique. De plus, grâce à la subvention reçue du CRSNG, l’IPP soutient huit chercheurs en physique des particules, qui jouent souvent un rôle important et majeur dans les grands projets et expériences prioritaires comportant une participation canadienne. Ces scientifiques peuvent allouer la majeure partie de leur temps à un effort concerté, et ainsi aider à structurer les contributions canadiennes afin d’en maximiser les retombées globales. La communauté des chercheurs en physique des particules estime que le programme des chercheurs de l’IPP est sa principale priorité en matière de financement.

Recommandation stratégique :

Assurer le financement adéquat du solide programme existant des chercheurs de l’IPP.

Le caractère complémentaire de tous ces instituts et laboratoires permet aux Canadiens d’effectuer des recherches expérimentales et théoriques de calibre mondial en physique subatomique. L’impact énorme et les succès que ces cinq laboratoires et instituts en physique subatomique ont eus sur la science au Canada ne sont pas seulement dus à une question d’infrastructure et à l’appui accumulé depuis de nombreuses années, mais également à leur souplesse et à leur dynamique. Les chercheurs sont en mesure de faire connaître directement leurs opinions au sujet des exigences et des besoins changeants. Cela se fait habituellement par l’intermédiaire de mécanismes officiels, notamment des groupes d’utilisateurs ou des représentations par les utilisateurs. À TRIUMF, les utilisateurs sont représentés au comité de direction du groupe d’utilisateurs (TUEC) de TRIUMF, lequel fournit une rétroaction systématique au sujet de l’exploitation et des travaux scientifiques en cours. Le TUEC participe également à l’exercice structuré de planification prospective que TRIUMF réalise à chaque cycle de financement, dans le cadre de son plan quinquennal. La capacité d’adaptation dynamique de TRIUMF comprend l’installation du nouveau laboratoire ARIEL, qui offre non seulement des isotopes plus nombreux et différents aux utilisateurs canadiens et étrangers, mais également des capacités de développement et de fabrication de nouveaux détecteurs de particules. À SNOLAB, les chercheurs canadiens et étrangers sont représentés dans le cadre du Forum des expériences de SNOLAB, un organe officiel au sein de la structure de gestion de SNOLAB, qui permet aux chercheurs de faire connaître leurs avis en matière de besoins opérationnels et de développement. Les utilisateurs participent également au plan stratégique de SNOLAB et présentent leurs idées au sujet des nouveaux développements requis pour maintenir la position de tête du laboratoire en sciences souterraines.

Installations dans les universités du Canada

Au Canada, les installations dont disposent les établissements universitaires sont complémentaires et constituent un lien crucial avec les instituts et laboratoires nationaux et internationaux qui se consacrent à la recherche en physique subatomique. Ces établissements, indiqués à la figure 1 de la section 4, intègrent habituellement la physique subatomique dans leur planification stratégique de la recherche. Ils couvrent un large éventail : les grandes universités qui offrent des programmes de doctorat et de médecine, les universités généralistes de taille moyenne et les petites universités qui offrent surtout des programmes de premier cycle. Le système universitaire canadien est un terreau fertile pour la recherche de calibre mondial, non seulement grâce aux modèles universitaires permettant la formation des étudiants du premier cycle et des cycles supérieurs, mais également grâce aux importantes ressources et installations globales mises à la disposition des chercheurs. Bon nombre des théoriciens en physique subatomique travaillent dans les universités, et par conséquent celles-ci sont le lieu où s’effectue la majeure partie de la formation de PHQ menée au Canada, ainsi que les activités de rayonnement et de vulgarisation auprès des étudiants du premier cycle et du public. Les ressources en physique subatomique qui sont situées dans ces établissements ou à proximité leur offrent non seulement une myriade d’avantages pratiques, vu la grande étendue géographique du Canada, mais permettent également d’interagir de façon importante avec le grand public et l’industrie locale, et ce, dans les différentes régions du pays.

Le succès de nombreux chercheurs canadiens en physique subatomique est certes tributaire des laboratoires et bureaux qui leur sont offerts, mais également des ressources partagées ou offertes par leur département universitaire, notamment le soutien pour le développement et la fabrication de systèmes électroniques, les ateliers de mécanique et leur personnel, les ingénieurs, les techniciens de laboratoire, les systèmes informatiques et les réseaux. Dans de nombreux cas, l’université a la pleine maîtrise de ses ressources (personnel rémunéré et équipement) qui sont souvent uniques à l’échelle du pays, mais elles peuvent néanmoins être partagées de façon informelle entre les chercheurs de différents établissements, habituellement dans le cadre d’une collaboration expérimentale ou théorique.

Ma formation en physique nucléaire des hautes énergies m’a permis d’acquérir des compétences et des capacités que j’utilise maintenant dans mon travail quotidien. Il s’agit non seulement de compétences analytiques en mathématiques appliquées, mais également de la capacité de réfléchir de façon critique, de formuler correctement une question de recherche et de différencier ce qui est important de ce qui ne l’est pas quand je résous un problème. C’est ma formation en physique des particules des hautes énergies qui m’a permis d’être embauché, comme plusieurs de mes collègues, par l’organisme responsable de la recherche et du développement au ministère de la Défense nationale du Canada. Je suis à peu près certain que mon employabilité pendant toute ma carrière sera tributaire de ma formation en physique subatomique. »

François-Alex Bourque, Ph. D., McGill, 2008
Chercheur, Organisation OTAN pour la recherche et la technologie, Centre de recherches et d’expérimentation maritimes, Italie

L’ICPN et l’IPP contribuent à optimiser l’utilisation des ressources nationales, par l’intermédiaire de leurs conseils scientifiques. Les chercheurs associés à l’IPP sont également affiliés à des universités, mais ils disposent d’une plus grande souplesse que les professeurs réguliers pour jeter des ponts entre les universités et les laboratoires au Canada et à l’étranger. L’Institut Périmètre, SNOLAB et TRIUMF ont des liens directs avec le corps professoral universitaire, par la nomination à des postes auxiliaires, associés ou de transition.

Le Programme d’appui aux ressources majeures (ARM), financé par le CRSNG, permet un partage plus formel des ressources universitaires. Des installations spécialisées en physique subatomique et financées par le Programme d’ARM sont exploitées à plusieurs endroits : University of Alberta, Carleton University, Université de Montréal, Queen’s University, University of Victoria. Ces installations servent entre autres à soutenir les travaux de développement des détecteurs en offrant divers services, dont la conception technique, la fabrication et l’installation du matériel, la conception et le soutien électronique, l’acquisition de données et l’expertise en simulation. Les ressources de ces installations sont mises à la disposition de toute la communauté canadienne en physique subatomique par un processus de présentation de propositions qui sont examinées par des comités d’affectation des ressources.

Les importantes ressources en calcul haute performance sont cruciales pour la communauté canadienne de la physique subatomique, car elles jouent un rôle essentiel pour reconstruire et analyser les données, produire des échantillons de données simulées et réaliser des calculs théoriques. Calcul Canada est un organisme mis sur pied par la communauté canadienne des chercheurs qui est financé par la FCI et par ses partenaires provinciaux. L’un des dix sites mondiaux de calcul de niveau 1 de l’expérience ATLAS, exploité et géré par ATLAS-Canada, est situé à Vancouver (initialement, il se trouvait à TRIUMF, mais on procède actuellement à son transfert à la Simon Fraser University). Comme on ne peut pas interrompre l’exploitation d’un site de niveau 1 pendant la prise de données 2 du LHC, les installations à TRIUMF demeureront disponibles pendant la période de transition. TRIUMF continuera de participer à l’exploitation du site de niveau 1, mais une entente de niveau de service est en train d’être conclue avec Calcul Canada. La collaboration ATLAS-Canada exploite également des centres de calcul haute performance de niveau 2 à diverses installations exploitées par un consortium universitaire à McGill, SFU, Toronto et Victoria, et utilisant essentiellement les ressources de Calcul Canada. Ces ressources sont en mesure d’effectuer les calculs intenses et poussés requis pour l’analyse des données et la simulation d’événements de collision. De nombreuses universités soutiennent également des grappes de calcul locales visant à répondre aux besoins informatiques courants des chercheurs de leurs propres établissements. HEPnet/Canada administre les activités soutenues par le CRSNG en matière de planification, de supervision et de facilitation des réseaux nationaux et internationaux pour la communauté canadienne de la physique subatomique, par l’intermédiaire de CANARIE. Cela comprend l’établissement de connexions entre les sites canadiens de niveau 2 du programme ATLAS et les chercheurs des universités, ou encore avec le centre de calcul de niveau 1 ATLAS à TRIUMF.

Instituts et laboratoires à l’étranger

La science a joué un rôle crucial dans l’unification de l’Europe en démontrant son utilité comme outil de paix et de coopération, grâce à l’établissement de nombreuses collaborations scientifiques fructueuses qui transcendent les frontières nationales. Un exemple manifeste est le laboratoire CERN situé sur la frontière franco-suisse, près de Genève. Cette organisation internationale est à l’avant-scène de la recherche fondamentale en physique nucléaire et des particules, et elle reçoit actuellement quelque 11 000 utilisateurs provenant de 100 pays. Le CERN a été fondé par 12 pays européens en 1954. Ces pays sont devenus les membres fondateurs du Conseil du CERN, l’organisme qui dirige le développement de la physique des particules en Europe et où sont maintenant représentés 21 États membres. La structure du conseil a été un élément clé du succès de la recherche en physique subatomique en Europe, permettant la planification à long terme des projets et l’engagement des États membres envers ceux-ci. Par exemple, le Grand collisionneur de hadrons (en l’occurrence, des collisions protons-protons) et ses détecteurs au CERN ont nécessité plus de deux décennies de travaux depuis leur conception jusqu’à leur mise en service, et la coordination des efforts de plus de 10 000 ingénieurs et scientifiques pour leur construction et leur exploitation. Il est intéressant de constater que cette approche internationale en matière de science collaborative, inspirée par le CERN, sert maintenant de modèle ailleurs dans le monde, comme en fait foi l’intention de Fermilab aux États-Unis de concevoir le projet LBNF/DUNE en tant que collaboration internationale dès le début.

Depuis sa création, le CERN a joué un rôle prépondérant dans l’établissement des assises du modèle standard en physique des particules. On y a détecté directement les messagers de la force faible fondamentale (les bosons W et Z) en 1983. Au cours des années 1990, on y a scruté la force électrofaible fondamentale à un nouveau niveau de précision grâce au collisionneur LEP. Puis récemment en 2012, on y a découvert le boson de Higgs grâce au LHC. Ces succès ont assis la réputation internationale du CERN. Les contributions du CERN à la physique fondamentale ont également eu des retombées majeures en innovation technologique dans divers domaines, dont les thérapies contre le cancer, l’imagerie médicale et industrielle, le traitement par rayonnement, l’électronique, les instruments de mesure, de nouveaux procédés et matériaux de fabrication, et la technologie de l’information, et c’est également au CERN que le World Wide Web a vu le jour.

Vu la profondeur et l’ampleur de son programme scientifique, le CERN est sans conteste le principal laboratoire en physique des particules au monde. Il jouit d’une réputation enviable en termes de recherche, de découverte et de collaboration scientifique internationale. C’est un modèle de partenariats productifs et novateurs avec l’industrie, et il offre un canal pour les petites et moyennes entreprises qui désirent percer le secteur industriel de la haute technologie en Europe. Enfin, le CERN est un haut lieu de formation pour la prochaine génération de chercheurs et d’innovateurs en science, leur fournissant les connaissances et les occasions d’entreprendre leurs propres carrières dans l’industrie ou le milieu universitaire.

Le Canada a contribué grandement aux expériences du CERN pendant plusieurs décennies, mais il n’a pas encore de relation officielle en tant qu’État avec celui-ci. La participation passée des scientifiques canadiens au CERN s’est faite sous forme de contributions en nature aux diverses expériences auxquelles prenaient part les chercheurs canadiens (il existe un protocole d’entente avec l’expérience ATLAS) et aux installations d’accélération du LHC (TRIUMF a fourni d’importantes contributions en nature à la construction du LHC, qui ont mené à la participation canadienne à l’expérience ATLAS, et a conclu une entente de coopération avec le CERN, en cours de renégociation). Les investissements du Canada dans le programme scientifique du CERN ont en grande partie permis aux chercheurs canadiens de participer à l’entreprise de recherche du CERN : on a estimé qu’en 2013, quelque 70 professeurs canadiens, 30 stagiaires postdoctoraux et 80 étudiants des cycles supérieurs ont participé aux divers programmes de physique expérimentale et théorique du CERN.

Le CERN est sur le point d’entreprendre de nouveaux programmes, lesquels comprennent des projets présentant un grand intérêt scientifique pour les Canadiens (par exemple, l’expérience ATLAS avec le LHC haute luminosité, l’expérience ALPHA‑g, l’expérience de désintégration rare des kaons NA62, la R et D concernant les accélérateurs, les futurs projets d’ions radioactifs et la poursuite de la collaboration en recherche théorique). Le moment est donc particulièrement propice pour que le Canada officialise sa présence scientifique à l’étranger en concluant des ententes avec le CERN. On peut y parvenir dans le cadre d’accords bilatéraux. Par ailleurs, le Canada pourrait aussi devenir membre associé au CERN. À ce titre, le Canada pourrait participer aux réunions du Conseil et des comités du CERN, disposant ainsi d’une place à cette instance internationale. L’industrie canadienne aurait également accès aux contrats de 300 à 400 millions de dollars octroyés par le CERN chaque année, ainsi qu’aux centres d’incubation d’entreprise du CERN qui ciblent de façon proactive des entreprises nouvelles et émergentes pouvant commercialiser les développements technologiques du CERN. De plus, les chercheurs canadiens pourraient accéder aux postes scientifiques ouverts seulement aux ressortissants des membres associés, ainsi qu’aux possibilités de formation et de perfectionnement des compétences techniques et scientifiques offertes aux étudiants et chercheurs en début de carrière. Le coût d’adhésion à titre de membre associé est environ 10 % du coût d’adhésion en tant que membre à part entière, ce qui, pour un pays comme le Canada, représenterait environ 10 millions de dollars par année. Ces fonds ne peuvent être attribués directement à même l’enveloppe actuelle de financement en physique subatomique du CRSNG, et devraient provenir d’autres sources gouvernementales.

Recommandation stratégique :

Les représentants du gouvernement du Canada, des organismes de financement et des autres parties intéressées dans les universités, les instituts et les laboratoires du Canada, ainsi que les partenaires industriels, sont instamment priés d’établir des relations plus officielles entre le Canada et le CERN.

Le Jefferson Laboratory (communément connu sous le nom JLab), pouvant produire des faisceaux d’électrons à des énergies comprises entre 1 et 12 GeV d’une qualité et d’une stabilité sans précédent, est l’une des principales installations mondiales ouvertes aux utilisateurs en physique nucléaire, soit quelque 1 400 personnes. Plusieurs groupes d’expérimentateurs et théoriciens canadiens y effectuent des recherches, ce qui représente le plus important noyau de chercheurs canadiens en physique nucléaire à l’étranger. Les Canadiens représentent d’ailleurs le troisième contingent étranger le plus important au JLab, après les Français et les Italiens.

L’accélérateur linéaire (LINAC) d’électrons à supraconducteurs, ondes stationnaires et haute luminosité au JLab vient d’être amélioré, son énergie maximale de faisceau étant passée de 6 GeV à 12 GeV, ce qui ouvre de nombreuses possibilités de recherche en physique, et dont l’intérêt a été jugé très élevé par une foule d’examens scientifiques. Les Canadiens jouent un rôle de premier plan dans diverses expériences qui mesurent la QCD de précision, les facteurs de forme des hadrons et la physique électrofaible, y compris les expériences GlueX, PREX/CREX, Qweak et MOLLER.

Au cours de la dernière décennie, les Canadiens ont grandement contribué à la mise en place de nouveau matériel dans les halls A, C et D, et cet équipement sera mis en service et utilisable avec les faisceaux d’ici un à deux ans. Les contributions canadiennes au programme de physique à 6 GeV au JLab ont eu un fort impact, et ce leadership a été encore plus visible pour les aspects les plus prioritaires du programme de JLab à 12 GeV. Les investissements dans le programme scientifique du JLab se sont avérés des plus rentables, permettant aux Canadiens d’avoir accès à des installations uniques de calibre mondial qui n’existent pas au Canada.

 

Salle de commande principale à T­RIUMF.

© Paul Joseph et TRIUMF

Salle de commande principale à TRIUMF.

Au Japon, le KEK, l’organisation chargée de la recherche avec les accélérateurs de haute énergie, a été établi en 1997 après la réorganisation de plusieurs instituts et laboratoires, y compris le Laboratoire national de la physique des hautes énergies (également appelé KEK, établi en 1971). Le KEK offre les accélérateurs de particules et autres infrastructures nécessaires aux recherches en physique des hautes énergies, sur les matériaux, en science de la vie et dans d’autres domaines scientifiques au Japon. Il a récemment reçu les plus hautes distinctions pour ses contributions à l’élucidation des oscillations de neutrinos. En effet, c’est à ce laboratoire que l’on retrouve les installations qui ont permis la réalisation des travaux récompensés par le Prix Nobel de physique 2015 et le Breakthrough Prize in Fundamental Physics 2016. Il possède deux campus : le laboratoire KEK à Tsukuba et l’installation J‑PARC à Tokai.

Le laboratoire KEK, qui compte actuellement quelque 900 employés, a été l’hôte de plusieurs expériences au fil des ans, dont certaines dans le cadre d’importantes coopérations internationales. Au titre de ses réalisations scientifiques récentes, mentionnons l’expérience K2K avec des neutrinos à grande distance, la mesure des oscillations des neutrinos (programme réalisé en 2004) et l’expérience Belle à l’aide de l’anneau de stockage e+e- KEKB (usine de hadrons B) (expérience terminée en 2010). L’amélioration de l’expérience SuperKEKB/Belle II a été approuvée en 2010, et atteindra sa pleine capacité opérationnelle au cours du présent plan quinquennal. Le KEK espère également recevoir le collisionneur linéaire international ILC, un projet d’accélérateur e+e- auquel collaborent quelque 300 universités et laboratoires du monde entier.

L’installation J‑PARC est un projet conjoint entre le KEK et l’Agence japonaise de l’énergie atomique. L’installation renferme un accélérateur de protons à haute énergie, dont la construction a été réalisée en 2009. C’est un laboratoire pluridisciplinaire dont les applications touchent la physique fondamentale nucléaire et des particules, les sciences des matériaux et celles de la vie, ainsi que la technologie nucléaire. En particulier, le principal anneau de protons de 50 GeV d’énergie sert à créer les faisceaux de neutrinos dirigés vers le laboratoire Super-Kamiokande 300 km à l’ouest, et utilisés par l’expérience T2K à grande distance.

Au cours des récentes années, le Canada a apporté une grande contribution au programme du KEK en physique des neutrinos, devenant membre clé de l’expérience T2K, et contribuant également à la ligne de faisceau de neutrinos et à la télémanipulation de la cible de neutrinos. Le Canada accroît actuellement sa participation à un important effort de collaboration en physique des hadrons B dans le cadre de l’expérience Belle II, après avoir acquis une expertise en physique des hadrons B avec l’expérience BaBar au laboratoire SLAC, aux États-Unis. Les physiciens canadiens qui ont participé à l’expérience BaBar peuvent, à juste titre, se féliciter d’avoir contribué aux travaux récompensés par le Prix Nobel de physique 2008 en ayant confirmé expérimentalement les prédictions relatives à la nature de l’interaction faible et à l’asymétrie matière-antimatière. En outre, une petite équipe de physiciens canadiens participe sur une base continue aux travaux de R et D pour l’ILC, en vue d’une décision au sujet de l’avenir de ce programme. Les laboratoires TRIUMF et KEK ont conclu un protocole d’entente et de coopération sur des projets d’intérêt mutuel couvrant « les échanges universitaires et la recherche conjointe », y compris la recherche à l’appui de l’expérience T2K, le LHC, les sciences moléculaires et des matériaux, l’étude des symétries fondamentales en physique des particules, l’expérience Belle II, la science des isotopes rares et l’installation UCN à TRIUMF, dans laquelle le KEK a récemment fait des investissements. TRIUMF et KEK ont récemment établi des bureaux mutuels dans le laboratoire du partenaire : en effet, au KEK, le bureau des chercheurs canadiens soutient leur contribution aux installations KEK et J‑PARC, et à TRIUMF le bureau de KEK et des autres chercheurs japonais soutient leurs activités à TRIUMF.

Les Canadiens ont accès aux installations internationales partout dans le monde, même à une station au pôle Sud, en Antarctique. La station Amundsen-Scott offre une excellente infrastructure pour les activités scientifiques au pôle Sud, y compris l’installation IceCube, le premier détecteur mondial de neutrinos à l’échelle du kilomètre cube. Le laboratoire de l’expérience IceCube renferme les systèmes d’alimentation électrique, de communication et d’acquisition des données pour l’ensemble des détecteurs, lesquels consistent en un réseau principal conçu pour détecter les neutrinos les plus énergétiques, et deux sous-réseaux, IceTop et DeepCore, qui sont le prolongement d’IceCube aux basses énergies, et qui ont grandement élargi les possibilités de recherche en physique.

La détection récente de neutrinos hautement énergétiques d’origine astrophysique par IceCube, ainsi que la mesure des oscillations de neutrinos et les recherches de matière sombre avec DeepCore, ont mené la collaboration IceCube à étudier des prolongements possibles de l’expérience IceCube, en augmentant sa performance aux basses et hautes énergies. Aux hautes énergies, on étudie actuellement un projet de détecteur élargi dans les profondeurs de la glace, et un réseau de surface amélioré pour détecter les gerbes de rayons cosmiques qui produisent les neutrinos atmosphériques. Aux basses énergies, l’expérience PINGU a été conçue comme partie intégrante d’IceCube, et elle en prolonge le programme scientifique aux basses énergies, mais en utilisant les mêmes techniques et équipements de base que les extensions aux hautes énergies. Les chercheurs canadiens ont joué un rôle prépondérant et visible dans une large gamme d’activités de recherche aux basses et hautes énergies à cette installation.

Les contributions canadiennes à quelques-unes des installations décrites ci-dessous peuvent être de moindre importance, mais ont néanmoins un impact important au sein de ces collaborations. Il s’agit souvent d’efforts complémentaires qui permettent d’élargir ou de diversifier la recherche nucléaire au Canada, et d’accroître la visibilité internationale des chercheurs canadiens et leurs possibilités de collaborations.

Les faisceaux d’isotopes rares produits par fragmentation de projectiles « en vol » aux installations comme le Centre de recherche Helmholtz sur les ions lourds GSI (GSI-FAIR, Allemagne) et l’installation de faisceaux d’ions radioactifs RIBF-RIKEN (Japon) offrent des capacités complémentaires pour ce qui est d’étudier ces réactions, par rapport à la méthode de production ISOL employée au laboratoire ISAC. Un chercheur canadien est le porte-parole pour plusieurs expériences qui utilisent le séparateur de fragments au GSI, lequel vient d’entreprendre un important projet d’agrandissement de ses installations. Le chercheur canadien qui y participe est le coordonnateur de la poursuite de ces expériences au sein de la collaboration SuperFRS. Les expériences actuelles et futures réalisées au centre RIKEN, avec la participation et le leadership de chercheurs canadiens, portent sur divers sujets : les noyaux extrêmement riches en neutrons ou en protons grâce au spectromètre de rayons gamma EURICA; les neutrons bêta retardés dans le cadre d’un projet RIKEN qui deviendra opérationnel en 2016; la structure des couches et la répartition des nucléons; la spectroscopie des éléments super lourds par rayons X en faisceau, une nouvelle technique permettant de marquer la production des éléments super lourds, ainsi que l’étude des hauteurs de barrière de fission dans les noyaux riches en neutrons.

 

Chercheurs travaillant sur le réseau de détecteurs D­ESCANT à T­RIUMF.

© Paul Joseph et TRIUMF

Chercheurs travaillant sur le réseau de détecteurs DESCANT à TRIUMF.

Le spectromètre de masse du piège de Penning canadien est opérationnel à l’Argonne National Laboratory depuis 2001. Ces études sont également complémentaires à celles qui sont réalisées au centre ISAC. À l’heure actuelle, le piège de Penning canadien est exploité avec la ligne de faisceau à basse énergie de CARIBU, ce qui donne la possibilité d’accéder à des ions lourds rares qui n’étaient auparavant pas disponibles pour les études. D’ici un à deux ans, le piège de Penning canadien devrait être transféré à un nouvel emplacement où on pourra exploiter des faisceaux accélérés, à haute intensité et haute énergie.

Le Mainz Microtron produit des faisceaux d’électrons atteignant une énergie de 1,6 GeV. Utilisant un faisceau de photons marqué et polarisé, une cible à « spin gelé » et des détecteurs à grand angle d’ouverture, l’installation MAMI‑A2 offre une capacité unique de mesure de haute précision de la structure des nucléons. Au cours de la période de 2009 à 2014, alors que le programme expérimental du JLab a progressivement pris fin pendant les travaux de montée en énergie du faisceau à 12 GeV, les Canadiens ont accru leurs efforts de recherche à l’installation Mainz. Cependant, le complexe d’accélérateurs MAMI terminera probablement ses activités au cours des cinq à sept prochaines années, pour être remplacé par d’autres installations. Cette phase de transition s’insère bien dans les plans des chercheurs canadiens, qui devront terminer la transition de la majeure partie de leurs travaux pour retourner au JLab d’ici la fin de la décennie. Quelques chercheurs canadiens participent également à des études fondamentales sur le neutron à l’aide de la source de neutrons de spallation (Spallation Neutron Source) à l’Oak Ridge National Laboratory. Ces travaux devraient progressivement prendre fin d’ici 2022, car on se concentrera davantage sur les expériences au JLab. Enfin, les travaux canadiens à l’installation laser à électrons libres de l’Université Duke font appel au HIGS, une source de rayons gamma de rétrodiffusion Compton qui produit des photons à des énergies comprises entre 2 et 100 MeV, à polarisation circulaire ou linéaire. Il y a eu un important investissement canadien à cet endroit sous forme d’infrastructure provenant de l’ancien Laboratoire de l’accélérateur de la Saskatchewan.

Obtenir un diplôme en physique, c’est bien plus que seulement apprendre des équations de physique et faire du travail en laboratoire. La formation fournit de solides connaissances en sciences informatiques, en mathématiques et en génie. Plus important encore, j’ai appris l’importance de la réflexion critique et comment équilibrer le travail pratique et les calculs mathématiques. L’une des meilleures expériences que j’ai eues pendant ma formation a été de contribuer à la construction du calorimètre à baril pour le projet GlueX. Je tire une grande satisfaction de savoir que j’ai contribué à construire quelque chose qui sera utilisé pour les recherches au cours des prochaines années, et que j’ai fait partie d’un projet de recherche aussi vaste qui peut avoir un impact profond en sciences. »

Shaun Krueger, M. Sc., Regina, 2013
Spécialiste en soutien logiciel, iQmetrix, Regina (Saskatchewan)

Mécanismes de financement au Canada

La recherche en physique subatomique au Canada est rendue possible surtout grâce au soutien financier du gouvernement fédéral, des provinces et d’organismes privés, et de dons de philanthropes.

Les salaires des chercheurs admissibles aux subventions sont payés par les universités, les laboratoires ou les instituts où ils travaillent. Bien que les universités soient financées par les gouvernements provinciaux, il existe également des programmes fédéraux visant à soutenir les chercheurs exceptionnels en milieu universitaire, dont le Programme des chaires de recherche du Canada et le Fonds d’excellence en recherche Apogée Canada.

Pour obtenir des subventions pour leurs programmes de recherche en physique subatomique, les chercheurs présentent au CRSNG une demande de subvention à la découverte individuelle, une demande d’équipe ou une demande de projet. Ces subventions soutiennent le personnel pour un temps limité (étudiants et stagiaires postdoctoraux) et les coûts directs de la recherche, notamment les frais de déplacement et d’entretien de l’équipement. Même si le CRSNG et certaines provinces offrent des bourses aux étudiants des cycles supérieurs, seule une faible fraction des étudiants diplômés en physique subatomique reçoivent ces subventions. Le Programme de subventions d’outils et d’instruments de recherche (OIR) permet aux chercheurs d’acheter de l’équipement de recherche à l’appui d’un ou plusieurs projets. En outre, le Programme d’appui aux ressources majeures (ARM) du CRSNG soutient les ressources humaines et techniques majeures et uniques mises à la disposition des chercheurs en physique subatomique de tout le Canada.

Depuis les années 1990, les fonds offerts par l’ensemble des programmes de subventions du CRSNG aux chercheurs en physique subatomique ont été combinés dans une enveloppe globale, et les fonds sont alloués par un comité, ce qui est différent de la pratique courante pour les autres disciplines en sciences et en génie soutenues par le CRSNG. Le recours à un seul comité d’évaluation pour l’enveloppe de la physique subatomique répond aux besoins particuliers de ce domaine, compte tenu du grand nombre d’importants projets de collaboration s’étendant sur de longues périodes dans le cadre d’engagements internationaux. Cependant, comme les projets couvrent l’ensemble du pays, l’interprétation toujours plus stricte des directives concernant les conflits d’intérêts du CRSNG a fait en sorte que les Canadiens sont maintenant minoritaires parmi les membres du comité. Par conséquent, la communauté canadienne des chercheurs a un rôle plus limité pour définir son propre avenir. L’enveloppe de financement totale a été constante au cours de la dernière décennie, se chiffrant à environ 23 millions de dollars, et elle représente actuellement 2,0 % du financement total du CRSNG en sciences et en génie.

Dans le cadre de cette enveloppe, certains programmes qui ne sont plus disponibles pour d’autres disciplines soutenues par le CRSNG existent encore. Par exemple, le Programme d’ARM permet le partage efficace de ressources uniques entre les groupes en physique subatomique au Canada, et il est important de conserver cette capacité. En 2016, les subventions d’équipe ont pris fin à l’intérieur de l’enveloppe de physique subatomique. Ces subventions permettaient à des groupes de chercheurs de poursuivre une approche thématique plutôt qu’une approche par projet unique, mais il y avait seulement deux subventions de ce type en cours en 2015. Vu la faible utilisation de cette possibilité de financement et la souplesse des autres types de subventions au sein de l’enveloppe, on a déterminé que toutes les activités qui étaient soutenues par l’entremise de subventions d’équipe pourraient l’être par des subventions individuelles ou des subventions de projet.

Recommandation stratégique :

Conserver le système d’enveloppe actuellement utilisé par le CRSNG pour la physique subatomique, y compris les subventions à la découverte d’équipe et le Programme d’appui aux ressources majeures.

En 1997, le gouvernement fédéral a créé la Fondation canadienne pour l’innovation (FCI) afin d’investir dans des installations et des équipements de pointe pour la recherche et le développement des technologies. Des concours de financement ont lieu à intervalle irrégulier, habituellement aux deux à trois ans, en fonction des fonds injectés par le gouvernement fédéral. Les grands programmes de la FCI soutiennent habituellement d’importantes dépenses en capital de plus d’un million de dollars, et exigent des fonds de contrepartie, normalement 40 % provenant de la FCI, 40 % de sources provinciales et 20 % d’autres sources. Au cours des 15 dernières années, les contributions directes de la FCI à la physique subatomique ont été importantes, soit plus de 180 millions de dollars (480 millions de dollars en tenant compte des fonds de contrepartie), ce qui représente 4,0 % de tous les investissements de la FCI au cours de cette période. Ces chiffres comprennent le financement important accordé au laboratoire ARIEL à TRIUMF, à SNOLAB et à son exploitation, ainsi qu’à l’Institut Périmètre, pour un total dépassant 120 millions de dollars (300 millions de dollars avec les fonds de contrepartie). En outre, la physique subatomique bénéficie des ressources de calcul coordonnées par l’intermédiaire de Calcul Canada, qui est financé par la FCI.

L’approbation internationale des grands projets peut prendre des années, avec la contribution des organismes de financement de chaque nation participante. Il est important que les délais parfois longs qui s’écoulent entre les concours de la FCI n’empêchent pas le Canada de participer à de tels projets. En permettant la présentation de demandes pour des projets qui n’ont pas encore été approuvés et en octroyant des subventions sous réserve de l’approbation des projets, le Canada peut jouer un rôle de premier plan en permettant aux projets d’avancer et en tirant parti efficacement du financement international.

Recommandation stratégique :

Conserver la capacité de la FCI d’étudier les demandes concernant des projets internationaux qui n’ont pas encore été approuvés, et d’offrir des subventions sous réserve de l’approbation des projets.

À l’heure actuelle, TRIUMF reçoit un financement quinquennal approuvé par le gouvernement fédéral et administré dans le cadre d’un accord de contribution avec le Conseil national de recherches Canada. Pour la période de cinq ans ayant débuté en 2015, le budget de base est de 267 millions de dollars. TRIUMF présente des demandes de fonds supplémentaires par l’intermédiaire de programmes fédéraux spéciaux.

SNOLAB reçoit actuellement son financement dans le cadre d’une combinaison de sources provinciales et fédérales, y compris le Programme des initiatives scientifiques majeures (ISM) de la FCI, qui porte expressément sur l’exploitation et la maintenance des très grandes installations. Le budget d’exploitation annuel est d’environ 16 millions de dollars, y compris un soutien en nature de la société Vale.

L’Institut Périmètre est un partenariat public-privé, actuellement financé par le gouvernement du Canada (10 millions de dollars par année), la province de l’Ontario (10 millions de dollars par année) et des fonds à peu près équivalents de sources philanthropiques privées. L’institut Périmètre présente également des demandes de fonds dans le cadre de programmes fédéraux et provinciaux spéciaux.

Enfin, l’ICPN et l’IPP sont financés par des subventions du Programme d’ARM du CRSNG et par les frais d’adhésion des établissements membres.

Au cours de ma troisième année dans le programme de physique de premier cycle à la University of Guelph, j’ai passé l’été à travailler sur le spectromètre TIGRESS (Gamma-Ray Escape-Suppression Spectrometer) de TRIUMF, à Vancouver. Les situations auxquelles j’ai été exposées à TRIUMF, comme la précision extrême requise pour la majeure partie de l’assemblage, les délais serrés pour que le projet soit opérationnel pour la première expérience à la fin de l’été et les problèmes à résoudre pendant le montage – toutes ces expériences m’ont imprégné et ne s’arrêtent pas à la science et au monde universitaire. En fait, elles m’aident énormément dans mes tâches actuelles chez Front Street Capital, où je travaille pour un très important investisseur en technologie au Canada, Frank Mersch. Ce travail consiste à constamment évaluer les entreprises qui développent de nouvelles technologies. Je comprends mieux maintenant pourquoi les processus de construction et de modification prennent autant de temps et comment de sérieux problèmes peuvent survenir, en plus de réaliser l’importance de la qualité d’une construction. »

Brent Millar, B. Sc., Guelph, 2008
Analyste, Front Street Capital, Toronto (Ontario)

Coordination du soutien en physique subatomique

Afin d’utiliser efficacement les ressources et le soutien financier offerts par plusieurs organisations indépendantes, il est essentiel de coordonner les décisions concernant les nouveaux grands projets. Pour un nouveau projet, les fonds d’immobilisation (p. ex., les fonds fournis par l’intermédiaire de la FCI) sont accordés seulement si l’on est assuré que des fonds de fonctionnement correspondants peuvent être obtenus d’autres sources (p. ex., par l’intermédiaire du CRSNG) et s’il y a suffisamment de ressources de laboratoire disponibles (p. ex., TRIUMF). Des discussions sont en cours entre des représentants du CRSNG, de la FCI, de TRIUMF et de SNOLAB afin de mieux coordonner ce soutien. Pour le prochain concours de la FCI, l’installation d’accueil doit confirmer qu’un projet est approuvé avant de présenter un avis d’intention.

Recommandation stratégique :

Coordonner les processus touchant les ressources, le financement et les approbations entre les organismes et les laboratoires qui soutiennent la physique subatomique au Canada.

La participation canadienne au processus décisionnel concernant les grandes installations internationales proposées, comme le LHC haute luminosité et la construction d’un futur collisionneur linéaire international, nécessite une coordination aux plus hauts niveaux. Ce rôle n’est actuellement pas défini au sein du gouvernement canadien. La participation du gouvernement fédéral est requise pour les discussions avec les autres gouvernements étrangers et pour assurer un financement spécial en vue de la participation canadienne à ces nouvelles installations internationales.

Recommandation stratégique :

Désigner un organisme au sein du gouvernement canadien qui serait responsable de négocier avec les instances étrangères et internationales afin de faire progresser les nouvelles initiatives scientifiques majeures.

Accroissement du financement du CRNSG en physique subatomique

Le financement de l’enveloppe du CRSNG en physique subatomique a été approximativement constant au cours de la dernière décennie, sans tenir compte de l’inflation, et ce financement est maintenant insuffisant pour maintenir le leadership canadien dans ce domaine. Dans cette section, nous indiquons pourquoi il est nécessaire d’investir davantage en raison des facteurs suivants : i) restaurer un soutien opérationnel adéquat pour les activités de recherche en cours, vu les importants investissements de la FCI; ii) préparer les chercheurs canadiens pour les prochaines grandes expériences; iii) restaurer les « fonds d’occasion » pour le démarrage de nouvelles initiatives; iv) accroître le soutien à la formation des étudiants des cycles supérieurs.

(i) Activités de recherche en cours

La création de la FCI a permis à la recherche canadienne en physique subatomique de croître, au cours d’une période où le financement de l’enveloppe du CRSNG pour la physique subatomique est demeuré constant. Comme les dépenses en capital non récurrentes ont été retirées de l’enveloppe, la répartition de l’enveloppe de physique subatomique du CRSNG selon les divers programmes a changé de façon spectaculaire. La figure 4 illustre comment le financement des coûts récurrents (chercheur individuel, projet/équipe, ARM) a augmenté au cours des 15 dernières années, tandis que le soutien offert par le Programme de subventions d’outils et d’instruments de recherche (OIR) a presque été éliminé.

La physique subatomique a eu un succès extraordinaire grâce au programme de la FCI. Les concours de la FCI sont conçus de façon à ce que 30 % des demandes soient acceptées, mais 64 % des demandes en physique subatomique au cours de la période 2009-2015 l’ont été, et 80 % des fonds totaux demandés pour ce domaine de recherche ont été octroyés. Au cours des 15 dernières années, la physique subatomique a reçu 4,0 % du financement de la FCI, alors que sa part du financement du CRSNG a été fixée à environ 2,0 %, ce qui représente moins de 1 % du financement total par les trois organismes subventionnaires. Le succès notable du programme de la FCI témoigne de l’excellence de la recherche en physique subatomique au Canada.

Les dépenses en capital de la FCI en physique subatomique ont permis à la communauté d’entreprendre plusieurs projets de recherche importants qu’il aurait été impossible, autrement, de mener à terme. Cependant, il n’y a pas eu de croissance parallèle des fonds de fonctionnement, ce qui s’est traduit par un changement important du ratio des fonds de fonctionnement sur les fonds d’immobilisation, comme l’illustre la figure 5. La physique subatomique a été touchée plus que la plupart des autres disciplines à cet égard, compte tenu de son taux de succès extraordinaire dans les concours de la FCI.

Afin de maximiser les investissements importants de la FCI dans les infrastructures de physique subatomique, les fonds de fonctionnement offerts par l’enveloppe du CRSNG doivent être augmentés. La figure 4 montre qu’il n’y a pas eu d’augmentation des fonds de fonctionnement au cours des cinq dernières années, et certaines activités sont maintenant sous-financées. Malheureusement, le problème ne se résume pas à quantifier le manque à gagner réel en termes de fraction des montants accordés par la FCI.

Figure 4 Figure 4

FIGURE 4
Fonds du CRSNG alloués aux différents programmes de subvention dans le cadre de l’enveloppe de la physique subatomique au cours des 15 dernières années. La proportion des fonds alloués aux coûts de fonctionnement récurrents (chercheur individuel, projet/équipe et ARM) a progressé de façon constante. La partie allouée aux outils et instruments de recherche (OIR) a diminué, car la FCI est devenue le principal bailleur de fonds pour les dépenses en capital.

L’analyse des domaines expérimentaux qui ont reçu un important financement de la FCI au cours de la période 2009-2015 (en l’occurrence les domaines associés aux grandes questions 1, 2, 3 et 6) indique que deux de ces domaines thématiques (questions 1 et 3) ont vu une croissance du nombre de chercheurs au cours des cinq dernières années, sans qu’il y ait eu une augmentation comparable des fonds de fonctionnement. Une somme additionnelle de 2 millions de dollars serait requise pour que l’enveloppe permette de couvrir les fonds de fonctionnement correspondant à l’accroissement des activités dans ces domaines, et pour ramener le financement du Programme d’ARM aux niveaux d’il y a cinq ans.

(ii) Préparation pour les prochaines grandes expériences

Le plan de recherche comprend le soutien de plusieurs projets qui pourraient voir le jour sous forme de projets phares. Leurs calendriers ne sont pas encore bien définis, et les chercheurs canadiens n’auront probablement pas la possibilité de participer à tous, surtout si les projets phares existants se poursuivent. Quoi qu’il en soit, il faudrait augmenter l’enveloppe afin de tenir compte des préparatifs pour certains de ces projets. Vu les données historiques concernant le soutien opérationnel à de tels préparatifs avant la « saturation » de 2010, une augmentation de l’enveloppe de 2 millions de dollars serait nécessaire sur une période de cinq ans.

Figure 5 Figure 5

FIGURE 5
Fonds de fonctionnement et d’immobilisations annuels moyens (en millions de dollars) pour la période 2001-2005 par rapport à la période 2009-2015. Les principales subventions de la FCI octroyées pour le laboratoire ARIEL, l’installation SNOLAB et son exploitation, ainsi que l’Institut Périmètre, ne sont pas incluses dans ces chiffres. Les fonds de fonctionnement (Programme de subventions à la découverte et Programme d’ARM) n’ont pas suivi la croissance importante des dépenses en capital (OIR + FCI).

Je suis originaire de la Première Nation Aundeck Omni Kaning, mais j’ai terminé mon secondaire au sein de la Nation Crie Pimichikimak. À l’Université de Winnipeg, mes nombreuses expériences de recherche dans les programmes d’été, soutenues par une bourse de recherche de premier cycle du CRSNG, ont été précieuses. Mon travail en physique subatomique expérimentale à l’Université de Winnipeg, où j’ai construit et utilisé des montages d’essai pour des détecteurs d’électrons et de protons en vue des expériences Qweak et Nab, m’a permis d’approfondir mes connaissances et de les appliquer dans des situations concrètes.

Cette expérience de recherche au cours des stages d’été m’a également aidé à acquérir de la confiance et m’a permis d’obtenir en 2010 un B. Sc. en physique de l’Université de Winnipeg, ainsi qu’un baccalauréat en mécanique et génie aérospatial de l’Université du Minnesota en 2013. Ces étés passés à l’Université de Winnipeg représentent une période décisive de ma carrière. Ils m’ont réellement aidé à trouver un domaine que j’aime et dans lequel j’excelle à construire et utiliser un équipement de haute technologie. »

Mark Abotossaway, B. Sc., Winnipeg, 2010
Ingénieur en analyse structurale, Boeing, Seattle (Washington)

(iii) Financement des nouvelles possibilités

La figure 4 montre comment le financement des coûts récurrents (subventions de chercheur individuel, de projet ou d’équipe et ARM) a augmenté de façon constante au point où il y a peu de possibilités de soutenir les efforts de R et D à petite échelle et à court terme (essentiellement par l’intermédiaire des subventions d’OIR). Auparavant, lorsque l’enveloppe permettait de financer les coûts des équipements majeurs et mineurs pour les projets, la partie affectée aux outils et instruments de recherche était suffisamment importante pour les financer. Le financement par le Programme d’OIR est particulièrement important pour les immobilisations à petite échelle ou pour soutenir la R et D nécessaire pour faire passer un grand projet à l’étape où une demande de fonds à la FCI serait appropriée.

Il est important de restaurer à un niveau suffisant les « fonds d’occasion » pour permettre le démarrage de nouveaux projets qui pourraient se muer en initiatives de recherche nouvelles et importantes. À cette fin, il faut non seulement que le financement global de l’enveloppe soit accru d’une somme appropriée, mais également que la section d’évaluation en physique subatomique reçoive suffisamment de renseignements pour s’assurer que les « fonds d’occasion » seront disponibles au cours des prochaines années. Bien que l’on convienne en général que les demandes de financement au-delà de l’année suivante doivent être prises en compte, le processus de recommandation des niveaux de financement vise plutôt à équilibrer le budget de l’exercice suivant. Les coûts récurrents pour les cinq prochaines années peuvent être estimés avant chaque concours. Disposant de cette information, la section de l’évaluation pourrait s’assurer qu’il y ait des « fonds d’occasion » pour les futurs concours, et ce, plusieurs années à l’avance. Il est manifeste cependant qu’au cours des cinq dernières années, il n’y a pas eu de telles possibilités de protéger les « fonds d’occasion », compte tenu des pressions extrêmes exercées sur l’enveloppe.

Recommandation stratégique :

Gérer avec prudence l’enveloppe du CRSNG en physique subatomique afin de permettre l’élaboration de nouveaux projets.

Par le passé, environ 5 % de l’enveloppe en physique subatomique était utilisée pour le développement de nouvelles expériences et technologies, ce qui permettait à la communauté des chercheurs d’être à niveau avec l’ensemble des projets en cours. Par conséquent, une augmentation appropriée de l’enveloppe à cette fin serait de 1 million de dollars.

 

Chercheurs assemblant le spectromètre de masse E­MMA à T­RIUMF.

© Paul Joseph et TRIUMF

Chercheurs assemblant le spectromètre de masse EMMA à TRIUMF.

(iv) Accroissement de l’appui à la formation des étudiants des cycles supérieurs

Les données de l’enquête que nous avons mentionnée à la section 4.1 indiquaient que la communauté des chercheurs est en mesure de former plus de 180 autres étudiants des cycles supérieurs. Pour augmenter de 100 le nombre d’étudiants au cours des cinq prochaines années, il faudrait un financement additionnel d’environ 2 millions de dollars par année, après cinq ans. Les catégories i) à iii) ci-dessus augmenteront les possibilités de formation à d’autres niveaux, notamment pour les stagiaires postdoctoraux.

Résumé

Le tableau III résume les augmentations recommandées pour l’enveloppe en physique subatomique au cours de la période visée par la présente planification à long terme. Ce montant représente un programme prudent et efficace, comme il est mentionné dans le mandat du Comité de planification à long terme. Une augmentation appréciable supérieure aux montants recommandés permettrait à la communauté des chercheurs en physique subatomique de participer à un plus grand nombre de grands projets et de former plus d’étudiants des cycles supérieurs et de stagiaires postdoctoraux.

Recommandation stratégique :

Accroître l’enveloppe du CRSNG en physique subatomique d’une somme de 7 millions de dollars au cours des cinq prochaines années.

2017 2021
Activités de recherche en cours 2 2
Préparation pour les prochaines grandes expériences 0 2
Financement des nouvelles possibilités 1 1
Formation des étudiants des cycles supérieurs 0 2
Augmentation totale 3 7

TABLEAU III
Augmentation recommandée (en millions de dollars) pour l’enveloppe de la physique subatomique – initialement et d’ici la fin du plan de recherche actuel. Après une augmentation immédiate de 3 millions de dollars, l’enveloppe devrait augmenter linéairement de 4 millions de dollars au cours de cette période.

6. Rendement des investissements

Étudiante de premier cycle travaillant dans le cadre son premier stage de recherche d’été à T­RIUMF.

© Paul Joseph et TRIUMF

Étudiante de premier cycle travaillant dans le cadre son premier stage de recherche d’été à TRIUMF.

Les retombées de la recherche en physique subatomique profitent aux Canadiens et aux Canadiennes de maintes façons. Le vif intérêt et la curiosité générés par les nouvelles découvertes dans ce domaine sont une source d’inspiration, et peuvent inciter les jeunes esprits talentueux à entreprendre des carrières dynamiques en sciences et en technologie. La recherche en physique subatomique est également un moteur d’innovation et de technologie pouvant ouvrir de nouvelles avenues commerciales pour le secteur privé.

Retombées culturelles : Inspirer les Canadiens

Les Canadiens se sont réjouis lorsque Arthur McDonald a obtenu le Prix Nobel de physique 2015 pour la découverte des oscillations des neutrinos. Les découvertes en physique subatomique font souvent la manchette, car elles passionnent les Canadiens. Elles suscitent la curiosité, alimentent l’intérêt du public envers la science et offrent la possibilité d’enrichir la culture scientifique au Canada. Ces retombées contribuent directement au premier objectif stratégique du Plan stratégique de 2020 du CRSNG : Favoriser une culture des sciences et du génie au Canada.

La recherche en physique subatomique contribue aux objectifs du Plan stratégique de 2020 du CRSNG :

Objectif 1
Favoriser une culture des sciences et du génie au Canada
Les étudiants en physique mentionnent souvent que les découvertes en physique subatomique et en astrophysique sont la principale raison qui les a motivés à étudier dans ce domaine. Les découvertes très médiatisées dans ces secteurs suscitent l’intérêt du public envers la science et favorisent une culture scientifique vibrante au Canada.
Objectif 2
Fournir un tremplin à la nouvelle génération
La nature hautement collaborative de la recherche en physique subatomique au Canada profite grandement aux jeunes chercheurs qui peuvent entreprendre leur carrière au sein d’un cadre structuré et profiter du mentorat offert par les chercheurs chevronnés.
Objectif 3
Bâtir une base de recherche diversifiée et concurrentielle
La recherche en physique subatomique est une vaste entreprise mondiale et pluridisciplinaire, et est mue par la découverte. Ce domaine offre de nombreuses possibilités de formation pour établir cette base de recherche.
Objectif 4
Renforcer la dynamique entre la découverte et l’innovation
La physique subatomique est une source d’innovations technologiques, et elle offre d’importantes possibilités de développement de technologies commercialisables. Ces travaux mènent à la création de nouvelles entreprises qui sont des moteurs économiques, créateurs d’emplois. Le personnel hautement qualifié formé en physique subatomique est bien équipé pour occuper une grande diversité de postes dans le secteur de la haute technologie.
Objectif 5
Prendre le virage mondial
La physique subatomique est déjà une entreprise mondiale, et les Canadiens participent à des collaborations internationales au Japon, au pôle Sud, au Grand collisionneur de hadrons à Genève, et ailleurs. La présence au Canada d’installations uniques, comme TRIUMF, SNOLAB et l’Institut Périmètre, attire ici au pays les meilleurs chercheurs du monde.

La physique subatomique inspire les étudiants et les amène à entreprendre des carrières en sciences. Un rapport récent de l’Institute of Physics intitulé « Particle physics – it matters » décrit une enquête réalisée auprès d’étudiants en physique dans les universités britanniques. Les étudiants mentionnaient constamment que la physique subatomique et l’astrophysique étaient les sujets les plus populaires qui attirent les jeunes à entreprendre des études en physique.

Pour jauger la soif du public à l’égard des connaissances en physique subatomique, il suffit de constater le succès impressionnant des événements et programmes de vulgarisation scientifique présentés par l’Institut Périmètre, TRIUMF, SNOLAB et les universités partout au Canada et qui visent à promouvoir la science et à stimuler le sens de la curiosité des Canadiens et des Canadiennes. En Colombie-Britannique, TRIUMF et les universités UBC et SFU présentent conjointement des Conférences du samedi sur les frontières de la physique moderne. La visite des installations de TRIUMF a attiré 1 900 personnes du grand public en 2015. SNOLAB n’est pas en reste : la visite de ses installations souterraines a attiré 500 personnes en 2015.

Les étudiants du secondaire sont eux aussi encouragés à entreprendre des carrières en science et en recherche. TRIUMF, la University of Victoria, la Simon Fraser University et l’Université McGill présentent chaque année des classes de maître en physique des particules, et à cette occasion les étudiants du secondaire deviennent des physiciens des particules pour une journée et analysent des données réelles provenant de l’expérience ATLAS. SNOLAB présente également un programme semblable de classes de maître. De plus, TRIUMF parraine un programme de bourses à l’intention des étudiants du secondaire, qui comporte un stage de recherche expérimentale de six semaines à TRIUMF. Quant aux laboratoires, ils soutiennent la formation des enseignants du secondaire. Par exemple, en 2015, SNOLAB a invité le lauréat du Prix d’excellence en enseignement de la physique au secondaire et au collégial, décerné par l’Association canadienne des physiciens et physiciennes, à venir travailler pendant une semaine avec des chercheurs sur diverses expériences en cours. Le programme de vulgarisation de l’Institut Périmètre rejoint un nombre impressionnant d’élèves du primaire et du secondaire, en mettant à la disposition de leurs enseignants des activités en physique bien conçues pour les présentations en classe. Enfin, l’utilisation des nouveaux médias par l’Institut Périmètre, TRIUMF et SNOLAB pour accroître l’intérêt du public envers la science est fort impressionnante.

Retombées pour l’éducation : Formation d’un personnel hautement qualifié

Pour répondre aux grandes questions en physique, il faut former un personnel hautement qualifié (PHQ). Constitué d’étudiants du premier cycle et des cycles supérieurs et de stagiaires postdoctoraux, ce personnel hautement qualifié contribue, par ses idées novatrices, aux travaux de conception, de montage et d’exploitation des expériences et des installations en physique subatomique. De plus, il participe à la conception des algorithmes permettant de détecter les signaux de physique subtils dans les données recueillies, à l’analyse statistique des résultats et à la création de simulations numériques visant à confronter les attentes théoriques et la réalité. La formation du PHQ en physique subatomique consiste à faire participer les étudiants du premier cycle et des cycles supérieurs aux programmes de recherche, et à employer des titulaires de doctorat en début de carrière ainsi que du personnel technique à toutes les étapes de leur carrière. D’autres possibilités de formation sont offertes aux étudiants des cycles supérieurs dans les écoles d’été comme le programme TSI à TRIUMF et le programme TRISEP, une école d’été canadienne offerte par trois établissements en physique des particules élémentaires et organisée chaque année par l’Institut Périmètre, SNOLAB et TRIUMF.

Le tableau IV présente un aperçu du nombre moyen actuel d’étudiants à la maîtrise et au doctorat en physique subatomique au Canada, par professeur équivalent temps plein. Ces données sont réparties d’après le type de recherche des superviseurs de thèse. Ces chiffres sont tirés de l’enquête réalisée auprès de la communauté des chercheurs, décrite à la section 4. Les 171 répondants de l’enquête assurent actuellement la formation d’un nombre moyen d’environ 2,1 étudiants des cycles supérieurs par professeur, le rapport des étudiants au doctorat sur ceux à la maîtrise étant de 3 sur 2. Selon les données de l’enquête, la communauté des chercheurs serait en mesure de former environ 80 % plus d’étudiants si elle disposait de fonds additionnels.

Type de recherche M. Sc. / ETP Ph. D. / ETP Total / ETP
Théorie 0,9 1,3 2,2
Expérience 0,8 1,3 2,1
Global 0,9 1,3 2,1

TABLE IV
Nombre moyen d’étudiants à la maîtrise et au doctorat actuellement formés en physique subatomique au Canada, par professeur équivalent temps plein (ETP), réparti par type de recherche des superviseurs.

Une étude a été réalisée au sein de la collaboration ATLAS-Canada au sujet des cheminements de carrière des étudiants et des stagiaires postdoctoraux qui ont obtenu leur diplôme ou qui ont terminé leur contrat afin de déterminer quelle était leur contribution à la société. Depuis le début de la collaboration ATLAS-Canada en 1992, le nombre total de tous les étudiants à la maîtrise, des doctorants et des stagiaires postdoctoraux qui ont été formés ou qui sont en formation dépasse 300 personnes, réparties à peu près également entre les trois catégories (maîtrise, doctorat, stages postdoctoraux). La majeure partie de la formation des étudiants aux cycles supérieurs a eu lieu depuis le début de l’exploitation du LHC en 2009. En analysant le nombre de diplômes octroyés ou de postes de stagiaires postdoctoraux terminés et pour lesquels on disposait de renseignements pour cinq ans jusqu’à l’automne 2014, on obtient la répartition suivante des activités subséquentes réalisées par ce PHQ :

  • 70 % des étudiants à la maîtrise ont poursuivi leurs études au doctorat (la plupart demeurant dans le même domaine), tandis que les 30 % restants ont trouvé un emploi en recherche, dans l’industrie ou en éducation.
  • 40 % des étudiants au doctorat sont demeurés en recherche, 30 % ont trouvé un emploi dans l’industrie, 20 % sont devenus des enseignants et les 10 % restants ont trouvé un emploi dans d’autres domaines.
  • 70 % des stagiaires postdoctoraux ayant reçu une formation sont demeurés en recherche, 20 % ont trouvé un emploi dans l’industrie, tandis que les 10 % restants ont trouvé un emploi dans d’autres domaines.

En guise de conclusion, presque tout le personnel formé dans le cadre de la collaboration ATLAS-Canada est demeuré en recherche ou a trouvé un emploi en éducation ou dans l’industrie. Ce type de données, couvrant l’ensemble de la communauté des chercheurs en physique subatomique, serait utile pour faire un suivi du cheminement professionnel dans toute la discipline.

Retombées technologiques : Applications de la physique subatomique

La recherche en physique subatomique a des retombées dans de nombreux domaines connexes. Mentionnons-en quelques-uns : les technologies d’imagerie en médecine nucléaire, le traitement du cancer, la stérilisation du sang et de divers dispositifs médicaux, la diagraphie des puits de pétrole, l’implantation d’ions dans les semi-conducteurs, les détecteurs de fumée courants, les analyses médico-légales, la surveillance des cargaisons pour détecter la contrebande et, bien sûr, la production commerciale d’électricité.

Un programme actif de recherche en physique subatomique offre les outils nécessaires pour répondre rapidement aux situations d’urgence, comme la crise des isotopes médicaux il y a quelques années. À la fin de 2007, le monde a connu pendant plusieurs semaines une pénurie grave de molybdène 99 (99Mo), un isotope médical, en raison de l’arrêt prolongé du réacteur NRU d’EACL à Chalk River (Ontario). En raison de cette pénurie, il a fallu reporter, voire annuler, de nombreux essais visant à diagnostiquer des maladies potentiellement mortelles chez des dizaines de milliers de patients aux États-Unis et au Canada. Les chercheurs canadiens œuvrant dans plusieurs domaines (physique subatomique, physique des accélérateurs, physique médicale) ont proposé diverses solutions pour relancer la production des isotopes médicaux (mentionnons notamment le rapport Making Medical Isotopes, Report of the Task Force on Alternatives for Medical-Isotope Production produit par le comité AAPS de TRIUMF). Des programmes de recherche, soutenus par RNCan et les IRSC, ont été couronnés de succès. Deux groupes de chercheurs en physique subatomique et en physique des accélérateurs ont été soutenus par le Programme d’accélération des technologies des isotopes (PATI) de RNCan en 2013 : le consortium CycloMed99 et la Prairie Isotope Production Enterprise (PIPE). En février 2015, l’équipe CycloMed99 a obtenu le Prix Brockhouse du Canada décerné par le CRSNG pour la recherche interdisciplinaire en sciences et en génie. Son succès incroyablement rapide n’aurait pas été possible sans la contribution des chercheurs en physique subatomique.

L’obtention d’un diplôme en physique nucléaire m’a permis d’apprendre beaucoup, non seulement en physique, mais également en sciences informatiques, en mathématiques, en génie électrique et civil et dans d’innombrables autres domaines. L’approche multidisciplinaire pour résoudre des problèmes est exactement le type de formation qui a mené à mon emploi dans l’industrie canadienne de la technologie nucléaire. Je suis à peu près certain que peu de programmes universitaires, voire aucun, n’auraient pu me préparer aussi bien pour les tâches que je réaliserai dans mon nouveau poste chez Bubble Technology Industries Inc. »

Scott MacEwan, Ph. D., Manitoba, 2015
Chercheur, Bubble Technology Industries, Chalk River (Ontario)

La disponibilité de nouveaux isotopes ouvre des possibilités nombreuses et nouvelles pour la thérapie et l’imagerie. La recherche à TRIUMF porte maintenant sur de nouveaux isotopes émetteurs de particules alpha comme 211At et 225Ac, produits aux laboratoires ISAC et ARIEL et qui seraient utilisables pour la cancérothérapie. Il est possible d’étudier la fonctionnalité de ces isotopes à l’aide de 209At, un émetteur de rayons gamma pouvant être utilisé pour l’imagerie fonctionnelle.

Selon le document du CERN intitulé Accelerating science and innovation – Societal benefits of European research in particle physics, le marché de l’imagerie nucléaire en médecine représente un chiffre d’affaires estimé à 15 milliards de dollars par année, avec un taux de croissance annuel de 10 %. Les isotopes médicaux produits à l’aide des accélérateurs et les technologies d’imagerie sont des domaines importants où la communauté canadienne des chercheurs en physique subatomique est sur le point d’avoir un impact soutenu.

La recherche en physique subatomique est gourmande en calculs et en réseaux. C’est pourquoi la communauté des chercheurs a été à la fine pointe des innovations dans ce domaine et a grandement contribué au calcul en réseau, à l’exploration des données et au stockage en nuage. Il suffit de mentionner l’exemple bien connu de l’invention du World Wide Web – le Web – au CERN, pour résoudre de nombreux problèmes de partage de l’information créés par les collaborations mondiales en physique subatomique. Le document du CERN mentionné au paragraphe précédent décrit en détail les retombées de cette recherche sur l’industrie internationale. Le World Wide Web engendre pour quelque 2 300 milliards de dollars en activités commerciales par année, un rendement exceptionnel par rapport à la somme de 1,5 milliard de dollars environ dépensée annuellement pour le CERN et les 200 autres accélérateurs de particules de recherche dans le monde. Le World Wide Web est maintenant considéré comme un outil essentiel au développement durable partout dans le monde. Par exemple, les objectifs de développement durable de l’ONU pour 2016-2030 comprennent le taux d’utilisation d’Internet (utilisation pondérée par 100 personnes) comme indicateur de développement mondial des infrastructures. En 2010, le calcul en nuage et en réseau représentait une industrie de 50 millions de dollars. Aujourd’hui, ces industries sont devenues énormes, et de nombreuses entreprises s’appuient sur ces ressources pour fonctionner au quotidien. Le calcul en réseau de niveau 1 est une expertise propre à l’industrie canadienne du calcul haute performance. De nouvelles avancées dans l’informatique en nuage sont également réalisées en physique des particules.

La production d’accélérateurs représente une industrie mondiale de 2 milliards de dollars, plus de 1 000 accélérateurs étant vendus chaque année pour une foule d’applications, allant du traitement des semi-conducteurs à la production d’isotopes de courte vie pour l’imagerie médicale, et de la spectroscopie de masse à la radiothérapie. La valeur collective des produits réalisés grâce à la technologie des accélérateurs, y compris la production d’isotopes utilisés pour déterminer l’âge et l’origine des matériaux, pour étudier le comportement des défauts et des impuretés des matériaux et pour les applications médicales, a été estimée à plus de 500 milliards de dollars par année. Le Canada est l’un des six pays possédant une capacité industrielle de production des cavités radiofréquences supraconductrices (SRF) requises pour les accélérateurs de particules. Ces cavités ont des applications non seulement dans les installations de recherche comme TRIUMF, mais également dans divers domaines, dont l’énergie, la défense, l’aviation, l’aérospatiale et la recherche, car elles offrent différentes possibilités, notamment la soudure de haute précision des métaux par faisceaux d’électrons et la protection de l’environnement grâce au remplacement de substances chimiques par des électrons pour traiter les gaz de carneau qui sont émis par les centrales au charbon. Le Canada a pu développer sa capacité de production de cavités SRF grâce aux travaux pionniers réalisés à TRIUMF, qui a ensuite travaillé avec PAVAC Industries Inc. pour transférer efficacement cette technologie à l’industrie.

Un autre exemple est la longue série de succès du Canada dans le domaine de l’énergie nucléaire. Les réacteurs CANDU ont été élaborés au cours des années 1950 et 1960, et ce type de réacteur est toujours utilisé de nos jours. Les chercheurs canadiens dans le secteur nucléaire assument un rôle de premier plan dans le cadre d’un projet de recherche coordonnée lancé récemment par l’Agence internationale de l’énergie atomique et portant sur le développement d’une base de données de référence pour l’émission bêta-retardée de neutrons. Ce programme a une incidence directe sur les connaissances et les capacités de calcul dans les domaines de l’énergie nucléaire, des garanties, de la gestion du combustible usé et des déchets, et des sciences nucléaires. La technologie SRF pourrait également être utilisée pour les réacteurs alimentés par les accélérateurs de génération IV, un projet auquel participe déjà la société PAVAC.

Ce ne sont que quelques-unes des retombées de la recherche en physique subatomique fondamentale au Canada, laquelle continue de profiter grandement à l’ensemble de la société.

Retombées économiques directes : Liens avec l’industrie

La recherche en physique subatomique est un moteur d’innovation, de création d’entreprises et de nouvelles possibilités pour l’industrie canadienne. Tout cela contribue à créer des emplois et favorise le développement économique dans le secteur de la haute technologie. Dans les pages qui suivent, nous présenterons des entreprises et des nouveaux produits qui illustrent bien le lien direct entre la recherche en physique subatomique et le développement technologique au Canada.

MODCC : Dans le monde entier, l’industrie minérale recueille constamment des données afin de prendre des décisions sur diverses questions : où rechercher les minéraux, quels métaux et minéraux doit-on exploiter, où doit-on établir la mine, à quelle cadence doit-on l’exploiter, comment doit-on la concevoir et la construire? Ces données sont obtenues au moyen d’une foule d’activités, notamment l’exploration, les levés, le forage, le sautage, le titrage, le transport du minerai extrait jusqu’au broyeur, la caractérisation de la géologie de la mine, et les travaux de planification de la mine, entre autres. Les outils d’analyse de données et l’expertise développés à SNOLAB peuvent être utilisés pour traiter ces données. En 2013, le Mining Observatory Data Control Centre (MODCC) a été créé dans les installations de surface de SNOLAB. Le projet MODCC, d’une durée de quatre ans et financé à raison de 2 425 000 $, est le résultat d’un partenariat entre le Centre d’excellence en innovation minière (CEMI), SNOLAB, le Conseil canadien de l’innovation minière (CCIM) et la Société de gestion du Fonds du patrimoine du Nord de l’Ontario (SGFPNO). Les analystes utiliseront les techniques d’analyse des données mises au point à SNOLAB pour concevoir des outils permettant d’utiliser ces données pour les industries de l’exploration et de l’exploitation minières.

Bubble Technology Industries Inc. : BTI est une société de technologie spécialisée dans le domaine de la détection du rayonnement et des explosifs. Cette société offre des produits commerciaux, des services de détection de rayonnement, d’expertise-conseil et de R et D sous contrat à un large éventail de clients, y compris des organismes d’application de la loi et de première intervention, des groupes œuvrant dans le domaine de la défense et de l’espace, des organes de réglementation et de normalisation internationale, des établissements de recherche et des agences de sécurité nationale. Les sociétés comme BTI sont souvent à la recherche des compétences acquises par le PHQ dans la recherche en physique subatomique expérimentale. Plusieurs diplômés récents dans ce domaine, de très haut niveau, ont entrepris des carrières réussies dans le secteur privé, notamment chez BTI (voir un exemple à la section 6.5).

 

© Paul Joseph et TRIUMF

AAPS : La société AAPS (Advanced Applied Physics Solutions Inc.), issue de TRIUMF, a été établie en centre d’excellence en commercialisation et en recherche (CECR) au printemps 2008, dans le cadre des Réseaux de centres d’excellence. Depuis, AAPS n’obtient plus de fonds du Programme des CECR et a lancé cinq entreprises : ARTMS Products, CRM Geotomography Technologies, Frontier Sonde Inc., IKOMED et Micromatter Technologies.

ARTMS Products Inc. : ARTMS a été créée à titre d’entreprise commerciale à la suite de recherches réalisées avec succès par la collaboration CycloMed99, un consortium national dirigé par TRIUMF et soutenu par le Programme d’accélération des technologies des isotopes (PATI) de Ressources naturelles Canada (RNCan). La société cible les régions qui avaient peu d’accès au 99Mo/99mTc par le passé (p. ex., l’Asie) et les pays où le coût du 99Mo/99mTc est actuellement élevé (p. ex., le Royaume-Uni). À long terme, le 99mTc produit par un cyclotron pourrait devenir une méthode largement acceptée de production de cet isotope des plus importants. Outre la commercialisation du procédé de production, ARTMS développe un procédé à l’échelle commerciale pour le recyclage des cibles enrichies au 100Mo.

Cosmic Ray Muon Geotomography Technologies Inc. : CRM Geotomography met au point une technologie de géotomographie muonique avancée, pour les travaux d’exploration autour des mines souterraines et multi-métaux afin d’en prolonger la durée de vie. Cette entreprise s’appuie sur la technologie mise au point par les chercheurs en physique subatomique pour détecter les muons. Il s’agit de placer sous terre, dans les galeries de mines, des télescopes à muons. Les gisements de minerai importants et de densité élevée situés près de ces galeries diffusent les muons, qui peuvent être détectés par les télescopes. Ces données indiquent la meilleure direction vers laquelle on peut rechercher de nouveaux gisements. La technique est semblable à l’utilisation d’un tomodensitomètre sur des sujets humains, sauf que les rayons X sont remplacés ici par des muons d’origine cosmique. Cette société étudie également d’autres applications de cette technologie, par exemple l’analyse des conteneurs aux frontières et dans les ports, ainsi que la gestion des matériaux et des déchets nucléaires.

Frontier Sonde Inc. : L’utilisation des outils de diagraphie est essentielle dans l’industrie pétrolière et gazière. FSI a élaboré une nouvelle sonde à neutrons rapides qui incorpore des détecteurs de rayons gamma et de neutrons et qui peut être insérée dans le sondage pendant les opérations de forage. Les neutrons rapides pénètrent facilement le tubage en métal ou en ciment et fournissent les renseignements requis sur les zones abondantes en pétrole et l’écoulement de l’eau. C’est en Chine qu’on trouve la plus grande demande actuellement pour cette nouvelle technologie, mais elle trouvera également des applications dans tous les pays où les entreprises minières emploient les technologies de récupération assistée des hydrocarbures (RAH). On pourrait également utiliser cette sonde dans l’exploration du pétrole et du gaz de schiste ou du méthane de houille. Les essais sur le terrain devraient commencer en 2016.

IKOMED : La fluoroscopie est une technologie d’imagerie médicale largement utilisée pour créer des images dynamiques en temps réel des structures internes du corps, grâce aux rayons X. On emploie la fluoroscopie pour guider les interventions chirurgicales afin qu’elles soient les moins invasives possible, et au cours desquelles des cathéters ou des outils spécialisés sont insérés au travers de la peau pour diagnostiquer et traiter les organes internes. IKOMED a mis au point une technologie qui peut réduire jusqu’à cinq fois l’exposition au rayonnement dans une procédure par fluoroscopie, et ce, sans dégradation de l’image. La solution d’IKOMED permet de sélectionner différentes doses de rayonnement pour différentes parties de l’image, la dose la plus élevée étant dirigée vers la zone d’intérêt. On prévoit qu’un système IKOMED entièrement intégré sera testé sur des sujets humains en 2016, puis commercialisé.

Micromatter Technologies Inc. : Cette entreprise fabrique des films extracteurs de charges pour les accélérateurs, des étalons de calibration sur couche mince pour les analyses par fluorescence X, et des fenêtres minces pour les détecteurs de rayonnement. Cette nouvelle entreprise met à profit une technologie mise au point à TRIUMF pour créer des films extracteurs de charges utilisés dans l’extraction des faisceaux de protons produits par le cyclotron de TRIUMF. Cette technologie de revêtement trouve une foule d’applications. La société vient récemment d’aménager dans ses propres bureaux à Surrey (Colombie-Britannique), sur le dynamique Innovation Boulevard.

ACSI : La société ACSI (Advanced Cyclotron Systems Inc.) est un leader mondial dans la conception et la fabrication de cyclotrons à usage médical, notamment ceux qui servent à la production des radio-isotopes pour les systèmes d’imagerie PET et SPECT. La société ACSI construit des cyclotrons depuis plus de 20 ans. Les origines de cette société remontent à EBCO Industries, une société affiliée qui a contribué à la construction du cyclotron original de 500 MeV de TRIUMF, il y a plus de 40 ans. ACSI est maintenant le troisième plus important fournisseur mondial de cyclotrons à usage médical, et elle emploie 50 employés à temps plein.

D-Pace : Fondée en 1995, la société Dehnel-Particle Accelerator Components and Engineering Inc. (D‑Pace) offre des produits et services d’ingénierie d’avant-garde à l’industrie des accélérateurs de particules. Le fondateur et président de D‑Pace, Morgan Dehnel, a reçu sa formation supérieure à TRIUMF. D‑Pace se spécialise dans la conception de divers systèmes : lignes de faisceau complètes, transport de particules chargées et composants pour les cyclotrons, implanteurs d’ions et accélérateurs linéaires. D‑Pace offre également son expertise à ses clients partout dans le monde, allant des producteurs de semi-conducteurs aux installations de recherche de pointe. Succès financier, D‑Pace jouit d’une forte réputation et d’une envergure internationale avec des clients en France, au Japon, en Corée du Sud, à Taïwan, aux Pays-Bas et aux États-Unis. D‑Pace emploie 10,5 équivalents temps plein, y compris des ingénieurs et des chercheurs. En 2007, la collaboration fructueuse entre TRIUMF et D‑Pace a été reconnue par le gouvernement du Canada, avec l’obtention du Prix Synergie pour l’innovation décerné par le CRSNG.

Nordion : Fondée en 1946, la société Nordion est présente à l’échelle mondiale en sciences de la santé, offrant plus de 30 produits à plus de 500 clients dans plus de 40 pays. TRIUMF a collaboré étroitement avec Nordion au cours des 35 dernières années, ses installations de Vancouver étant situées sur le campus de TRIUMF. Cette collaboration unique a été à la source de plusieurs développements novateurs, y compris la production d’iode 123 d’une grande pureté, utilisé pour lutter contre le cancer de la thyroïde et pour imager les troubles cardiaques et neurologiques, ainsi qu’une méthode brevetée de production à grand volume de palladium 103, utilisé dans les traitements avancés par curiethérapie des cancers de la prostate, du sein et autres. D’autres isotopes sont produits à TRIUMF, notamment le gallium 67, le thallium 201 et l’indium 111. Récemment, TRIUMF et Nordion ont collaboré en réalisant des travaux de recherche portant sur la production et la vente de strontium 82. En 2004, la relation entre TRIUMF et Nordion a été reconnue par le gouvernement du Canada, avec l’obtention du Prix Synergie pour l’innovation décerné par le CRSNG. En raison des contributions importantes de TRIUMF aux activités de Nordion, il est manifeste que ses activités à Vancouver ne pourraient exister sans le soutien de l’infrastructure et de l’expertise du grand laboratoire national qu’est TRIUMF. Ce site produit plus de 2,5 millions de doses d’isotope pour patients par année, soit 15 % du total canadien. Ce partenariat crée de l’emploi : une quarantaine de personnes chez Nordion, et 30 personnes chez TRIUMF qui exploitent l’installation de production d’isotopes, dont le coût est entièrement couvert par Nordion.

PAVAC Industries Inc. : PAVAC développe une technologie hybride de faisceaux d’électrons trouvant des applications industrielles. En avril 2008, grâce à un partenariat avec TRIUMF, PAVAC est devenue membre d’un groupe très sélect de fabricants pouvant produire des cavités radiofréquences supraconductrices (SRF). Ces dispositifs supraconducteurs sont assemblés en modules pour former les accélérateurs de la prochaine génération, dont les applications couvrent les soins de santé et les mesures d’atténuation et de remédiation en environnement, la science des matériaux avancés et la physique des hautes énergies. La collaboration TRIUMF-PAVAC en production de cavités SRF a ouvert de nouvelles possibilités de fabrication avancée au Canada, ce qui lui permet d’être l’un des six pays au monde ayant une capacité industrielle de production dans ce domaine technologique. PAVAC a pu ainsi présenter des soumissions pour d’autres projets dans de grands laboratoires et établissements ailleurs dans le monde, ce qui a contribué à la croissance rapide de l’entreprise. PAVAC est passée d’une installation de 3 000 pi2 avec six employés à une nouvelle installation couvrant 100 000 pi2 et comptant 58 employés.

CRIPT : En 2013, les chercheurs en physique subatomique à la Carleton University ont dévoilé un imposant dispositif de balayage utilisant les muons produits par les rayons cosmiques. Ce prototype construit à Carleton peut scruter l’intérieur des conteneurs et fournir un signal indiquant la présence de matériaux nucléaires à haute densité comme l’uranium ou le plutonium. Appelé tomographie d’inspection passive aux rayons cosmiques (CRIPT – Cosmic Ray Inspection and Passive Tomography), ce système produit des images en trois dimensions de l’intérieur d’un conteneur grâce à la détection des muons produits naturellement par les rayons cosmiques hautement énergétiques qui peuvent traverser des mètres d’acier. Lorsque les muons traversent des matériaux très denses comme l’uranium, le plutonium ou le plomb, ils sont légèrement défléchis. Le détecteur du système CRIPT mesure cette déflexion avec grande précision. Il est devenu opérationnel en 2013 lorsqu’on l’a utilisé pour scruter l’intérieur d’un conteneur transporté par avion. Le système CRIPT est le fruit de la collaboration de plusieurs organisations : Recherche et développement pour la défense Canada, Énergie atomique Canada ltée, l’Agence des services frontaliers du Canada, Santé Canada, AAPS, et International Safety Research d’Ottawa. Le projet a été financé par l’ancien programme Initiative de recherche et de technologie sur les substances chimiques, biologiques, radiologiques et nucléaires et les explosifs (IRTC), un programme financé par le gouvernement fédéral et dirigé par le Centre des sciences pour la sécurité, de Recherche et développement pour la défense Canada.

J’ai fait ma résidence à la Clinique Mayo, et j’estime que ma formation en physique nucléaire a été une des raisons importantes pour lesquelles on m’a choisie. Au cours de ma résidence de trois ans, la Clinique Mayo a construit et mis en service un centre de thérapie protonique. La Clinique utilise un accélérateur de particules qui consiste en un système synchrotron construit par Hitachi, et bien sûr, j’étais déjà familière avec une bonne partie des concepts de physique appliqués dans un tel système. Au cours de mes différents stages cliniques à Mayo, j’ai réalisé un certain nombre de projets de recherche visant tous à préparer les premiers traitements par thérapie protonique. Il s’agissait notamment de simulations de Monte-Carlo utilisées pour la conception du matériel, d’études radiobiologiques et d’une étude clinique qui a permis d’améliorer l’immobilisation et la reproductibilité de la configuration pour les patients atteints de cancer à la tête et au cou. »

Lorraine Courneyea, Ph. D., Victoria, 2011 (ATLAS)
Physicienne médicale au Sunnybrook Health Sciences Centre (Odette Cancer Centre), Toronto (Ontario)

Prix Nobel de physique 2015

Délégation canadienne à la cérémonie de remise des Prix Nobel à Stockholm (Suède), le 10 décembre 2015.

© Queen’s University et Michael Fergusson

Délégation canadienne à la cérémonie de remise des Prix Nobel à Stockholm (Suède), le 10 décembre 2015. Le prix a été présenté au directeur de l’expérience SNO Arthur McDonald (rangée du bas, à gauche). Il était accompagné de George Ewan (Queen’s, rangée du bas, au milieu), David Sinclair (Carleton et TRIUMF, rangée du bas, à droite), Doug Hallman (Laurentienne, rangée du haut, à gauche), Davis Earle (Queen’s, rangée du haut, au milieu) et Aksel Hallin (Alberta, rangée du haut, à droite).

Arthur McDonald, professeur émérite à la Queen’s University, est le colauréat du Prix Nobel de physique 2015, avec Takaaki Kajita de l’Université de Tokyo, « pour la découverte des oscillations des neutrinos, ce qui démontre que les neutrinos ont une masse ».

Les physiciens ont pris des décennies à résoudre l’énigme des neutrinos. Les calculs théoriques prévoyaient que les réactions qui produisent l’énergie au cœur du soleil créent un certain nombre de neutrinos, mais les mesures réalisées sur la Terre en détectaient seulement un tiers. Le groupe de recherche dirigé par Arthur McDonald à l’Observatoire de neutrinos de Sudbury (SNO) a pu démontrer que les neutrinos solaires ne disparaissaient pas pendant leur trajet vers la Terre, et qu’ils étaient en fait observés par le détecteur SNO sous une identité différente. Cette découverte a mené à la conclusion radicale que les neutrinos ont une masse, quoiqu’infime, alors que pendant longtemps on croyait qu’ils n’en avaient pas. Il s’agissait d’une découverte historique en physique des particules. Le modèle standard, qui décrit le fonctionnement de la matière aux plus petites dimensions, a été incroyablement fructueux au cours des années et il a résisté pendant plus de 20 ans à toutes les expériences visant à le mettre en défaut. Cependant, dans ce modèle, les neutrinos sont sans masse, et les nouvelles observations ont clairement démontré que le modèle standard ne peut être une théorie complète des constituants fondamentaux de l’univers.

L’expérience SNO, réalisée à deux kilomètres sous terre dans la mine de nickel active de Vale Creighton, près de Sudbury (Ontario), a repoussé les frontières dans les techniques de détection avec faible rayonnement de fond, pour détecter et mesurer les neutrinos à raison d’environ un par heure par kilotonne d’eau lourde (qui est le milieu de détection), avec une précision sans précédent.

La reconnaissance mondiale des recherches fondamentales réalisées par Arthur McDonald et son équipe à SNOLAB est une source énorme de fierté et de satisfaction. Cette reconnaissance très méritée souligne l’engagement des établissements et des organismes subventionnaires du Canada qui ont aidé Arthur McDonald à réaliser les objectifs du projet, et elle fait ressortir les grandes capacités de l’équipe scientifique, ainsi que le succès de l’expérience SNO à attirer des chercheurs de talent au Canada et à permettre leur épanouissement.

Le Prix Nobel est la plus haute distinction en science. Ce Prix Nobel témoigne des investissements canadiens en physique subatomique au Canada qui ont permis à ce groupe de Canadiens et de chercheurs étrangers d’avoir un impact remarquable en science.

« Même si je suis colauréat du Prix Nobel, cet honneur représente la culmination du travail ardu et de la contribution des collègues canadiens et étrangers avec qui j’ai collaboré pendant toute ma carrière », déclare Arthur McDonald. Le succès de ces recherches d’avant-garde à l’Observatoire de neutrinos de Sudbury est dû en grande partie à sa persévérance, à son dévouement et à son leadership. Outre ces qualités, la perspicacité, l’ingéniosité et le dynamisme d’Arthur McDonald ont été et continuent d’être une source d’inspiration pour toutes les personnes qui ont eu le privilège de travailler sous sa direction.

Le 8 mars 2016 à Ottawa, la Chambre des communes a reconnu les réalisations d’Arthur McDonald et de ses collaborateurs représentant quatre pays et plus de 15 universités et installations de recherche.

Pour ses recherches, Arthur McDonald a reçu de nombreuses distinctions et reconnaissances, dont la Médaille d’or Gerhard-Herzberg en sciences et en génie du Canada en 2003, la distinction la plus importante décernée par le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada. Toujours en 2003, il a reçu la Médaille de l’Association canadienne des physiciens et physiciennes pour l’ensemble de ses réalisations en physique, et il a été nommé Compagnon de l’Ordre du Canada en 2015.

Même s’il est professeur émérite depuis 2013, Arthur McDonald n’en demeure pas moins très actif. Il a obtenu son doctorat en 1969 du California Institute of Technology. Il a travaillé au Laboratoire nucléaire de Chalk River de 1970 à 1982 et a été professeur à l’Université Princeton de 1982 à 1989. Il s’est joint au Département de physique, de génie physique et d’astronomie de la Queen’s University en 1989 et il a été le directeur de l’expérience SNO. Il a été le premier titulaire de la Chaire Gordon et Patricia Gray en astrophysique des particules à Queen’s.

Le succès de l’expérience SNO, qui a permis à près de 90 étudiants de rédiger leur thèse de maîtrise ou de doctorat (dont 63 Canadiens), a mené à l’expansion des expériences dans une installation de recherche de pointe, maintenant appelée SNOLAB. Construite avec l’aide de fonds fournis par des organismes fédéraux, provinciaux et régionaux, cette installation est exploitée par l’Institut SNOLAB dont les établissements membres sont la Queen’s University, la Carleton University, l’Université Laurentienne, la University of Alberta et l’Université de Montréal.

Glossaire

ALPHA (Antihydrogen Laser Physics Apparatus) :
Expérience au CERN visant à piéger les atomes d’antihydrogène et à en étudier les propriétés.
ANL (Argonne National Laboratory) :
Laboratoire national du département de l’Énergie des États-Unis à Argonne (Illinois), où l’on trouve de nombreuses installations, dont l’accélérateur d’ions lourds ATLAS.
ARIEL (Advanced Rare Isotope Laboratory) :
Projet visant à accroître les capacités de TRIUMF pour produire des faisceaux d’isotopes rares et démontrer la nouvelle technologie canadienne des accélérateurs.
ARM (accès aux ressources majeures) :
Programme du CRSNG visant à faciliter l’accès des chercheurs universitaires canadiens en physique subatomique aux grandes ressources uniques nationales ou internationales (établies au Canada) de recherche expérimentale ou thématique, en offrant à ces ressources un appui financier leur permettant de recevoir les chercheurs.
ATLAS (A Toroidal LHC Apparatus) :
Expérience de physique des particules réalisée au Grand collisionneur de hadrons au CERN, visant avant tout à détecter les produits de collision protons-protons.
BaBar :
Expérience passée sur la physique des hadrons B qui a étudié les particules produites par des collisions entre des électrons et des positrons accélérés par le collisionneur PEP-II au SLAC National Accelerator Laboratory.
Belle II :
Expérience en physique des hadrons B au collisionneur électrons-positrons SuperKEKB au Japon, qui commencera à recueillir des données au cours de la présente période quinquennale.
BRIKEN (Beta-delayed neutron studies at RIKEN) :
Grand réseau de détection de neutrons à longs compteurs au 3He, avec mise en place d’un détecteur qui commencera la prise de données au RIBF à partir de 2016.
CANARIE :
Le réseau CANARIE exploite et développe le réseau principal du Réseau national de recherche et d’éducation (RNRE) à ultra-haute vitesse du Canada, ce qui assure le réseautage national et international des chercheurs canadiens en physique subatomique.
CANREB (CANadian Rare-isotope facility with Electron-Beam ion source) :
Initiative financée par la FCI qui améliorera la pureté des faisceaux d’ions rares fournis par le laboratoire ARIEL à l’accélérateur ISAC.
CARIBU (CAlifornium Rare Isotope Breeder Upgrade) :
Installation permettant de créer des isotopes rares riches en neutrons à l’Argonne National Laboratory.
CERN (Organisation européenne pour la recherche nucléaire, autrefois le Conseil européen pour la recherche nucléaire) :
Laboratoire international en physique nucléaire et des particules, établi à la frontière franco-suisse près de Genève.
CLIC (Compact Linear Collider) :
Projet européen visant à construire un collisionneur de haute énergie et de haute luminosité afin d’accélérer des électrons et des positrons et d’en provoquer la collision à une énergie nominale de 3 TeV.
CPT (piège de Penning canadien) :
Le spectromètre CPT est conçu pour permettre des mesures de masse de haute précision d’isotopes de courte durée de vie. Il est situé à l’Argonne National Laboratory, à Argonne (Illinois).
CREX (Calcium Radius Experiment) :
Expérience réalisée au JLab afin de mesurer le rayon de la distribution des neutrons du 48Ca.
CRSNG (Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada) :
Organisme du gouvernement du Canada, le CRSNG appuie les étudiants universitaires dans leurs études supérieures, encourage et appuie la recherche axée sur la découverte et favorise l’innovation en incitant les entreprises canadiennes à investir dans des projets de recherche d’établissements postsecondaires et à y participer.
DEAP (Dark matter Experiment using Argon Pulse shape discrimination) :
DEAP-3600 est une expérience visant à trouver des signes de la matière sombre par la détection directe de particules massives interagissant faiblement (WIMP) à l’aide de la scintillation produite dans 3,6 tonnes d’argon liquide à SNOLAB. La prise des données devrait commencer en 2016. On étudie actuellement l’amélioration de ce détecteur pour le faire passer à 50 tonnes.
DeepCore :
Le projet DeepCore est une extension aux basses énergies de la région densément instrumentée du réseau IceCube, lequel permettrait d'étendre la plage d'énergies observables en dessous de 100 GeV.
DESCANT (DEuterated SCintillator Array for Neutron Tagging) :
Détecteur de neutrons qui sera utilisé avec l’accélérateur ISAC.
DOE (Department of Energy) :
Département de l’Énergie des États-Unis, qui exploite plusieurs laboratoires nationaux aux États-Unis.
DRAGON (Detector of Recoils And Gammas Of Nuclear reactions) :
Détecteur conçu pour mesurer le taux de réactions nucléaires importantes en astrophysique, à ISAC-I.
EDM (moment électrique dipolaire) :
Les moments électriques dipolaires permanents sont interdits pour les particules élémentaires, parce que cela viole la symétrie par inversion du temps.
EIC (Electron-Ion Collider) :
Nouveau projet d’installation du Département de l’Énergie des États-Unis, qui serait ouverte aux utilisateurs en physique nucléaire et établie au Brookhaven National Laboratory ou au Jefferson Laboratory.
ELENA (Extra Low ENergy Antiproton ring) :
Anneau de refroidissement et de décélération d’antiprotons, en cours de construction, et qui constituera une amélioration du décélérateur d’antiprotons au CERN.
EMMA (ElectroMagnetic Mass Analyzer) :
Dispositif en cours de construction pour étudier les produits de réactions nucléaires avec des isotopes rares à ISAC-II.
EURICA (EUroball-RIKEN Cluster) :
Projet de spectroscopie des noyaux par rayons gamma, au laboratoire RIKEN.
EXO (Enriched Xenon Observatory) :
Expérience visant à mesurer la désintégration double-bêta sans émission de neutrinos du 136Xe. L’expérience EXO-200 est actuellement localisée à l’installation WIPP au Nouveau-Mexique (États-Unis). Un détecteur nEXO de prochaine génération, beaucoup plus gros, est proposé pour SNOLAB.
FAIR (Facility for Antiproton and Ion Research) :
Accélérateur construit pour étudier la structure nucléaire et la matière nucléaire, actuellement en construction, et qui constituera une amélioration de l’installation GSI à Darmstadt (Allemagne).
FCI (Fondation canadienne pour l’innovation) :
Organisme créé par le gouvernement du Canada en 1997, la FCI investit dans des installations et des équipements de recherche de pointe, dans un large éventail de disciplines scientifiques.
FRIB (Facility for Rare Isotope Beams) :
Nouveau projet d’installation du Département de l’Énergie des États-Unis en science nucléaire, ouverte aux utilisateurs, en cours de construction sur le campus de l’Université Michigan State, aux États-Unis.
FrPNC (Francium Parity Non-Conservation) :
Expérience visant à étudier la non‑conservation de la parité atomique dans le francium, à ISAC-I.
GlueX (Gluonic Excitations Experiment) :
Expérience visant à identifier les mésons hybrides présentant des degrés de liberté explicites de la matière gluonique, dans le hall D du Jefferson Laboratory.
GRIFFIN (Gamma-Ray Infrastructure For Fundamental Investigations of Nuclei) :
Détecteur de l’accélérateur ISAC-I pour l’étude à haute résolution des désintégrations nucléaires.
GSI :
Centre GSI Helmholtz de recherche sur les ions lourds, à Darmstadt (Allemagne).
HALO (The Helium and Lead Observatory) :
Détecteur à long terme, à faible coût, à longue durée de vie et à faible entretien consacré à la détection des supernovæ et exploité à SNOLAB.
HIGS (High Intensity Gamma-Ray Source) :
Source de rayons gamma rétrodiffusés par effet Compton avec laser à électrons libres, à l’Université Duke.
HL-LHC (LHC haute luminosité) :
Phase de prise de données au LHC avec luminosité accrue, qui devrait commencer en 2026.
ICPN (Institut canadien de physique nucléaire) :
Organisation officielle de la communauté canadienne des chercheurs en physique nucléaire, visant à promouvoir l’excellence de la recherche nucléaire et de l’éducation dans ce domaine, ainsi que les intérêts et les objectifs de cette communauté tant au Canada qu’à l’étranger. L’ICPN a consulté la communauté canadienne des chercheurs en physique nucléaire pour produire le présent document.
ILC (International Linear Collider) :
Projet d’accélérateur linéaire de particules dont l’énergie de collision initiale prévue serait de 500 GeV, avec la possibilité de passer à 1 TeV.
ILD (International Large Detector) :
Détecteur proposé pour le collisionneur ILC.
IPP (Institut de physique des particules) :
Organisation officielle qui favorise l’excellence canadienne en recherche et en éducation dans le domaine de la physique des particules. L’Institut a consulté la communauté canadienne des chercheurs en physique nucléaire pour produire le présent document.
IRIS (ISAC Charged Particle Spectroscopy Station) :
Poste de spectroscopie pour l’étude des réactions avec isotopes rares utilisant les réactions dans une cible d’hydrogène solide.
ISAC (Isotope Separator and ACcelerator) :
Accélérateur d’isotopes rares à TRIUMF. L’installation comporte deux halls d’expérience, ISAC-I et ISAC-II.
ISOL (Isotope Separation On-Line) :
Technique de production d’ions radioactifs dans laquelle la spallation des protons sur une cible épaisse est utilisée pour produire un large éventail de fragments de fission radioactifs.
ISOLDE (Isotope Separator On-Line DEtector) :
Installation de séparateur de masse d’isotopes en ligne au CERN, pour l’étude des faisceaux à basse énergie d’isotopes radioactifs.
JLab (Jefferson Lab) :
Ce sigle désigne l’accélérateur national Thomas Jefferson, situé à Newport News (Virginie).
J-PARC (Japan Proton Accelerator Research Complex) :
Projet conjoint entre KEK et l’Agence atomique de l’énergie du Japon, où se trouve l’accélérateur de protons utilisé pour l’expérience T2K.
KEKB (KEK B-physics) :
Collisionneur positrons-électrons asymétrique pour l’étude de la physique des hadrons B, situé à KEK. C’est là où l’expérience Belle II sera réalisée.
LEP (Large Electron-Positron Collider) :
Collisionneur d’électrons-positrons à haute énergie qui a été exploité au CERN.
LHC (Large Hadron Collider) :
Grand collisionneur d’ions lourds et de protons, au CERN, où sont réalisées les expériences ATLAS, CMS, LHCb et ALICE.
MAMI (Mainz Microtron) :
Accélérateur d’électrons, situé sur le campus de l’Université Johannes Gutenberg à Mainz (Allemagne).
MOLLER (Measurement of a lepton-lepton electroweak reaction) :
Expérience visant à mesurer l’asymétrie de la violation de la parité dans la diffusion électron-électron (Moller) au Jefferson Laboratory.
NA62 :
Expérience réalisée avec le super synchrotron de protons du CERN pour mesurer la désintégration rare du kaon K+ → π+νν.
NEWS (New Experiments With Spheres) :
Collaboration qui développe des compteurs proportionnels sphériques à gaz pour diverses expériences de détection de particules. Le projet NEWS-SNO porte sur la détection directe de la matière sombre, et il serait installé à SNOLAB.
nEXO (The next phase of the Enriched Xenon Observatory) :
Expérience de prochaine génération qui cherchera à détecter la désintégration double-bêta sans neutrinos dans 5 tonnes de xénon liquide enrichi en 136Xe, et qui se déroulerait à SNOLAB.
NuPRISM :
Projet de détecteur Tcherenkov utilisant l’eau comme milieu intermédiaire, pour le faisceau de neutrinos de J-PARC.
OIR (outils et instruments de recherche) :
Programme du CRSNG qui offre un soutien financier à l’acquisition d’outils et d’instruments de recherche.
PHQ (personnel hautement qualifié) :
Personnes acquérant des compétences avancées grâce à la recherche financée par le CRSNG, et comprenant les étudiants, les stagiaires postdoctoraux et les techniciens.
PI (Institut Périmètre de physique théorique) :
Centre de recherche scientifique, de formation et de vulgarisation en physique théorique fondamentale, établi à Waterloo (Ontario).
PICO (Expérience résultant de la fusion de deux groupes existants, PICASSO et COUPP) :
Expérience visant à détecter directement la matière sombre à l’aide de chambres à bulles contenant 40 kg de liquides surchauffés, située à SNOLAB. Une version de 500 kg est en cours de développement.
PINGU (Precision IceCube Next Generation Upgrade) :
Extension à basse énergie de l’expérience IceCube afin de détecter les oscillations de neutrinos atmosphériques aux énergies inférieures à 10 GeV.
PREX (208Pb Radius Experiment) :
L’expérience PREX utilise l’interaction faible par courant neutre qui viole la parité pour sonder la distribution des neutrons dans 208Pb à JLab.
QCD (chromodynamique quantique) :
Théorie qui décrit les interactions fondamentales entre les quarks et les gluons.
Qweak :
Test de précision du modèle standard et détermination des charges faibles des quarks par diffusion d’électrons violant la parité, à JLab.
RHIC (Relativistic Heavy Ion Collider) :
Collisionneur d’ions relativistes au Brookhaven National Laboratory, aux États-Unis.
RIB (Rare Isotope Beam) :
Faisceau d’isotopes rares.
RIBF (Rare Isotope Beam Factory) :
Installation de faisceau d’isotopes rares ouverte aux utilisateurs en science nucléaire, située au laboratoire RIKEN.
RIKEN (The Institute of Physical and Chemical Research) :
Plus important organisme de recherche au Japon qui réalise des expériences et des recherches de haut niveau dans un large éventail de domaines, dont la physique, la chimie, les sciences médicales, la biologie et l’ingénierie.
SHARC (Silicon Highly-segmented Array for Reactions and Coulex) :
Réseau de détecteurs polyvalents pour la détection des particules chargées, qui offrira des capacités uniques lorsqu’il sera intégré au détecteur de rayons gamma TIGRESS et aux faisceaux post-accélérés à la nouvelle installation ISAC-II.
SLAC (Standford Linear Accelerator) :
L’accélérateur SLAC est un laboratoire national de l’Office of Science du Département de l’Énergie des États-Unis, exploité par l’Université Stanford.
SNO (Sudbury Neutrino Observatory – Observatoire de neutrinos de Sudbury) :
Expérience originale en physique des neutrinos solaires située dans les profondeurs d’une mine à Sudbury. Grâce à cette expérience, les physiciens ont résolu l’énigme des neutrinos solaires.
SNO+ :
Expérience en construction à SNOLAB, basée sur l’infrastructure de l’expérience SNO, qui étudiera la désintégration double-bêta, les neutrinos solaires de basse énergie et les géo-neutrinos, grâce à un scintillateur liquide en remplacement de l’eau lourde.
SNOLAB (Sudbury Neutrino Observatory Laboratory) :
Le Laboratoire de l’Observatoire de neutrinos de Sudbury est une installation souterraine en profondeur à Sudbury (Ontario), spécialisée en physique des neutrinos et dans la recherche de la matière sombre.
SoLID (Solenoidal Large Intensity Device) :
Projet de détecteur à grande luminosité et à grande ouverture pour le hall A du Jefferson Laboratory, et qui utilisera l’aimant à solénoïde de l’ancienne expérience CLEO.
SRF (Superconducting Radio Frequency) :
Les cavités radiofréquences supraconductrices (SRF) sont utilisées pour l’accélération des particules chargées. Mentionnons plusieurs exemples d’utilisation : les accélérateurs ISAC-II et ARIEL à TRIUMF, et l’accélérateur à faisceau d’électrons continus au Jefferson Laboratory.
SuperCDMS (Cryogenic Dark Matter Search ) :
Expérience de recherche de la matière sombre, visant à détecter directement les particules massives interagissant faiblement (WIMP), qui emploie des détecteurs au germanium cryogénique. Après une brève période d’essai dans la mine Soudan (Minnesota, États-Unis), on prévoit transférer l’expérience SuperCDMS à SNOLAB.
SuperFRS (Super Fragment Separator) :
Le projet de super séparateur de fragment (SuperFRS) consiste en un séparateur supraconducteur de fragments à grand angle d’ouverture, en amont de plusieurs branches incluant un nouveau système d’anneau de stockage et de refroidissement à GSI.
T2K (Tokai to Kamioka) :
Expérience à grande distance, entre J-PARC et le détecteur de neutrinos Super-Kamiokande au Japon, visant à étudier la physique des oscillations des neutrinos.
TIGRESS (TRIUMF-ISAC Gamma-Ray Escape-Suppressed Spectrometer) :
Détecteur de l’accélérateur ISAC-II pour l’étude à haute résolution des désintégrations nucléaires.
TITAN (TRIUMF’s Ion Trap for Atomic and Nuclear science) :
Piège à ions utilisé avec l’accélérateur ISAC pour les mesures de haute précision de la masse des isotopes rares.
TRINAT (TRIUMF Neutral Atom Trap) :
Dispositif servant à piéger et à étudier les désintégrations radioactives des atomes neutres, utilisé avec l’accélérateur ISAC-I.
TRIUMF :
Laboratoire national du Canada en physique des particules, en physique nucléaire et en science des accélérateurs.
TUDA (TRIUMF U.K. Detector Array) :
Détecteur visant à mesurer les taux des réactions nucléaires importantes en astrophysique, utilisé avec l’accélérateur ISAC-I.
TUEC (TRIUMF User-group Executive Committee) :
Organisme élu composé de sept membres, et chargé de gérer les activités et les affaires du groupe d’utilisateurs de TRIUMF.
UCN (Ultra-Cold Neutron) :
Source de neutrons ultra-froids. Installation financée par la FCI pour l’étude à haute précision des propriétés des neutrons, qui sera bientôt établie à TRIUMF.
VERITAS (Very Energetic Radiation Imaging Telescope Array System) :
Important observatoire de rayons gamma basé au sol, pourvu d’un détecteur à quatre réflecteurs optiques de 12 mètres pour l’astronomie des rayons gamma dans la plage d’énergie allant des GeV aux TeV, situé sur le Mont Hopkins (Arizona, États-Unis).

Mandat du Comité

I. Contexte

Sous l’égide du CRSNG, la communauté canadienne de la physique subatomique établit ses priorités scientifiques et ses priorités en matière de financement au moyen de plans quinquennaux à long terme. Ces plans guident le CRSNG et la Section d’évaluation des demandes en physique subatomique en leur permettant de tenir compte des priorités de la communauté en ce qui a trait aux projets en cours et futurs. Le dernier plan à long terme portait sur la période de 2011 à 2016, en plus de présenter des prévisions pour la période de 2016 à 2021, lesquelles reposaient principalement sur des hypothèses. Depuis, le calendrier de certaines expériences et de projets futurs a changé, et de nouvelles occasions de recherche ont peut-être émergé. Un nouvel exercice de planification à long terme doit être réalisé. Il portera sur la période de 2017 à 2021 et inclura des prévisions jusqu’en 2026.

II. Comité

La communauté canadienne de la physique subatomique sera le moteur du processus d’établissement du plan à long terme. Un comité sera invité à examiner la contribution de cette communauté et à formuler le plan à long terme. Le Comité de planification à long terme sera composé d’un nombre adéquat de spécialistes qui évoluent dans les principales sous-disciplines examinées par la Section d’évaluation des demandes en physique subatomique du CRSNG, y compris les aspects expérimentaux et théoriques, à savoir la physique nucléaire, l’astrophysique nucléaire, la physique des champs et des particules élémentaires et l’astrophysique des particules. Le Comité sera présidé par un chercheur chevronné possédant une connaissance approfondie du milieu de la recherche en physique subatomique au Canada et à l’étranger. Il se peut que des membres du Comité de planification à long terme précédent fassent partie du Comité, afin d’assurer la continuité. Le Comité de planification à long terme comprendra également des membres d’office qui seront uniquement des observateurs et des personnes-ressources pour les autres membres. Ces membres d’office sont :

  • le président de la Section d’évaluation des demandes en physique subatomique;
  • le directeur de l’Institut canadien de physique nucléaire;
  • le directeur de l’Institut de la physique des particules;
  • le directeur de TRIUMF ou le chef de la Division des sciences.

Des observateurs d’autres organismes seront invités à participer aux réunions. Le Comité de planification à long terme peut choisir de tenir certaines réunions à huis clos sans la présence des membres d’office ou des observateurs. Des représentants du CRSNG agiront à titre d’observateurs et de personnes-ressources en tout temps.

III. Mandat

Compte tenu i) de l’internationalisation croissante des projets et des collaborations portant sur des questions fondamentales de la physique subatomique; ii) de l’exigence concurrente de maintenir et d’élargir une infrastructure et des programmes de recherche nationaux de premier ordre; iii) de l’expertise et des points forts reconnus de la communauté canadienne; et iv) du fait que la communauté canadienne de la physique subatomique n’est pas en mesure de participer à tous les projets de recherche, le Comité est invité à recenser les projets scientifiques en physique subatomique que la communauté des chercheurs devrait mener et les priorités connexes auxquelles il devrait donner suite dans un délai de cinq à dix ans et qui assureraient le maintien du leadership scientifique mondial du Canada. De plus, le Comité devra fournir des prévisions budgétaires, y compris les plages de financement pour les projets auxquels la priorité a été accordée. Ces plages devraient inclure des niveaux de financement qui permettraient une contribution limitée, mais efficace, aux projets ainsi que les niveaux qui permettraient une plus grande contribution. L’évaluation du Comité reposera sur une vaste consultation de la communauté canadienne de la physique subatomique. Elle doit se fonder uniquement sur la science actuelle et future de la physique subatomique. Le Comité devra évaluer la faisabilité, l’état de préparation technique et les risques associés à des projets particuliers. Il est impératif que cette évaluation se fasse selon un processus équitable et rigoureux.

Le Comité est également invité à examiner et à analyser les facteurs qui touchent la communauté de la physique subatomique et à formuler des recommandations sur la façon de réduire toute incidence négative ou d’accroître toute incidence positive. Ces facteurs peuvent comprendre, sans toutefois s’y limiter, les programmes du CRSNG autres que ceux relevant de la Section d’évaluation des demandes en physique subatomique, la relation entre le CRSNG et d’autres organismes et organisations, et les activités d’organismes de recherche nationaux. Le Comité peut être également invité par le CRSNG à présenter des commentaires au sujet des changements possibles à la structure des programmes au sein de l’enveloppe du CRSNG pour la physique subatomique, p. ex., des changements touchant les exigences relatives aux demandes ou encore les types de subventions disponibles.

IV. Processus et calendrier

L’Institut canadien de physique nucléaire et l’Institut de la physique des particules seront chargés de préparer des communications à l’intention du Comité de planification à long terme. Ces communications doivent résumer la vision et les priorités scientifiques mises de l’avant par les sous-groupes qu’ils représentent et servent, y compris les aspects expérimentaux et théoriques. Des recommandations générales peuvent également être incluses dans les communications. Chaque institut devrait consulter dans une large mesure les sous-groupes de diverses façons et assurer un processus juste et rigoureux. Les communications doivent être présentées au CRSNG au plus tard le 1er octobre 2015. Elles seront transmises au Comité de planification à long terme. Les instituts doivent veiller à ce que les communications puissent être consultées par l’ensemble de la communauté dans leur site Web accessible au public. Les réponses éventuelles aux communications par des particuliers ou des organisations seront acceptées et devront être présentées au CRSNG; elles seront transmises au Comité de planification à long terme. Tout au long du processus, le Comité de planification à long terme peut également demander la contribution d’autres sources, s’il le juge approprié.

Le Comité de planification à long terme tiendra des consultations publiques (séances de discussion ouverte) à la fin de 2015 ou au début de 2016, après avoir reçu les communications. Le Comité organisera ensuite des réunions en personne ou des téléconférences jusqu’au printemps 2016. Un rapport final sera remis au CRSNG au plus tard le 1er septembre 2016.

V. Livrables

Le Comité de planification à long terme présentera son rapport final au CRSNG au plus tard le 1er septembre 2016. Le rapport sera publié par la suite dans les deux langues officielles.

VI. Conflits d’intérêts et confidentialité

Tous les membres doivent respecter les termes du Code d’éthique professionnelle régissant la conduite des membres des comités permanents et consultatifs du CRSNG. De plus, aux fins du présent exercice, un membre sera jugé être en situation de conflit d’intérêts pendant une discussion sur l’établissement de la priorité d’un projet particulier qui profiterait directement au membre ou à son organisme.

VII. Aide financière

Le CRSNG fournira au Comité de planification à long terme une aide financière pour l’organisation des réunions pertinentes, les déplacements des membres du Comité pour participer à ces réunions et la préparation du rapport.

Membres du Comité de rédaction du plan à long terme

Nom Établissement
Dean Karlen (président) University of Victoria et TRIUMF
Philip Burrows Université Oxford, Royaume-Uni
Jens Dilling TRIUMF
Jacques Farine Université Laurentienne
Mark Huyse K.U. Leuven, Belgique
Randy Lewis York University
Jeffery Martin University of Winnipeg
Erich Poppitz University of Toronto
Achim Schwenk T.U. Darmstadt, Allemagne
Manuella Vincter Carleton University
Andreas Warburton Université McGill
   
Garth Huber (membre d’office) Directeur général, ICPN
J. Michael Roney (membre d’office) Directeur, IPP
Reiner Kruecken (membre d’office) Directeur adjoint, TRIUMF
Nigel Smith (membre d’office) Directeur, SNOLAB
Adam Ritz (membre d’office) Coprésident, SAPES 2016
Olivier Gagnon (observateur) Agent principal des programmes, FCI
Sarah Overington (observatrice) Chef d’équipe, CRSNG